Abuja - Le Sénat nigérian a rejeté hier le projet de réforme de la Constitution qui devait permettre au président Olusegun Obasanjo de briguer un troisième mandat en 2007, mettant fin pour le moment aux ambitions de ses partisans.
Ce projet de réforme constitutionnelle en 116 points, présenté le 11 avril par des fidèles de M. Obasanjo, a été repoussé dans un vote par acclamation, lors d’une séance du Sénat retransmise en direct par la chaîne de télévision privée Ait, a constaté l’Afp.
Selon la Constitution de 1999, établie à la fin des juntes au pouvoir quasiment sans interruption depuis l’indépendance, tout projet de réforme constitutionnelle pour être adopté, doit obtenir l’aval, à la majorité des deux tiers, au Sénat (109 membres) et à la Chambre des représentants (360 députés) et de 24 des 36 Etats de la Fédération.
La décision des sénateurs met donc définitivement fin à ce projet, ne laissant au gouvernement que la possibilité de présenter plus tard un nouveau projet formulé différemment.
Les « non l’ont emporté. Par ce résultat, le Sénat a clairement et de façon éloquente fait savoir que nous arrêtons les procédures sur ce projet d’amendement », a déclaré le président du Sénat Ken Nnamani après le vote par acclamation, déclenchant de bruyantes manifestations de joie parmi les adversaires du projet.
La Constitution fixe à deux mandats consécutifs de quatre ans la limite d’exercice du pouvoir présidentiel. M. Obasanjo, élu en 1999 et réélu en 2003, ne peut donc plus se présenter à la prochaine présidentielle prévue en 2007.
« Aujourd’hui, les Nigérians ont parlé et ont vaincu de manière retentissante le monstre appelé +troisième mandat+. C’est une victoire pour le Nigeria et c’est une victoire pour la démocratie », a commenté devant la presse Yari Gandi, sénateur de l’Etat de Sokoto (nord-ouest).
Les partisans de la réforme ont en revanche regretté que l’augmentation du nombre de mandat présidentiel ait occulté d’autres questions importantes.
« Pourquoi les sénateurs tueraient-ils cette loi sans prendre en compte les questions fondamentales comme la redistribution (de la manne pétrolière), la rotation (de la présidence alternativement entre les six zones géographiques du pays) et la création de nouveaux Etats », s’est interrogée Florence Ita-Giwa, conseillère du président Obasanjo pour les relations avec le Parlement.
Cependant, les députés eux continuaient formellement leurs débats mardi à Abuja, avant de suspendre la séance jusqu’à mercredi. Les représentants doivent voter avant la fin du mois.
Le porte-parole du Sénat, Victor Udoma-Egba, a souligné que « si un problème est résolu au Sénat de telle sorte que rien de peut plus changer, que la Chambre des Représentants poursuive ses travaux relève de l’exercice académique ».
Il a ajouté que les 115 autres points de l’amendement constitutionnel ne seront pas discutés plus avant par le Sénat, parce qu’ »aujourd’hui le projet de réforme est cliniquement mort » sur cette question du troisième mandat qui a provoqué une vive polémique.
« Je suis très heureux de ce résultat du Sénat aujourd’hui. Le rêve d’Obasanjo est mort. La démocratie a triomphé sur la dictature », a déclaré à l’Afp l’opposant historique et défenseur des droits de l’Homme Gani Fawehinmi.
En dehors de l’opposition traditionnelle, l’un des opposants les plus farouches à un troisième mandat de M. Obasanjo n’est autre que le vice-président, Atiku Abubakar, qui a récemment invité les Nigérians à ne pas mettre en péril la démocratie récente, au risque de causer des problèmes ethniques.
Le débat s’est encore envenimé après l’annonce de l’ouverture d’une enquête par l’agence fédérale de lutte contre la corruption (Efcc) sur une tentative non confirmée du gouvernement d’acheter le vote de parlementaires.
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