(Reuter) : L'Union des tribunaux islamiques, qui contrôle Mogadiscio, a accusé l'armée éthiopienne d'être entrée sur le territoire de la Somalie pour venir en aide au plus en plus fragile gouvernement provisoire.
Le gouvernement éthiopien a aussitôt démenti et conseillé en retour aux miliciens islamistes, qui étendent progressivement leur emprise sur le sud de la Somalie, de ne pas franchir la frontière qui sépare les deux pays de la Corne de l'Afrique. Depuis la prise de Mogadiscio, le 6 juin dernier, les miliciens islamistes ont progressé vers le nord, prenant d'abord la ville de Jowhar puis se rapprochant de Beledweyne, à la frontière éthiopienne. En contrôlant cet axe routier sud-nord, ils s'assureraient pratiquement la maîtrise de la moitié sud du pays. Et après avoir mis en déroute l'éphémère Alliance pour la restauration de la paix et contre le terrorisme (Aprct) - un regroupement de chefs de guerre -, ils resserrent l'encerclement autour de Baïdoa, siège provisoire du gouvernement fédéral de transition au nord-ouest de Mogadiscio, très exactement à mi-chemin entre la capitale somalienne et la frontière éthiopienne.
Selon le président de l'Union des tribunaux islamiques, cheikh Charif Ahmed, quelque 300 soldats éthiopiens auraient précisément franchi samedi cette frontière et marcheraient sur Baïdoa pour venir en aide aux institutions fédérales de transition présidées par Abdullahi Youssou Ahmed, un ancien chef de guerre très proche d'Addis-Abeba. "Des soldats éthiopiens viennent de franchir la frontière et arrivent", a affirmé cheikh Ahmed, selon qui l'incursion a eu lieu dans la matinée à Dollow, aux confins de la Somalie, de l'Ethiopie et du Kenya.
Samedi en fin d'après-midi, cette colonne éthiopienne comptant une cinquantaine de véhicules blindés se trouvait, selon des responsables somaliens, à 50 km à l'intérieur du pays, dans la ville de Louk. D'autres mouvements de troupes, selon l'Union des tribunaux islamiques, auraient été observées dans le secteur de Beledweyne.
"L'Ethiopie n'a pas franchi la frontière", a démenti Addis-Abeba par la voix de Bereket Simon, ministre éthiopien sans portefeuille. "Pour le moment, les fondamentalistes sont à Beledweyne (bourg frontalier somalien) et marchent vers la frontière éthiopienne. L'Ethiopie espère qu'ils ne franchiront pas la frontière", a ajouté ce proche du Premier ministre Meles Zenawi.
L'Ethiopie, le plus fidèle allié de la lutte des Etats-Unis contre le terrorisme dans la Corne de l'Afrique et pays largement sécularisé, craint l'influence islamique dans la région. Elle n'a pas hésité à envoyer ses troupes en Somalie par le passé ou à soutenir les chefs de guerre. Quinze ans après le renversement du régime dictatorial de Mohammed Siad Barré, en 1991, qui a plongé le pays dans le chaos et l'anarchie, la montée en puissance des tribunaux islamiques est observée avec un intérêt doublé d'inquiétude par les Etats-Unis.
Washington, qui a très probablement financé l'Arpct délogée de Mogadiscio, redoute que la Somalie devienne un nouveau havre pour le réseau Al Qaïda, à l'image de ce qu'était l'Afghanistan sous le régime des taliban.
L'Union des tribunaux islamiques nie protéger des membres d'Al Qaïda ou vouloir créer un Etat islamique, disant seulement vouloir établir une force de police, une autorité pour désarmer les milices et une nouvelle administration "efficace et au service des habitants". "Nous ne sommes pas des terroristes. Il n'y a pas d'étrangers. Il n'y a pas d'Al Qaïda en Somalie. Nous n'avons pas de relations avec eux", a encore affirmé samedi Ahmed à la presse.
L'Union promet également de rendre Mogadiscio "suffisamment sûre" pour y installer le gouvernement, mais menace de rompre les pourparlers entamés avec le gouvernement intérimaire si celui-ci continue de prôner le déploiement d'une force étrangère de maintien de la paix.
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