Les 1.043.000 d’inscrits sur les listes électorales pour la présidentielle post-transition militaire ont été appelés à nouveau hier, dimanche 25 mars, aux urnes pour départager Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi et Ahmed ould Daddah, les deux candidats arrivés respectivement en tête au premier tour qui s’est joué le dimanche 11 mars dernier. Le scrutin se déroulait hier jusqu’aux environs de 17 heures dans un calme plat avec un taux de participation plus faible qu’au premier tour. L’abstention risquant d’ailleurs de ravir la vedette au primé.
Nouakchott. (Envoyé spécial). Les électeurs mauritaniens se sont rendu hier, dimanche dans les 2. 378 bureaux de vote répartis, dans les 13 wilayas (régions) du pays. Pour la seconde fois en l’intervalle de 15 jours, ils sont invités à désigner le futur président de la République. Un scrutin important qui met un terme à la transition ouverte depuis le 3 août 2005 avec la chute dans l’ancien régime controversé de Maouya ould Taya.
La compétition met aux prises deux hommes au profil fort ressemblant : Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi (69 ans) et Ahmed ould Daddah (66 ans), respectivement candidat soutenu par l’ancienne majorité présidentielle et chef de fil de l’ex-opposition. Tous deux sont nés dans d’illustres familles maraboutiques, diplômés en économie dans les universités françaises et sénégalaises, ils ont fait leurs premiers pas en politique à l’ombre de Moctar ould Daddah, le « père de la nation » et frère aîné d’Ahmed. Dans les années 1970, ils étaient tous les deux membres de son gouvernement.
Les deux candidats qui se traitent « d’amis et frères » partagent aussi le même souci du « changement ». Un mot d’ordre dont chacun se réclame à travers des programmes presque identiques : réforme de l’Etat, renforcement de la justice, protection des droits de l’homme, meilleure gestion des ressources publiques, lutte contre la pauvreté et le chômage, renforcement de l’unité nationale et règlement du passif humanitaire, un euphémisme local qui désigne les exactions dont a été victime la communauté noire dans les années 1989-1990. La seule vraie différence entre les deux hommes est le rapport que chacun a entretenu par le passé avec l’ancien président Ould Taya, ou qu’il est présumé entretenir avec la junte qui dirige la transition en cours. Au tout début du règne de l’ex-raïs, Ould Cheikh Abdallahi a été son ministre des Pêches durant 12 mois et aujourd’hui, l’essentiel des soutiens dont il bénéficie se recrute parmi les barons de l’ancien régime. Quant à ses rapports avec les militaires actuellement au pouvoir, des rumeurs très répandues dans l’opinion le présentent comme bénéficiant du soutien d’une partie d’entre eux, notamment le clan du colonel Mohamed Abdelaziz, le tout puissant chef de la garde présidentielle et homme fort de la junte.
Or, c’est presque à l’opposé d’une telle posture, que se situe son rival. N’ayant jamais travaillé avec le régime déchu, Ould Daddah est au contraire l’homme qui veut et semble incarner l’opposition historique à celui-ci. Dans un pays où la présidentielle d’hier est avant tout l’occasion d’entamer une nouvelle page de son histoire politique, de tels détails pourraient peser, au final.
L’abstention en question
Hier, en début d’après-midi, on s’interrogeait encore sur le taux de participation au scrutin en craignant que l’abstention ne ravisse la vedette au primé. Dans la matinée en effet, l’affluence devant les bureaux de vote à Nouakchott qui ont ouvert leurs portes à 8 heures, était relativement faible. Même chose quasiment sur l’ensemble du territoire national. Moins de 40% à midi des inscrits avaient accompli leur devoir civique, selon des estimations du ministère de l’Intérieur, maître d’œuvre de l’organisation. Et même si on s’attend à voir les électeurs qu’ameutent les deux camps en compétition, débarquer le soir, il y a fort à parier que le deuxième tour n’atteindra pas la même participation de plus de 65% du premier tour. Une situation qui s’expliquerait, selon certains observateurs, par le fait que la question identitaire fortement présente au premier tour avec les 19 candidats reflétant l’arc-en-ciel communautaire du pays, était devenue moins importante dans ce second tour qui mettait en prise deux hommes d’une même communauté. D’autres, en revanche, pensent que l’abstention découlerait également des identités remarquables des programmes déclamés des deux hommes. Ou encore, soulignent-ils, « les électeurs pensent que les jeux sont déjà faits et n’éprouvent par conséquent pas la nécessité d’aller voter ».
N’empêche, Ely Mohamed ould Vall, le président du Cmjd et chef de l’Etat qui a voté sur les coups de 9 heures 30 comme à l’accoutumée au bureau 6 du Domaine dans le chic quartier de Tevragh-Zeïna, s’est réjoui du bon déroulement du scrutin. Il a cependant mis l’accent sur l’importance que revêt à ses yeux, une bonne participation des populations. Scrutant l’avenir, le président Vall s’est dit très optimiste. Selon lui, « la Mauritanie de demain sera autre ». Les Mauritaniens et les Mauritaniennes ne demandent rien d’autre.
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