Le gouvernement américain a l'intention de placer les Gardiens de la révolution - l'armée idéologique du régime iranien - sur sa liste des organisations terroristes, a rapporté, mercredi 15 août, la presse américaine.
L'annonce, non officialisée, semble destinée à accroître la pression sur Téhéran et ses partenaires commerciaux. Elle indique aussi que les Etats-Unis perdent patience dans la recherche d'une solution multilatérale avec leurs partenaires européens à l'ONU, où la Russie et la Chine s'opposent à des sanctions sévères contre l'Iran.
L'inscription des Gardiens de la révolution (Pasdarans) sur la liste des organisations terroristes permettrait au Trésor américain de geler tous les fonds contrôlés par les nombreuses compagnies qui leur sont affiliées. La décision dissuaderait surtout les entreprises étrangères de faire commerce avec ces dernières, sous peine de s'exposer elles-mêmes à des sanctions américaines.
Forts d'au moins 125 000 hommes, les Pasdarans ont été créés en 1979 par l'imam Khomeiny, pour protéger la nouvelle République islamique avec leur marine, leur aviation, leurs forces spéciales, leurs prisons et leurs services de renseignement. Le président Mahmoud Ahmadinejad est passé par leurs rangs et "il existe des preuves très fiables que son élection a été directement due aux Gardiens de la révolution", explique Abbas Milani, directeur des études iraniennes à l'université de Stanford.
Véritable "Etat dans l'Etat", ils ont constitué ces dernières années "un réseau incroyablement puissant d'entreprises qui opèrent dans presque toutes les sphères et sont présentes sur tous les gros contrats, comme le métro de Téhéran ou la sécurité de l'aéroport et des marchés de plusieurs milliards de dollars dans le pétrole et le gaz", explique M. Milani. L'inscription sur la liste terroriste mettrait, selon le professeur, "l'Amérique sur une route de collision, juridique au moins, avec beaucoup d'entreprises européennes et étrangères qui font du commerce avec ces organisations".
AVOIRS GELÉS
Le gouvernement américain accuse les Gardiens de la révolution de fournir des armes aux insurgés chiites en Irak, aux talibans en Afghanistan, et de soutenir le Hezbollah au Liban, ainsi que le Hamas et le Djihad islamique palestiniens - ces trois derniers figurant déjà sur la liste des organisations terroristes. Le gouvernement iranien est considéré comme un sponsor du terrorisme par Washington depuis 1984, mais jamais auparavant les forces armées d'un pays n'avaient été placées sur la liste.
Selon le New York Times, la secrétaire d'Etat, Condoleezza Rice, est à l'origine de la décision, qui n'a été annoncée que par des sources anonymes, et dont la date de mise en oeuvre et la portée exacte n'ont pas été arrêtées. Mme Rice entendrait, par cette mesure, couper l'herbe sous le pied des partisans, dans l'entourage du vice-président Dick Cheney, d'une solution militaire. "Une action militaire n'est pas envisagée", a affirmé, mercredi, Dana Perino, une porte-parole de la Maison Blanche, en rappelant cependant qu'"aucun président ne doit jamais retirer cette option de la table".
L'annonce officieuse "est peut-être un ballon d'essai pour observer les réactions des Européens et des Russes ou pour faire pression pour qu'ils acceptent une résolution musclée" au Conseil de sécurité, estime Abbas Milani. La résolution 1747 du 24 mars donnait à l'Iran 60 jours pour mettre fin à l'enrichissement d'uranium, sous peine de nouvelles sanctions. La menace n'a pas encore été mise à exécution, en raison de l'opposition de Moscou et Pékin, qui craignent que de nouvelles mesures commerciales affectent leurs intérêts dans le pays.
Neuf hauts responsables des Gardiens de la révolution, et notamment le commandant en chef Yahya Rahim Safavi, ont déjà fait l'objet de sanctions du Conseil de sécurité, qui les accuse d'être impliqués dans les activités nucléaires suspectes de Téhéran. Les avoirs de trois de leurs entreprises, les Industries aéronautiques Qods, la Pars Aviation Services et la Sho'a Aviation ont aussi été gelés.
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