Sembène Ousmane a reçu, jeudi, la Légion d’honneur de la République française. L’ambassadeur de France à Dakar a décoré le cinéaste et écrivain sénégalais afin d’honorer « l’artiste et l’homme de conviction, engagé ».
Le cinéaste et écrivain sénégalais Sembène Ousmane a reçu, jeudi, à la résidence de l’ambassadeur de la France à Dakar, les insignes d’officier dans l’Ordre de la Légion d’honneur de la République française.
Cette distinction est la troisième qu’a reçue le réalisateur du film Moolaade (lutte contre l’excision des filles, qui a reçu le prix « Un certain regard » au dernier festival de Cannes), après celles d’officier puis de commandeur des Arts et Lettres.
La cérémonie a débuté par la projection du premier film de Sembène Ousmane (83 ans), le court-métrage de 20 minutes Borom Sarett (le charretier) réalisé en 1962.
A l’endroit du récipiendaire, l’ambassadeur de France à Dakar, André Parant, a rappelé que dans le milieu du cinéma africain, on l’appelle « L’aîné des anciens », pour désigner le pionnier, la référence et le doyen qui, en 1966, a signé le premier long-métrage produit et réalisé en Afrique : La noire de..., adapté du roman du même nom et du même auteur, publié en 1962.
Selon le diplomate, avec cette distinction, « on honore l’artiste et l’homme de conviction, engagé » qui du Docker noir aux Bouts de bois de Dieu, en passant par Le mandat, Xala, Emitaï, Camp de Thiaroye (qui a été primé à la Mostra de Venise), etc, a toujours fait montre de sa bataille contre les injustices sociales.
« Sembène est un esprit qui dérange et dénonce », a ajouté M. Parant, selon qui, ses « coups de gueule sont redoutés. Défenseur du cinéma africain, s’il parle, c’est pour houspiller les autorités du continent. Il est le plus connu et le plus respecté des cinéastes africains », mais aussi très lié à la France.
Toujours prêt à dénoncer, Sembène Ousmane a souligné que la parole est, dans toutes les cultures africaines, la chose la plus sacrée, avant de regretter que « tous nos médias sont, aujourd’hui, monopolisés par (une minorité) qui raconte la même chose : des mensonges ».
Selon lui, quand il a reçu la lettre du ministre français de la Culture lui proposant la Légion d’honneur, il a été obligé de consulter beaucoup de personnes, tant il était troublé.
Il n’avait de cesse de se demander s’il fallait accepter cette distinction ou non.
Mais finalement, il a été convaincu par ses proches et ses filleuls français.
Pour le cinéaste qui dit avoir connu « la France des travaux manuels, des labours, la France champêtre », « il faut rompre les relations actuelles entre la France et le Sénégal, car on y trouve des choses néfastes à l’amitié et à la solidarité perpétuelles. Je suis pour l’amitié entre tous les peuples du monde, en particulier avec la France, mais on ne doit pas rejeter nos malheurs sur le dos de la France qui ne nous doit rien ».
Le jour où le Sénégal a eu son indépendance, a-t-il révélé, « j’ai rejeté ma nationalité française. Ayant longtemps lutté pour l’indépendance de mon pays, je ne devais pas demeurer français. Je devais travailler pour le Sénégal afin de léguer un héritage à mes enfants et mes petits-enfants ».
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