Quatre mois après sa destitution par l'armée, Mohamed Morsi, premier chef d'Etat démocratiquement élu en Egypte, est jugé pour "incitation au meurtre". Détenu au secret depuis son renversement le 3 juillet, il est arrivé lundi 4 novembre en hélicoptère dans la cour du tribunal du Caire aux alentours de 8 heures locales (7 heures à Paris) pour y comparaître aux côtés de 14 autres dirigeants des Frères musulmans. Tous risquent la peine de mort ou la réclusion à perpétuité.
Un tel verdict ne manquerait pas d'attiser encore les tensions entre partisans et adversaires qui s'opposent avec violence depuis la chute de M. Morsi. Sespartisans, emprisonnés ou décimés par l'implacable répression des autorités installées par l'armée, appellent d'ores et déjà à la mobilisation au moment où M. Morsi doit faire sa première apparition publique depuis sa mise en détention au secret, faisant craindre de nouvelles violences.
Les autorités vont déployer 20 000 hommes au Caire, mégalopole de 20 millions d'habitants, se disant prêtes à répondre à toute violence. Dès dimanche soir, deux policiers égyptiens ont été tués et un troisième blessé dans une attaque près d'Ismaïliya, sur le canal de Suez, ont annoncé des sources des services de sécurité, bilan confirmé de source médicale.
RÉPRESSION CONTRE LES FRÈRES MUSULMANS
Depuis la chute de Mohamed Morsi, le gouvernement intérimaire appuyé par les militaires a lancé une implacable répression contre la confrérie, tuant des centaines de ses partisans et arrêtant presque tous ses dirigeants.
L'assaut sanglant lancé le 14 août par l'armée pour démanteler deux campements établis par les pro-Morsi au Caire a déclenché parallèlement une vague de violences sans précédent depuis l'insurrection islamiste des années 1990. Une centaine de membres des forces de sécurité ont été tués dans une série d'attaques dans la péninsule du Sinaï, dans les villes bordant le canal de Suez et dans la vallée du Nil.
Lire l'analyse de Sophie Pommier, spécialiste de l'Egypte : Egypte, les limites d'une répression
Le chaos sécuritaire et l'instabilité politique sont venus encore plomber une économie dépendant largement du tourisme et des investissements étrangers. L'armée accuse les Frères musulmans d'encourager le terrorisme mais la confrérie rejette tout lien avec des activités violentes.
MORSI PRÊT À DÉFENDRE SA "LÉGITIMITÉ"
Malgré un procès jugé à charge, les autorités se défendent de tout biais politique. Le porte-parole du ministère des affaires étrangères Badr Abdelatty a affirmé à la presse ce week-end que M. Morsi "comparaîtrait devant un juge conformément au Code pénal égyptien. "Rien d'extraordinaire, rien d'exceptionnel, il a droit à un procès libre et juste", a-t-il commenté.
Contrairement au président déchu Hosni Moubarak, également jugé pour meurtre de manifestants, M. Morsi a déjà prévenu qu'il ne coopérerait pas avec la justicedont il ne "reconnaît pas l'autorité", selon l'Alliance contre le coup d'Etat, la coalition chapeautée par les Frères musulmans qui organise la mobilisation de ses partisans.
Ses avocats ne seront présents lundi que pour surveiller la procédure judiciaire, a ajouté l'Alliance. Les rares personnes ayant vu M. Morsi dans son lieu de détention secret l'ont trouvé déterminé à défendre sa "légitimité" puisée dans les urnes, comme il l'avait affirmé dans une vidéo diffusée le soir de son éviction.
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