A l’instar des musulmans du monde, la sortie du pape Benoît XVI, mardi dernier, contre Mohamed, le Prophète de l’Islam, a suscité l’indignation de la plupart des islamologues sénégalais qui sont dans tous leurs états. Source : Le Populaire
Selon le chercheur et islamologue Khadim Mbacké, “le pape a partiellement raison et partiellement tort. Il a raison en disant qu’il y a toujours eu des difficultés entre la foi et la raison. Des penseurs musulmans du XIe siècle l’ont démontré. Il a tort parce que tout ce qu’il dit n’est pas l’apanage de l’Islam. Le fait de spécifier l’Islam est une erreur”. Et M. Mbacké de s’outrer qu’“un bon chrétien comme lui (ndlr : le pape) est mal placé pour donner des leçons aux musulmans concernant la violence, car ce n’est pas la civilisation islamique qui a inventé la bombe atomique, la première personne qui l’a faite est un Américain. Et la plupart des guerres sont déclenchées par des gens de confession chrétienne”. Même son de cloche chez l’imam Mactar Kanté qui dit être déçu de cette déclaration du pape Benoît XVI. “L’attitude du pape est irresponsable. Une autorité de cette envergure doit être pondérée dans ses déclarations, en ayant le sens du respect à l’endroit de toutes les confessions. Ce qui se passe en Irak, au Liban, entre autres foyers de tensions, devrait pousser le pape à tenir des propos qui invitent à la paix plutôt que de raviver la tension”, tonne-t-il. “Dans ses propos, on sent que le pape ignore l’histoire de l’Islam. Il y a une erreur de jugement qui est inacceptable. Les musulmans n’ont pas de leçon à recevoir des chrétiens. Les gens n’ont pas le droit d’assimiler les musulmans à des groupes qui mènent des actions qui leur sont particulières”, ajoute l’imam Kanté, très amer sur le coup. “Les musulmans du Sénégal sont surpris de cette déclaration. Nous sommes devant quelqu’un qui a commis une erreur. On ne comprend pas la déclaration du pape Benoît XVI, qui est une négation des déclarations du pape Jean-Paul II sur le rapprochement des religions”, martèle pour sa part l’islamologue Abdoul Aziz Kébé. “Autant il y a des intégristes de la confrontation et de l’incompréhension, autant il doit y avoir des intégristes de la paix. Nous disons que ce sont des propos contraires à l’histoire”, ajoute M. Kébé, qui dit espérer que le pape s’est trompé et qu’il va présenter ses excuses. Appelant les musulmans à exprimer leur indignation, il dit cependant souhaiter que “les propos du pape ne viennent surtout pas perturber le climat de paix existant entre les deux communautés”. Quant à l’imam Mbaye Niang, leader du Mrds, il préfère jouer la carte de l’apaisement. S’exprimant sur les ondes de Wal Fadjri, il estime que les déclarations du pape Benoît XVI ne doivent pas remettre en cause les bonnes relations qu’entretiennent les chrétiens et les musulmans. Il est rejoint par le patron de l’Ong Jamra, Abdou Latif Guèye qui considère que “quelle que soit la gravité de ce qui s’est passé, il ne doit y avoir aucune conséquence fâcheuse sur la situation exceptionnelle que nous avons au Sénégal”. Et d’inviter les musulmans à avoir “une réaction lucide et sereine” et de ne pas “jeter de l’huile sur le feu”, arguant que “l’Islam est une religion de paix”. “Tout cela démontre que le message de l’Islam est fondamentalement méconnu. Nous devons faire en sorte de mieux faire connaître l’Islam”, renchérit-il. Ailleurs dans le monde, les réactions se poursuivent. En Iran, un influent dignitaire chiite, Ahmad Khatami, a déclaré aux fidèles à l’université de Téhéran que les propos de Benoît XVI étaient “absurdes” et montraient que le Pape ne connaissait pas grand-chose à la religion. Au Pakistan, le parlement a adopté hier une résolution demandant à Benoit XVI de “retirer ses propos” alors que le ministère des Affaires étrangères a dénoncé “l’ignorance” du souverain pontife sur la religion musulmane. En Inde, la commission nationale pour les minorités présidée par Hamid Ansari, a jugé que les propos du Pape sonnaient comme un appel aux “Croisades du Moyen Âge”. En Indonésie également, les réactions ne se sont pas fait attendre. Fauzan Al Anshori, porte-parole du Conseil indonésien des Mujahideen, organisation radicale, a appelé le Pape au dialogue et déclaré qu’il avait mal compris l’islam. Selon Anshori, le récent regain de radicalisme musulman est une réplique à la “Croisade” menée par l’Amérique contre les musulmans.
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