En Libye, le maréchal Haftar a lancé une démonstration de force en menant une offensive surprise sur la capitale. Une opération baptisée « Libérer Tripoli ». Mais ces dernières heures, les combattants de l'homme fort de l'Est ont été repoussés à une trentaine de kilomètres de la capitale. La communauté internationale craint une « escalade ». Le Secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres est à Benghazi pour rencontrer Kahlifa Haftar alors que le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir en urgence dans la soirée.
Jeudi, l'Armée nationale libyenne (ANL) avait, dans un premier temps, pris possession d’un point de contrôle aux portes de la capitale, Tripoli. Mais ce vendredi à l'aube, le rapport de force a basculé. Selon des sources sécuritaires, la milice locale de Zawiya, une ville voisine, a repris le contrôle de ce barrage à 27 kilomètres de Tripoli.
Des images, des photos et des vidéos de dizaines de prisonniers capturés et de leurs véhicules saisis circulent sur la toile. On y voit ces captifs en uniformes militaires assis à même le sol dans un lieu inconnu, mais il est impossible d'authentifier ces clichés et l'ANL garde le silence pour le moment.
La force de protection de Tripoli, une coalition de milices de la capitale, indique avoir participé à cette contre-offensive pour stopper l'ANL. La presse libyenne fait par ailleurs état de combats au sud-ouest de Tripoli, dans la ville d’Azizia et de Souk el-Khamis alors que les deux camps renforcent le déploiement de leurs troupes.
Et puis, on a appris dans l’après-midi que la milice de la ville de Tarhouna, connue sous le nom de « la 7e brigade », a rejoint les troupes du maréchal Haftar. L'information a été confirmée par un de ses cadres. Cette milice était fidèle depuis 2016 au gouvernement de Fayez al-Sarraj, gouvernement qui est reconnu par la communauté internationale. C'est donc un soutien important pour le maréchal Haftar dans sa conquête de Tripoli.
L’influence d’un pays arabe
Par ailleurs, des médias libyens ont diffusé, documents à l'appui, des informations sur plusieurs chefs de milices et même des membres du gouvernement qui ont fui vers la Tunisie ou la Turquie, à l'approche des forces venues de l'est. Du côté du gouvernement internationalement reconnu, Fathi Bach Agha, le ministre de l'Intérieur, multiplie les déclarations depuis ce jeudi. Il accuse, sans le nommer, un pays arabe d'avoir donné le feu vert à cette offensive de l'ANL. Il y a moins d'une semaine, Khalifa Haftar avait été en Arabie saoudite. Il avait rencontré le roi Salman et le prince héritier.
Ces affrontements suscitent l’inquiétude de la communauté internationale. Jeudi, dès l'appel du maréchal Haftar de marcher sur Tripoli, Paris, Washington, Londres, Rome et Abou Dhabi ont appelé toutes les parties à faire baisser immédiatement la tension. Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a, lui, demandé l'arrêt de tous les mouvements militaires. « La solution doit être politique », a-t-il dit. Le Conseil de sécurité doit se réunir en urgence dans la soirée à la demande du Royaume-Uni pour évoquer cette situation.
? Quelle est la stratégie du maréchal Haftar ?
L’ambiguïté domine la situation. Khalifa Haftar a annoncé sa volonté de marcher sur Tripoli, mais l'on ne sait pas si l'offensive vise à encercler la ville ou à entrer vraiment dans la capitale, ce qui impliquerait très certainement un bain de sang. Selon l'accord politique interlibyen de 2015, les milices devaient être intégrées dans la police et l'armée, mais cela ne s'est pas fait et ces groupes, porteurs d'un projet politique islamiste pour le pays, sont devenus non pas les rivaux du chef de l'Armée nationale libyenne mais de toute une partie des citoyens.
De plus, cette offensive intervient quelques jours avant la conférence nationale pour la réconciliation qui doit se tenir en Libye le 14 avril. Khalifa Haftar cherche-t-il à démontrer à la communauté internationale qu'il est le seul maître de la Libye ? Il a récemment étendu sa domination sur le Sud du pays en plus de l'Est. Une grande partie des Libyens est convaincue que les deux camps ne veulent ni élections ni réconciliation, mais se livrent à une lutte acharnée pour conquérir le pouvoir par la force.
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