"Perdus", "anxieux", "en manque". Confinés et sevrés de ballon, les footballeurs vivent une situation inédite face au coronavirus, au point que plus d'un joueur sur dix présente des symptômes de dépression. Une situation qui touche surtout les plus modestes, donc les plus fragiles.
Tout n'est pas rose loin du rectangle vert, font valoir psychologues et syndicats de joueurs, qui constatent depuis un mois des symptômes inquiétants parmi les footballeurs professionnels dont le quotidien jusque-là confortable et très cadré a été bouleversé par la pandémie de Covid-19.
"Ils étaient dans leur bulle et maintenant, ils sont perdus car ils pensaient que la période de confinement ne serait pas aussi longue", analyse Philippe Godin, psychologue du sport à l’UCL. "On dit que la paresse est la mère de tous les vices. On y est", affirme-t-il à l'AFP, décrivant des joueurs qui se ruent sur les jeux, l'alcool, le sexe...
Et ces comportements ne semblent pas isolés: selon une enquête du syndicat mondial des joueurs Fifpro, publiée lundi et menée sur 1600 sportifs en Angleterre, France, Suisse, Afrique du Sud, Belgique ou encore aux États-Unis, "22% des joueuses et 13% des joueurs ont fait état de symptômes compatibles avec le diagnostic d'une dépression". Un état d'"anxiété généralisée" a été par ailleurs signalé par 18% des joueuses et 16% des joueurs interrogés.
“Les joueurs vivent actuellement, ce dont souffrent les footballeurs qui viennent de mettre fin à leur carrière”, relève Philippe Godin. “Ils n’ont qu’un centre d’intérêt (le foot) et sans cela, ils sont perdus, en manque, au contraire de sportifs moins aisés qui étudient, qui travaillent.”
"Sans passion, un sportif ne va jamais bien loin", a résumé samedi le quintuple Ballon d'Or Cristiano Ronaldo auprès de l'agence de presse portugaise Lusa.
Kompany: "Nous pédalons dans le vide"
Avis partagé par Vincent Kompany."Nous pédalons dans le vide", assure le défensseur. Pour meubler l'attente, le Sporting a renoué avec les entraînements "pour les joueurs qui le souhaitent", malgré l'incertitude concernant la reprise des compétitions. "Cela était important pour les joueurs de retrouver l'ambiance des entraînements, de se sentir à nouveau en équipe", explique David Steegen, responsable presse du club le plus titré en Belgique.
Pour autant, le retour au plus tôt des compétitions n'est pas non plus la panacée face au blues des footballeurs, car certains d'entre eux s'inquiètent aussi du risque de contamination en cas de reprise trop hâtive.
"Si nous mettions la pression sur les joueurs afin de les faire revenir dans un environnement où ils pourraient sentir que leur sécurité est mise en danger, cela augmenterait plutôt leur anxiété et leur inquiétude", a souligné Jonas Baer-Hoffmann, le secrétaire général de la Fifpro, lundi lors d'une conférence de presse téléphonique. "La santé mentale des joueurs ne doit pas être un prétexte pour reprendre la compétition trop tôt.”
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