Plutôt corpulent, une épaisse barbe virant sur le blanc, le crâne dégarni, tel apparaît Hansjürg sur les photos parues dans la presse helvétique. Un épais bandeau noir camoufle ses yeux. Ce travailleur social de 54 ans, originaire du canton de Berne, en Suisse alémanique, étant toujours présumé innocent, son nom n'a pas été communiqué, comme le veut la législation suisse. L'homme, qui se dit lui-même pédophile, a reconnu avoir abusé sexuellement de 122 handicapés et enfants placés dans des foyers entre 1982 et 2010. Il a été arrêté en avril 2010, mais l'affaire n'a été révélée que la semaine dernière. Hansjürg S. confesse s'en être pris principalement à de jeunes hommes, handicapés physiques et atteints de déficiences mentales, incapables de se mouvoir et de parler. Toutefois, le prédateur a aussi abusé de femmes et d'enfants, dont le plus jeune avait un an...
L'horreur provoquée par ces révélations a vite laissé la place à l'incompréhension. Comment un travailleur social a-t-il pu se livrer à autant d'abus, pendant autant d'années, dans pas moins de neuf établissements, sans que personne s'en aperçoive ? Car l'enquête révèle que certaines victimes étaient abusées à plusieurs reprises dans une même journée. Et que dans dix-huit cas, Hansjürg réalisait des photos et des vidéos. Apparemment, le foyer Saint-Martin d'Oberthal, dans le canton de Berne, ne s'est aperçu de rien. Il décrit ce prédateur sexuel comme un homme qui "irradiait de gentillesse et de bonté", dans un certificat de travail délivré à cet "aimable gaillard" qui changeait fréquemment d'établissement.
Déjà dénoncé en 2003
Hansjürg a travaillé dans trois cantons de Suisse alémanique et dans le sud de l'Allemagne. Sans qualification professionnelle particulière, il occupait parfois un poste de gardien de nuit, à moins qu'il ne soit chargé de conduire les handicapés aux toilettes, de les laver ou de les accompagner à la piscine. C'est à ces moments-là qu'il accomplissait ses forfaits (rapports sexuels, attouchements). Quoique dénoncé en 2003 par une jeune fille handicapée de 13 ans, Hansjürg n'est finalement pas inquiété. En revanche, l'un de ses collègues, reconnu coupable d'abus sexuels, est lourdement condamné...
Catherine Agthe Diserens, sexo-pédagogue, interrogée par le quotidien Le Temps, tente d'expliquer cette impunité par le fait que la société ne voit pas les handicapés comme des êtres sexués. De leur côté, les personnes vivant avec un handicap mental ne reçoivent pas "d'éducation sexuelle adaptée à leur niveau de compréhension (...). Elles n'ont pas de moyens de comparaison et ne sont pas en mesure de reconnaître si les gestes prodigués à leur égard sont corrects ou non". Une étude réalisée en Autriche, il y a une quinzaine d'années, révélait que 64 % des femmes et 50 % des hommes handicapés avaient été victimes de violences sexuelles.
2 Commentaires
A
En Février, 2011 (00:17 AM)Aatekat
En Février, 2011 (09:06 AM)Participer à la Discussion