Emmanuel Macron a choisi vendredi de remplacer Edouard Philippe à Matignon par Jean Castex, 55 ans, son actuel "M. déconfinement", inconnu du grand public, signe que le chef de l'Etat reprend les rênes pour faire appliquer le "nouveau chemin" annoncé pour la fin du quinquennat.
Ex-collaborateur de Nicolas Sarkozy et de Xavier Bertrand, maire LR de Prades (Pyrénées-Orientales), Jean Castex représente "un choix macronien, conforme à l'esprit de dépassement porté par le président depuis trois ans", selon l'Elysée pour qui "il vient de la droite mais est un gaulliste social".
Jean Castex, qui devrait former son gouvernement rapidement, entrera dès vendredi après-midi à Matignon, où les préparatifs de la passation de pouvoir étaient en cours à la mi-journée. Il sera l'invité du 20h de TF1, au terme d'une journée où le président de la République a accéléré le remaniement attendu depuis des semaines.
Nouveau chemin
"Le cap sur lequel je me suis engagé en 2017 reste vrai", avait-il réaffirmé jeudi dans une interview à la presse régionale. Mais alors que se profile une rentrée "très dure" sur les fronts économique et social, le prochain gouvernement sera chargé d'appliquer le "nouveau chemin" qu'Emmanuel Macron a commencé à dessiner, avec une priorité sur la politique de santé, le grand âge et un plan pour la jeunesse. Un changement qui s'annonce dans la continuité avec notamment la remise en chantier de la réforme des retraites.
Pour incarner ce "chemin" modifié, plutôt qu'une figure de l'écologie ou un poids lourd politique, le chef de l'Etat a préféré un profil "techno", élu local et haut fonctionnaire. Un choix qui lui donne les mains libres, après trois ans d'entente cordiale avec Edouard Philippe, qui prenait un poids croissant dans la stratégie gouvernementale et dans l'opinion. Avec des dissensions de plus en plus marquées, notamment pour la réforme des retraites.
D'autant plus que le directeur de cabinet de Jean Castex sera Nicolas Revel, un proche d'Emmanuel Macron qui avait tenté, en vain, de l'imposer à Edouard Philippe à son arrivée à Matignon.
Les secrétaires généraux adjoints au pouvoir
À noter que le premier cercle du pouvoir comprendra trois anciens secrétaires généraux adjoints de l'Elysée -- Emmanuel Macron et Nicolas Revel sous François Hollande et Jean Castex sous Nicolas Sarkozy -- et comme auparavant quatre énarques en incluant Alexis Kohler, bras droit d'Emmanuel Macron en tant que secrétaire général de l'Elysée.
Pour le président des Républicains Christian Jacob, Jean Castex représente un choix "technocratique" mais "à partir du moment où il s'inscrit dans la politique menée par Emmanuel Macron, bien évidemment il n'est plus aux Républicains". "En matière de trahisons, on a donné déjà" a-t-il lancé, allusion à Edouard Philippe, également issu de LR.
"Je connais et j'apprécie les qualités de serviteur de l'Etat de Jean Castex. Elles seront indispensables dans les moments difficiles que nous allons connaitre... Puissent-elles corriger les mauvais choix du Président de la République", a commenté le président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand, tandis que les proches d'Edouard Philippe saluaient son action au gouvernement.
À gauche, on estimait que cette nomination démontrait une poursuite d'une politique "de droite". "Avec la nomination de Jean Castex, le président de la République confirme sans surprise son cap. Le jour d'après sera de droite comme le jour d'avant", a commenté Olivier Faure (PS).
Nouvelle étape
La composition du nouveau gouvernement devrait être connue avant mercredi, date prévue du prochain conseil des ministres.
Au cours d'un entretien jeudi, "le président de la République et le Premier ministre ont établi un constat partagé quant à la nécessité d'un nouveau gouvernement pour incarner une nouvelle étape du quinquennat, un nouveau chemin", avait expliqué l'Elysée lors de l'annonce de la démission d'Edouard Philippe.
"Au cours de cet entretien chaleureux et amical, le président a remercié le Premier ministre pour le travail accompli, en particulier les importantes réformes conduites pour la modernisation du pays et la préservation de notre modèle social".
Le nouveau gouvernement devra "mettre en oeuvre la nouvelle étape du quinquennat, le projet de reconstruction sociale, économique, environnementale et locale dont le président a exposé les grandes orientations lors de son allocution du 14 juin et qui s'est précisée au cours du cycle de consultations approfondies conduit au cours des dernières semaines", a souligné l'Elysée.
Se réinventer sans renier les réformes
À l'annonce de la démission du gouvernement, toute activité ministérielle a aussitôt été interrompue. Le Conseil des ministres, prévu vendredi matin, n'a pas eu lieu. À l'Assemblée, où était examiné le troisième projet de budget rectifié, la séance a été suspendue.
Dans son entretien à la presse quotidienne régionale jeudi soir, Emmanuel Macron a vanté la "relation de confiance unique" qu'il entretenait avec son Premier ministre, en place depuis le début du quinquennat.
Sur le plan politique, Emmanuel Macron avait réaffirmé en avril, au plus fort de l'épidémie du Covid-19, vouloir "se réinventer" mais sans "renier" les reformes du début du quinquennat.
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