Au Burundi, après le décès du président Pierre Nkurunziza en début de semaine, la Cour constitutionnelle avait à choisir ce vendredi entre un intérim assuré par le président de l’Assemblée nationale, conformément à l’article 121 de la Constitution, ou à une interprétation de celle-ci qui autorise une intronisation immédiate du président élu. Le suspense n’a pas duré longtemps, la Cour a choisi la première option qui avait la faveur du régime burundais.
Sans grande surprise, la Cour constitutionnelle a jugé que dans les conditions actuelles, un président intérimaire « n’est pas nécessaire ». Le principal argument de la Cour est de considérer que l’objet de l’intérim, - qui est d’organiser une élection anticipée en cas de vacance de poste définitive de la présidence - n’existe plus du moment où le Burundi dispose déjà d’un président élu. La Cour constitutionnelle a donc ordonné que le général Evariste Ndayishimiye prête serment « le plus tôt possible ».
Cet arrêt signe la fin de l’incertitude qui régnait autour de la succession du président Pierre Nkurunziza, décédé de manière inopiné lundi 8 juin d'un « arrêt cardiaque » selon le gouvernement burundais, alors que de nombreuses autres sources parlent du Covid-19.
Sa mort est survenue en pleine processus électoral, juste après le triple scrutin contesté du 20 mai dont une présidentielle, et une série d’autres élections dont des sénatoriales le 20 juillet prochain.
La nouvelle Constitution du Burundi innove avec désormais un seul vice-président et un Premier ministre. Ces nouvelles institutions ainsi que le gouvernement devront d’abord être approuvé par le nouveau Parlement élu qui n’est pas encore en place.
En attendant que le processus électoral aille à son terme, les institutions sortantes restent « en fonction », a encore décidé la Cour constitutionnelle. En attendant, le régime burundais veut une intronisation rapide du général Ndayishimiye, alors que la passation de pouvoir était à l'origine prévue le 20 août. La cérémonie d'intronisation devrait avoir lieu en début de semaine prochaine, probablement avant jeudi, a assuré un haut cadre burundais. « C’est pour que ce soit lui qui conduise les funérailles de son prédécesseur », a-t-il expliqué.
Pourquoi cette accélération ?
Intronisation immédiate ou case intérim ? Le balancier a oscillé d’un côté puis de l’autre depuis le décès de Pierre Nkurunziza, avant que les soutiens du président élu décident de ne pas prendre de risque, selon nos sources. Il faut dire que le président de l’Assemblée nationale Pascal Nyabenda, un civil, a été pendant longtemps le premier choix de Nkurunziza pour lui succéder. Mais la majorité de ces généraux sont parvenus à lui imposer leur « frère d’armes », le général Evariste Ndayishimiye.
Les tensions qui traversent cette « junte » se sont depuis lors accentuées. Les soutiens du président élu « ont donc décidé de ne pas tenter le diable » toujours selon ces mêmes sources, histoire d’éviter selon elles, « une longue transition et les tentations qui pourraient naître dans l’autre camp de ce fait ».
Le Burundi fait également face à de nombreux défis et le général Ndayishimiye ne pouvait pas se permettre plus de deux mois d’immobilisme, selon des observateurs. Une économie en ruine avec 75% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté et un taux de chômage de 65% pour les jeunes de moins de 35 ans, ou encore une pandémie du coronavirus niée mais qui en réalité est en train d’exploser…
« Le président élu se rend compte que la situation pourrait déraper », justifie un de ses soutiens, en expliquant que « il veut aller vite, lancer son programme axé sur la lutte contre la pauvreté, promouvoir la réconciliation nationale et l’ouverture à l’étranger afin d’adresser tous ces problèmes ».
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