Quelques jours après le témoignage à charge d'un policier britannique, le gouverneur de l'Etat du Plateau (centre) Joshua Dariye, accusé de corruption et blanchiment d'argent, a été destitué lundi par six des 24 députés locaux, réunis sous haute protection à Jos, la capitale de l'Etat.
L'officier de la Metropolitan Police Peter Clarke avait arrêté Dariye dans un hôtel londonien en juillet 2004 avec 1,5 million d'euros en liquide, mais le gouverneur, libéré sous caution, s'était enfui au Nigeria quelques mois plus tard.
C'est également à Londres qu'en 2005 un autre gouverneur indélicat, Diepreye Alamieyeseigha, de l'Etat pétrolier de Bayelsa (sud) avait cherché refuge. Mais recherché par la police britannique, il avait tenté de fuir le pays habillé en femme et avait été arrêté à l'aéroport d'Heathrow. Dans un de ses domiciles londoniens, les enquêteurs avaient saisi la bagatelle de 1,8 million de livres en espèces (2,7 millions d'euros). Il s'agit du cinquième gouverneur destitué par un parlement local pour corruption depuis décembre 2005.
Lundi, la redoutable Commission des crimes économiques et financiers (EFCC) a lancé des avis de recherche et appelé la population à coopérer.
Tout comme son collègue gouverneur Ayo Fayose, de l'Etat d'Ekiti (sud-ouest), qui s'est évaporé dans la nature le 17 octobre le jour même de sa destitution, Dariye est recherché "pour allégation de corruption, abus de position, opérations frauduleuses de change, et blanchiment d'argent".
"Dernier domicile connu: Government House, à Jos. Dariye parle anglais, haoussa et mushere couramment", précise l'avis de recherche.
La EFCC met toutefois en garde sur les "capacités du suspect à se faufiler hors du pays chaque fois qu'il a été convoqué pour répondre d'accusations criminelles". Il est soupçonné notamment d'avoir puisé environ 13 millions de dollars dans les caisses de l'Etat.
Quant à Ayo Fayose, la commission anti-corruption précise qu'il mesure 1m80, qu'il a été vu pour la dernière fois à Ibadan, dans l'Etat d'Oyo (sud-ouest), qu'il parle l'anglais et le yorouba.
Fin septembre la EFCC a annoncé qu'elle enquêtait actuellement sur les gouverneurs de 31 des 36 Etats. "Nous avons des certitudes dans le cas de 15 Etats et nous pensons aller en justice dans quelques semaines", avait averti le "tsar anti-corruption" Malam Nuhu Ribadu.
Il y a quelques semaines ce dernier avait cette fois avancé le chiffre astronomique de 384 milliards de dollars détournés par les dirigeants du Nigeria depuis l'indépendance en 1960.
Là où le bât blesse, c'est que la EFCC n'est pas habilitée à se substituer à la justice. Si certains pénalistes estiment que tous les moyens sont bons pour nettoyer les écuries, d'autres ainsi que des politiciens jugent, sans pour autant absoudre les personnes visées, que les méthodes employées ne sont conformes ni au droit ni à la constitution et constituent à terme un danger pour la démocratie.
Cette "opération mains propres" visiblement soutenue par la présidence se déroule à moins de six mois d'une échéance capitale pour le pays: en avril, les Nigérians éliront un successeur à Olusegun Obasanjo et renouvelleront les gouverneurs des 36 Etats de la fédération. Le 19 octobre, Nuhu Ribadu a clairement annoncé la couleur: la EFCC va continuer à frapper fort pour éviter d'élire des corrompus en 2007.
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