Chaque année, beaucoup de cas d’infanticide sont enregistrés au Sénégal. Des filles donnent naissance et se débarrassent de leurs nouveau-nés. Il y a celles qui jettent les bébés dans des dépotoirs d’ordures et d’autres vont plus loin en tuant leurs enfants. Seneweb s’est penché sur le phénomène.
En 2022, une lycéenne est d’abord tombée enceinte hors mariage. Sa situation avait surpris toute sa famille qui, malgré la déception, l’a soutenue jusqu’à ce qu’elle accouche. Le bébé sera alors remis à une tante de la fille pour permettre à la lycéenne de continuer ses études.
Au cours de l’année scolaire, la jeune fille fera la rencontre d’un de ses camarades de classe avec qui elle va avoir une relation. De cette idylle, la jeune fille tombe à nouveau enceinte. Alors que son partenaire décide d’assumer ses responsabilités, la jeune fille refuse d’être pointée du doigt une nouvelle fois. Elle décide alors de cacher sa grossesse. Neuf mois après, elle donne naissance à une fille dans la salle de bain de sa mère. L’adolescente nettoie les lieux et sort de la maison avec son bébé qu’elle couvre et dépose dans une maison d’à côté.
De retour chez elle, elle trouve sa mère dans la salle de bain, le regard horrifié à la vue du sang. La maman confronte sa fille. Prise au dépourvu, elle dit avoir été victime d’une chute.
N’étant pas convaincue, la mère demande à son autre fille de conduire la lycéenne à l’hôpital. Entre-temps, les rumeurs sur la découverte du corps d’un nouveau-né circulent. Les policiers vont sur les lieux et ouvrent une enquête. Ils demandent aux structures sanitaires de les aviser si une patiente a demandé des soins médicaux. Arrivée au district de keur Massar, la jeune fille est démasquée et dénoncée par les médecins. Elle est ensuite cueillie par les forces de l’ordre.
En 2022, l’épouse d’un émigré tombe enceinte de son amant. Craignant les foudres de son mari et de son entourage, elle décide de jeter son bébé après l’accouchement. Quelques heures plus tard, les voisins de la dame constatent que la fosse était bouchée. Ils font alors appel à un plombier qui après ses manœuvres, ouvre la fosse et découvre le corps sans vie d’un nouveau-né. Les habitants de la maison alertent les policiers qui arrivent vite sur les lieux. Un voisin ayant remarqué que la dame de 42 ans cachait sa grossesse, dénonce cette dernière qui est arrêtée. Elle ne niera pas les faits.
Ce genre de faits divers est devenu si familier aux Sénégalais qu’il n’interpelle plus personne. Chaque fois que cela se produit dans un quartier, les gens en font leur chou gras pendant quelques jours avant de passer à autre chose. Les journaux et les émissions radios en parlent le temps d’une journée et tout passe comme si de rien n’était.
L’infanticide est l’un des principaux motifs d’emprisonnement des femmes.
Le 28 novembre 2023, African Population and Health Research Center (APHRC) a révélé dans une étude, que l’infanticide faisait partie des 5 motifs d’emprisonnement des femmes soit 22,13%. «Ceci est souvent dû au manque d’informations sur les méthodes de contraception», explique-t-on dans cette étude. D’après l’APHRC, la vulnérabilité économique, l’exclusion sociale, la peur de la récrimination, sont des facteurs qui expliquent que certaines femmes commettent l’infanticide.
Madame Ndeye Magatte Mbaye qui est membre de l’Association des Femmes Juristes du Sénégal, pense qu’il faut se poser des questions sur les causes sous-jacentes de l’infanticide. «C’est un fléau qui fait beaucoup de ravages dans notre société et les premières victimes sont les femmes et ces enfants qui n’ont rien demandé», explique-t-elle.
Les cas d’inceste ou de viol peuvent aussi expliquer cela.
Selon Mme Maty Diop marraine de quartier dans la banlieue dakaroise, beaucoup de femmes abandonnent leurs enfants parce que la manière dont ils ont été conçus, est traumatisante pour les mamans. «Des filles sont souvent violées par des membres de leur propre famille. Ces cas d’inceste sont déshonorants pour ces jeunes filles dont l’innocence a été volée», regrette la dame qui trouve que ca ne doit pas être une raison pour tuer un être humain car même si le fait de tomber enceinte sans le vouloir est dur, un enfant est toujours une bénédiction. «Ces jeunes mères font cette erreur car elles n’ont souvent pas une personne à qui se confier. Dans notre société, une fille qui tombe enceinte hors mariage est souvent déshéritée alors que c’est dans ces moments qu’elle a le plus besoin de sa famille. C’est pour éviter ces situations qu’elles cachent leur grossesse et arrachent la vie de leurs enfants», fait-elle savoir.
5 Commentaires
Les badiénou Gokh sont aussi des confidentes et des conseillères.
Généralement ce sont celles qui ont peu de moyens qui sont arrêtées, jugées et emprisonnées. Elles subissent une double injustice.
Sogui
En Janvier, 2024 (11:52 AM)Macky
En Janvier, 2024 (12:23 PM)Participer à la Discussion