(Reuters) - Une quarantaine de personnes ont été tuées par des miliciens chiites dans un quartier à majorité sunnite de Bagdad. Jamais la capitale irakienne n'avait connu de pareilles violences interconfessionnelles et le spectre d'une guerre civile hante de nouveau le pays.
Selon le ministère de l'Intérieur, au moins 42 habitants du quartier de Djihad, dans l'ouest bagdadi, ont été tués. Certains ont été sortis de force de leur véhicule puis abattus près de la mosquée chiite de Zahra, située dans ce quartier en majorité sunnite, où un attentat à la bombe avait fait trois morts samedi soir. Ce déchaînement de violence d'une ampleur sans précédent dans la capitale irakienne constitue un nouveau revers de poids pour le programme de réconciliation nationale du Premier ministre Nouri al Maliki. La police et des hommes politiques sunnites accusent les milices de l'Armée du Mehdi, fidèle à l'imam chiite radical Moktada Sadr, ainsi que des commandos de policiers d'avoir perpétré ces assassinats. Mais des responsables du mouvement de Sadr ont démenti toute implication dans ces violences.
Dans un communiqué, l'imam chiite a lancé un appel au calme. "J'exhorte toutes les forces gouvernementales et populaires à faire preuve de retenue et à prendre leurs responsabilités d'abord devant Dieu, ensuite devant la société", déclare-t-il. Des tensions interconfessionnelles sont apparues au sein même du gouvernement, des proches de Maliki ayant reproché au vice-Premier ministre sunnite ses propos jugés incendiaires sur l'implication des chiites dans les violences. Des sources au sein de la police et du ministère de l'Intérieur ont indiqué que les miliciens avaient demandé aux habitants du quartier de Djihad leur carte d'identité pour repérer les noms à consonance sunnite.
Double attentat contre une mosquée chiite
Un homme politique chiite a déclaré dimanche que les combattants de l'Armée du Mehdi étaient effectivement entrés dans le quartier sunnite, mais il a affirmé qu'ils recherchaient des activistes responsables du meurtre de chiites."Il y a de nombreux groupes terroristes à Djihad qui tuent des familles chiites, alors ils y sont allés pour les combattre", a-t-il déclaré. Le président kurde Djalal Talabani a lancé un appel au calme et les forces irakiennes ont imposé un couvre-feu dans le quartier de Djihad. Alors que la nuit tombait sur la capitale, deux voitures piégées ont explosé près d'une mosquée chiite dans le quartier de Kasra, situé dans le nord-est de Bagdad, tuant au moins 17 personnes et faisant 45 blessés selon la police. Des coups de feu ont par ailleurs été entendus dans deux autres quartiers sunnites tandis que des habitants de Djihad disent avoir vu des dizaines de personnes quitter leur maison. Les personnels médicaux du principal hôpital de l'ouest de Bagdad ont dit avoir reçu 29 cadavres et d'autres corps gisent, selon eux dans les rues. Des journalistes de Reuters présents dans le secteur ont vu les corps de quatre hommes étendus sur le côté d'une rue. Tous étaient ligotés et plusieurs bâillonnés, signe caractéristique des violences interconfessionnelles qui ont poussé l'Irak au bord de la guerre civile.
Les attentats à la bombe ont fait de nombreuses victimes en Irak, mais l'exécution en plein jour de civils est relativement rare et limitée à des zones troublées situées à l'extérieur de la capitale. Bagdad en revanche n'avait jamais été le théâtre de pareilles violences. A quelques kilomètres du quartier de Djihad, des journalistes de Reuters ont vu des miliciens chiites boucler le quartier de Choula, un îlot chiite au milieu des secteurs sunnites de l'ouest de la capitale. Des miliciens de l'Armée du Mehdi ont bloqué les rues avec des pneus enflammés et ordonné aux habitants de rester chez eux, apparemment par crainte de représailles. Ces violences font suite à une série de représailles entre chiites et sunnites et à des opérations menées par les forces américaines à Bagdad pour arrêter des chefs de guerre sunnites. Le Premier ministre chiite Nouri al Maliki s'est engagé à démanteler les milices, dont certaines sont liées à la police ou à des partis politiques chiites appartenant à son gouvernement. "Ces meurtres révèlent l'incapacité du gouvernement à mettre fin aux milices", a déclaré Adnan al Doulaïmi, le dirigeant du Front de la concorde, la principale formation sunnite, qui boycotte le Parlement depuis l'enlèvement d'une élue de son parti.
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Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:36 PM)Participer à la Discussion