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L'Inde peine à se débarrasser du sang contaminé

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Seema Mishra et sa fille Aarushi chez elles à New-Delhi en Inde, le 28 juin 2016 - MONEY SHARMA AFP LANCER LE DIAPORAMA

Seema Mishra et sa fille se rendent chaque mois à l'hôpital en Inde, priant pour que la transfusion sanguine requise pour l'enfant ne la rende encore plus malade.

Mais les craintes de Mishra se sont concrétisées le mois dernier quand les médecins ont diagnostiqué chez Aarushi, 7 ans et qui souffre d'une malade sanguine rare, une hépatite C due à la transfusion.

"Elle a déjà tant souffert et maintenant elle doit souffrir encore plus?", demande sa mère en regardant sa fille faire quelques pas de danse.

Selon les experts, le contrôle sanguin est défaillant en Inde et les risques sont accrus par l'existence d'un marché noir, alimenté essentiellement par des Indiens pauvres payés pour donner leur sang, en particulier dans les zones rurales.

Des documents officiels rendus publics en juin montrent que plus de 2.000 personnes ont contracté le virus du sida en raison de transfusions au cours des 17 mois courant jusqu'en mars.

Selon les autorités, certains imputent faussement la maladie à une transfusion, explication socialement plus acceptable que la contamination par relation sexuelle.

Mais J.S Arora, hématologue, souligne que le niveau des contaminations parmi les 150.000 personnes qui souffrent de thalassémie, comme la jeune Aarushi, est inquiétant.

Quelque 40% de ces malades ont contracté une hépatite B ou C, un niveau bien plus élevé que dans d'autres pays, indique ce médecin. Certains ont contracté le virus du sida.

Les personnes souffrant de thalassémie sont incapables de produire suffisamment d'hémoglobine, une maladie génétique que l'on retrouve surtout en Asie et dans les pays bordant l'est de la Méditerranée.

- 'Réformer le système' -

Le niveau de contamination par transfusion sanguine a nettement reculé ces dernières années grâce aux efforts de réglementation mais les experts s'inquiètent de défaillances dans le contrôle et l'approvisionnement sanguin.

L'Inde détient 2.760 banques du sang, gérées par des organismes publics, des cliniques ou des ONG. Elles doivent tester la présence du VIH, des hépatites, de la syphilis et du paludisme mais la fiabilité des tests est variable.

Les méthodes les plus sophistiquées réduisent le délai pendant lequel un donneur infecté n'apparaîtra pas comme positif mais ces tests sont chers et donc pas utilisés partout.

L'Inde doit se doter d'une agence de collecte centralisée, comme dans de nombreux pays, recourant à des test rigoureux et standardisés, disent les experts.

"Le système doit être restructuré car l'offre de services sanguins en Inde est désorganisée", dit à l'AFP Shailaja Tetali, une chercheuse qui a réalisé une étude sur l'approvisionnement sanguin dans le sud de l'Inde.

Dans l'Etat du Gujarat, des familles se mobilisent pour obtenir l'ouverture d'une enquête pour savoir comment 32 enfants souffrant de thalassémie ont été contaminés par le virus du sida lors d'une transfusion en 2011. Huit sont morts depuis, souligne leur avocat, Paresh Vaghela auprès de l'AFP.

La police a clos une première fois l'enquête, estimant qu'il n'y avait pas d'intention criminelle tandis que l'hôpital mis en cause assure que les enfants ont été transfusés dans différents centres.

Le gouvernement reconnaît que la thalassémie expose davantage au risque de contamination. "Il n'existe dans aucun pays de garantie à 100% d'approvisionnement en sang propre", déclare le directeur adjoint des services de transfusion sanguine, R.S Gupta.

- Payer un donneur -

L'Inde souffre d'une pénurie de sang, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS) qui recommande que 1% de la population donne son sang pour garantir des réserves suffisantes.

La crainte de tomber malade après un don et le tabou de la transfusion sanguine entre castes expliquent le manque de donneurs, une pénurie renforcée par des transfusions inutiles dans certains cas.

Conséquence, les patients ayant besoin d'une transfusion doivent souvent venir avec des donneurs à l'hôpital. Selon les experts, certains n'ont d'autres choix que de payer des donneurs pour trouver du sang.

"Si les proches ne veulent pas donner, ne sont pas compatibles ou sont absents, alors comment trouver du sang? Vous payez quelqu'un", explique le patron d'une banque du sang.

Dans son étude, Mme Tetali a eu affaire à ce genre de situations, en particulier un père pauvre qui s'était rendu à l'hôpital pour sa fille souffrant de leucémie. Il a dû emprunter de l'argent pour payer un donneur afin que sa fille soit traitée.

Vinod Bansal, président de la Rotary Blood Bank à Delhi, qui repose uniquement sur des volontaires, estime que les donneurs doivent être testés plus sérieusement.

Mais pour Mishra, qui peine à payer le traitement de sa fille Aarushi, le mal est fait. "Je suis choquée et effrayée".



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