Manuel Valls multiplie les consultations afin de désamorcer la fronde des députés socialistes et de trouver la majorité la plus large possible pour soutenir mardi le programme de réformes de son gouvernement lors du vote de confiance.Si le résultat ne fait guère de doute dans l'immédiat, l'alternative logique étant une dissolution de l'Assemblée nationale qui ferait revenir la droite au pouvoir, le nouveau Premier ministre risque de devoir à l'avenir répéter l'opération très souvent pour amadouer une majorité divisée.
Pour le "grand oral" de 45 minutes de mardi, il devrait, selon le souhait de François Hollande "faire du Valls", c'est-à-dire placer son action sous le signe de l'efficacité, tout en évitant de se mettre sous la tutelle du Parlement.Le Premier ministre a reçu dimanche des représentants des 86 parlementaires - proches de l'ancienne première secrétaire Martine Aubry et tenants de la gauche du PS - qui ont menacé de refuser la confiance en l'absence d'un "contrat de majorité" synonyme d'inflexion de sa politique.
Après un déjeuner avec François Hollande, Manuel Valls a pourvuivi lundison tour d'horizon en recevant successivement à Matignon radicaux de gauche, écologistes et communistes.Avec 291 députés sur un total de 577, le groupe socialiste possède à lui seul la majorité absolue au Palais-Bourbon et le risque d'un refus d'accorder la confiance est ténu."Il y aura quatre cinq abstentions", a dit à Reuters Thierry Mandon, porte-parole du groupe PS à l'Assemblée. "C'est du cirque, ce sont les aubrystes qui ne sont pas contents, pas contents de ne pas être au gouvernement, et un petit fonds global du groupe qui souhaite une inflexion sociale."
"LE PREMIER MINISTRE DOIT RASSURER"
Vu l'effondrement de l'électorat de gauche constaté aux élections municipales, la majorité des députés socialistes a conscience que peu d'entre eux seraient réélus en cas de dissolution de l'Assemblée nationale."Aucun des députés de la majorité n'a envie d'ajouter de la crise à la crise", estime dans un entretien au Monde de mardi le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone."Le Premier ministre doit être capable de les rassurer car, au-delà des députés, c'est le pays qui le sera", ajoute-t-il.Manuel Valls devrait aussi bénéficier mardi du soutien des 17 députés radicaux de gauche et d'une partie des 17 élus écologistes dont certains ont désapprouvé le refus de l'ancienne ministre Cécile Duflot de participer au gouvernement.
La décision de nommer mercredi seulement la dizaine de secrétaires d'Etat venant épauler les 16 ministres désignés la semaine dernière permet de s'assurer du vote de ceux qui, parmi les députés, espèrent faire partie des heureux élus."Cela va en calmer plusieurs qui espèrent bien devenir secrétaire d'Etat et qui vont donc rentrer dans le rang afin de ne pas gâcher leur chance", souligne un élu.Parmi les députés susceptibles d'entrer au gouvernement figurent Jérôme Guedj, Kader Arif, Thierry Mandon, Thomas Thévenoud ou Jean-Jacques Urvoas, un proche de Manuel Valls.Ce dernier s'exprimera mardi matin devant le groupe socialiste pour convaincre les derniers irréductibles.
CASUS BELLI
Mais la fronde d'une partie du PS lui permet de marquer son territoire dans l'espoir d'infléchir une politique jugée trop "droitière" et de se mettre au centre du jeu politique.Les "rebelles" souhaitent mettre le gouvernement Valls sous surveillance pour que chaque texte de loi et chaque réforme fassent l'objet de concertations en amont avec les élus.Pour Marie-Noëlle Lienemann, une sénatrice socialiste qui a signé le pacte des 86 récalcitrants, il est hors de question de laisser les mains libres à Manuel Valls."On demandera des gages à chaque vote", rappelle-t-elle, un parlementaire socialiste estimant que Manuel Valls doit prendre garde à ne pas rentrer dans un conflit larvé avec l'Assemblée.
"Sinon chaque texte sera l'objet d'une polémique", dit-il.Ces députés acceptent mal que le Premier ministre et François Hollande aient décidé que la confiance votée mardi vaudrait approbation du pacte de responsabilité et de ses 30 milliards de baisse de charges pour les entreprises, comme des économies de 50 milliards d'euros.L'exécutif considère que le discours de politique générale intégrera les principaux éléments de ces deux dossiers et qu'il ne sera pas nécessaire de procéder à un vote séparé.Cette décision constitue un casus belli pour des élus PS comme Henri Emmanuelli, qui conditionne son vote à une promesse de consultation future des parlementaires sur le "pacte"."En l'absence de cet engagement précis, ce sera l'abstention", prévient-il dans un texte fourni à la presse.
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