Sous ses faux airs de Lionel Messi, le quatrième arbitre du match PSG-Basaksehir s'adressait à son compatriote et juge de champ Ovidiu Hategan en parlant de Pierre Achille Webo, l'entraîneur adjoint de l'équipe turque. Depuis qu'il a prononcé ces mots, la foudre tombe sur cet homme de 43 ans. « J'ai honte! Il a écrit la page la plus infamante de l'arbitrage en Roumanie », s'emporte par exemple Ion Craciunescu, une des références de l'arbitrage roumain.
Sebastian Col?escu promet de ne plus jamais aller sur Internet. Il en a intérêt. Tout son pays où il est rentré précipitamment et le monde entier lui tombent dessus à bras raccourcis. Quand il n'est pas traité de raciste, il est considéré comme « complètement stupide ». « Quiconque me connaît sait que je ne suis pas raciste! J'essaye juste d'être bon », aurait-il dit à ses proches selon le quotidien roumain ProSport.
Damien Boudjemaa, milieu de terrain des Lusitanos Saint-Maur (N2) a évolué 4 saisons en Roumanie. De 2011 à 2013 à Petrolul puis de 2015 à 2017 à Astra Giorgiu. Il a été champion de Roumanie avec cette équipe en 2016. «Je connais bien cet arbitre, nous dit-il. J'ai déjà discuté avec lui après les matchs. Je ne pense pas qu'il soit raciste. C'est malheureusement leur manière de parler là-bas. Cet arbitre sait qu'il a fait une erreur. Il n'aurait jamais dû dire ça mais je pense qu'il a prononcé ces paroles pour désigner au plus vite auprès de l'arbitre central le membre du staff turc qu'il devait expulser. Après pour avoir vécu en Roumanie quelques années, je peux vous dire qu'il n'y a pas plus de racisme là-bas qu'en France.»
Il était jusque-là un anonyme du sifflet au parcours très modeste et tourmenté. Personne au cours d'une carrière entamée en 2004 ne lui a jamais confié un sifflet pour diriger un match important ou autre rencontre de prestige. L'arbitrage est pourtant la raison de vivre de cet ingénieur de formation.
« Je ne pourrai jamais rendre à l'arbitrage même 10 % de tout ce que j'en ai reçu » disait-il en recevant son blason d'arbitre Fifa en 2006 en rêvant de tour du monde. « Il est l'arbitre le plus prometteur de sa génération », prédisait l'organisation des arbitres roumains. Sebastian Col?escu n'a jamais sifflé en dehors de l'Europe.
Le 11 novembre dernier, il a dirigé un match amical entre la Bulgarie et Gibraltar (3-0) qui fut le sommet de la carrière internationale d'un homme qui a aussi arbitré deux fois le Portugal en quelques jours en 2017. Mais même Cristiano Ronaldo, absent pour les deux rencontres, ne lui avait pas fait honneur de sa présence.
Presque un symbole pour une carrière sans éclat. Col?escu a arbitré seulement 7 matchs de sélections (l'Arabie Saoudite, la Serbie, l'Irlande ou la Pologne et des matchs de jeunes). Son bilan en Ligue des champions est encore plus famélique : deux matchs de qualification en juillet avec des équipes de seconde zone qui jouent quand cela n'intéresse personne. Cantonné essentiellement au championnat de son pays ou au rôle ingrat de 4e arbitre, le Roumain en tant qu'arbitre principal a dirigé un total de 364 matchs (dont 27 internationaux) qui font de lui, un des trois arbitres en activité les plus expérimentés de son pays.
Les médias roumains le décrivent aujourd'hui comme un homme fragile qui ne sait pas gérer la pression. Originaire de Craiova dans le sud de la Roumanie, milieu de terrain moyen dans une équipe de 2e division locale, Col?escu ne remettra probablement jamais un sifflet à la bouche en dehors de son pays.
Etre banni, il sait que cela signifie. En 2007, après avoir « oublié » deux pénaltys pour la même équipe et visiblement favorisé l'autre, on lui avait retiré sa licence Fifa avant de le rétrograder en deuxième division quelque part dans les Carpates. Il avait alors tenté de se suicider. L'arbitrage lui a sauvé la vie lorsque l'UEFA lui a à nouveau accordé sa confiance pour diriger un Grèce-Autriche chez les moins de 17 ans. En 2015, l'arbitre du scandale avait toutefois encore été banni après avoir refusé trois buts au Steaua Bucarest.
Il avait depuis poursuivi bon an, mal an une carrière dont personne n'aurait jamais parlé jusqu'à ce jour. Elle se serait achevée tranquillement avec un pot d'adieu à la fédération roumaine qui avait annoncé il y a deux semaines qu'elle le retirait de la liste de ses arbitres internationaux en raison de son âge et de son niveau devenu trop faible. En 2008 après la mort de ses parents, Sebastian Col?escu avait tenté une deuxième fois de mettre fin à ses jours. Depuis mardi, ses proches redoutent qu'il y pense à nouveau.
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