"Je suis le chef, les autres sont mes subordonnés". Le président de Guinée, le général Lansana Conté, a réaffirmé jeudi soir qu'il restait l'homme fort du pays, malgré la récente nomination d'un Premier ministre.
Agé de 73 ans, affaibli par la maladie, le chef de l'Etat guinéen est au pouvoir depuis 1984.
Interrogé à Conakry par l'AFP et la chaîne de télévision TV5 sur le point de savoir si une période de transition était ouverte, en vue de sa succession, le chef de l'Etat, dont le mandat s'achève en 2010, a répondu sèchement: "Il n'y a pas de transition ouverte.
Je suis le chef, les autres sont mes subordonnés".
"Des erreurs ont été commises mais on est en train de les corriger. Tous les hommes font des erreurs, il n'y a aucune honte à les reconnaître et à les corriger", a-t-il ajouté, sans plus de précisions.
Une grève générale et des manifestations contre le régime ont paralysé ce pays du 22 janvier au 26 février. Selon un bilan officiel, la répression a fait 137 morts, pour la plupart des civils.
La crise avait pris fin avec la nomination à la tête du gouvernement de Lansana Kouyaté, un diplomate proposé par les syndicats dans le cadre d'un accord avec les autorités.
Les propos du chef de l'Etat interviennent quelques heures seulement avant l'entretien de M. Kouyaté avec le président français Nicolas Sarkozy, prévu vendredi à Paris.
Revenant sur la grave crise de janvier-février, le président Conté s'est voulu rassurant: "Quel est le pays qui n'a pas connu d'événements comme ça, d'événements douloureux ? Nous ne sommes pas les seuls à connaître de tels événements".
"Ça arrive à tout le monde d'avoir des moments de difficultés, d'incompréhensions entre la population et le pouvoir", a-t-il ajouté.
Il a démenti avoir nommé M. Kouyaté sous la pression des syndicats et de la communauté internationale: "J'ai nommé un Premier ministre loin de toute pression, je n'étais pas obligé mais c'était nécessaire".
"J'espère que c'est une bonne chose d'avoir un Premier ministre pour prendre des coups à la place du président. La nomination de Kouyaté au poste de Premier ministre est un choix personnel".
"J'ai eu des Premiers ministres avec lesquels je ne me suis pas entendu, ils sont partis", a-t-il rappelé.
"Ni les syndicats, ni aucun corps étranger ne m'a obligé à nommer un Premier ministre. Il fera ce que je veux, ce qu'il veut. L'essentiel, c'est le bonheur du peuple de Guinée".
"Je suis satisfait de lui. Je l'ai appelé pour m'aider, il le fait bien. Le jour qu'il ne fera pas le bonheur du pays, il s'en ira", a précisé le président.
Le 1er mars, M. Kouyaté avait été investi et avait immédiatement reçu le soutien politique et financier de la France.
Lors d'une visite-éclair à Conakry, la ministre française déléguée à la Coopération de l'époque, Brigitte Girardin, avait annoncé une aide de 1,1 million d'euros.
Depuis cette date, ce diplomate de 56 ans réputé bon négociateur assume la fonction de chef du gouvernement, remplie par le chef de l'Etat depuis l'indépendance (1958).
L'entretien avec le président Conté a eu lieu dans la résidence de Mamadou Sylla, ancien chef du patronat et ami du chef de l'Etat.
Ce dernier, ainsi que le frère du président, Harouna Conté, un homme d'affaires, et le secrétaire-général du Parti de l'unité et du progrès (PUP, au pouvoir) Sekou Konaté, y ont assisté.
Lors de l'entretien, le chef de l'Etat affaibli depuis plusieurs années par un diabète et une leucémie fumait cigarette sur cigarette.
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