Les récents événements au Sénégal caractérisés par une explosion de colère et d’une violence inouïe interpellent l’ensemble des forces vives de la nation. En effet, en disant à la jeunesse que « je vous ai entendu et je vous ai compris », le gouvernement semble s’orienter vers une mobilisation de ressources financières qui seront injectées dans le secteur de la jeunesse. Je m’interroge sur la solution, car aucun diagnostic n’a été réalisé.
Dans son propos, le chef de l’Etat avait souligné les limites des milliards injectés jusque-là, dans la prise en charge des préoccupations de la jeunesse. Soyons lucide et sortons du colmatage.
Cette crise trouve sa raison fondamentale dans les tréfonds de la gouvernance des affaires publics. Il est évident que les politiques de décentralisation expérimentées ont montré leurs limites, même la reforme en cours n’a pas trouvé de défenseurs.
Dans mon propos, je crois qu’il faut dégraisser totalement le mammouth, que constitue ici, l’Etat central, par la mise en place des provinces.
Une évidence s’impose tout d’abord : toute structure administrative ou politique doit constamment se réformer pour s’adapter aux besoins nouveaux qui se manifestent. Il faut y ajouter que les collectivités territoriales sont devenues de véritables vecteurs du développement économique et social.
L’expérience vécue dans maints pays montre cependant que la réforme territoriale est une entreprise difficile à conduire en raison des multiples intérêts souvent divergents qui sont en jeu. Dans de nombreux cas, il s’avère même impossible de faire la part des nécessités, des traditions et des considérations tactiques ou politiques.
Ensuite, toute réforme des collectivités territoriales décentralisées est nécessairement une réforme de l’Etat. Elle met en cause non seulement le système local, mais également l’administration centrale ainsi que tous les organismes publics et parapublics. Le projet de provincialisation, idée chère à l’ancien Président de la République, n’échappe pas à cet état des choses.
Force est de reconnaître aujourd’hui que les institutions locales et régionales ne fonctionnent pas de manière adéquate. Pour faire face à cette situation déroutante et à la crise de gouvernabilité qui secoue les collectivités locales, il est nécessaire de repenser en profondeur le mode d’organisation et de fonctionnement du pouvoir local. En d’autres termes, il s’agit de promouvoir par la « provincialisation » une nouvelle forme de gouvernance des collectivités et communautés de base.
Le concept de province, comme celui de région, traduit une division administrative du territoire national. Il est utilisé dans de très nombreux pays depuis fort longtemps. Sous l’empire romain, il était déjà d’un usage courant. Le mot « province » vient du latin « provincia », qui signifie « pays des vaincus » ou « provictis », qui veut dire « pour les vaincus ».
La signification du mot « province » a évolué dans le temps et dans l’espace. En France, sous l’Ancien Régime, la « province » correspondait à une division territoriale issue de la féodalité. Le roi y était représenté par différents personnages appelés « baillis » ou « sénéchaux ». Ceux-ci géraient des circonscriptions dont les limites étaient caractérisées par la diversité. Le mot « province » est tombé, par la suite, en désuétude au moment de la Révolution de 1789. Depuis le XIXème siècle, le mot « province » est employé pour dire « hors de la région parisienne ». La « province » regroupe ainsi un ensemble de régions dont la caractéristique dominante est d’être située dans la périphérie du pays.
Au Canada, la signification du mot « province » est tout autre. Dans ce pays, la « province » a une existence légale. Elle correspond à une division géographique du pays : Province du Québec par exemple. En Belgique, la « province » revêt une dimension politique et administrative : Province Flamande du Limbourg par exemple. Au Sénégal, la « province » tire ses origines lointaines des royaumes traditionnels réalisés par la fusion organique d’entités politiques jadis rivales, sous une même bannière administrative.
Le projet de « provincialisation » renoue avec la tradition de large autonomie des entités provinciales traditionnelles. Prenant en compte toutes les activités qui peuvent revêtir des aspects culturels, sociaux, économiques et politiques, il tend à la construction d’ensembles naturels économiquement et financièrement forts. Il est évident qu’un tel projet révèle des enjeux immenses et une portée de grande ampleur dans tous les secteurs de l’activité nationale.
Il s’agit, aujourd’hui, d’aller plus loin en levant toutes les contraintes endogènes et exogènes qui entravent encore le développement des collectivités locales.
Les contraintes endogènes sont nombreuses et diversifiées :
• L’insuffisance des capacités humaines et techniques tant en qualité qu’en quantité au niveau local, aussi bien dans le cadre de la déconcentration des services de l’Etat que dans les collectivités locales elles-mêmes ;
• L’insuffisance des ressources financières : malgré les efforts consentis par l’Etat, les ressources financières pour la mise en œuvre de la décentralisation ne sont pas suffisantes pour faire face aux nombreux besoins des populations et aux défis des temps modernes ;
• Les difficultés d’ordre politique et administratif : on constate, dans plusieurs entités locales, une méconnaissance des textes régissant la décentralisation. La gratuité des mandats entraîne le désintérêt de beaucoup d’élus locaux dans l’exercice de leurs fonctions. Les dysfonctionnements sont constitués par les querelles politiques au sein des conseils, la gestion solitaire par l’exécutif local, les malversations financières enregistrées dans certaines entités locales, la tenue irrégulière des sessions ordinaires des conseils municipaux, le faible niveau d’instruction de certains élus locaux, etc.
Les contraintes exogènes se situent dans le contexte sous-régional et mondial, et dans les interventions des partenaires au développement. En effet, les influences du contexte international ou sous-régional ont pu réorienter les priorités de l’Etat en raison des situations d’urgence auxquelles il a été amené à faire face. Par ailleurs, les difficultés d’harmonisation et de coordination des interventions des partenaires extérieurs qui ont des approches et des zones d’interventions propres à chacun constituent également des contraintes.
En prévoyant d’organiser le territoire national en provinces administrées par des assemblées élues investies d’un pouvoir législatif et financier, on souhaite faire franchir à notre système de décentralisation une ultime étape. Le choix de la « provincialisation » permettra non seulement d’engager le pays dans la voie du développement durable, avec l’implication déterminante des populations, mais ouvrira également des aires de dialogue permanent avec tous les acteurs du développement local et national.
Nous croyons profondément que malgré les peurs et les torpeurs, dans le passé, la solution à nos maux n’est pas dans une distribution de milliards à la jeunesse, mais dans une reforme en profondeur de notre mode de gouvernance et la provincialisation , en est une réponse à plusieurs canons .
Dr Bassirou NIANG,
Président INTELLIGENCE REPUBLICAINE
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