Des discours oecuménique et des postures compassionnelles ont éloigné le sommet sur la sécurité alimentaire des considérations techniques. Ce fut un échec caché par une belle carte postale.
Des dirigeants du Sud drapés dans leurs boubous bariolés et des seconds couteaux du Nord dans leurs costumes impeccables. C’était à Rome, du 16 au 18 novembre. Au final, c’est la fuite en avant. L’éradication de la faim est repoussée à 2050. D’ici là, 9 milliards d’individus peupleront notre planète. La production agricole devrait augmenter de 70% pour nourrir tout le monde. Ces horizons mathématiques posés, devrait-on s’étonner du maigre résultat engrangé à Rome ?
Avant même le démarrage du sommet, le débat s’était déplacé vers le show biz. L’image du sénégalais Jacques Diouf, directeur général de la FAO, en grève de la faim, est à ranger dans le même registre que celle d’un certain Bernard Kouchner, sac de riz vissé sur l’épaule, au secours des populations de Mogadiscio. C’est une opération de communication politique aux retombées douteuses.
Même soutenu par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, Jacques Diouf et sa posture toute hollywoodienne, avait déjà perdu le combat de l’essentiel. Le sommet n’a débouché sur aucune résolution majeure.
De la date butoir du 2025 devant marquer l’éradication de la faim à l’objectif de réduire de moitié le nombre de personnes souffrant de la faim d’ici 2015, tout a été sacrifié pour arriver à une résolution. Les promesses solennelles prises à l’Aquila, et qui devaient déboucher sur la mobilisation de 20 milliards de dollars sur trois ans, ont été laissées au vestiaire. C’est entendu, aucune des grandes puissances ne souhaite désormais prendre le lead sur le dossier.
L’absence des dirigeants du G8 est éloquente. Seul à s’y être rendu, Silvio Berlusconi, donnait l’impression d’être plutôt en villégiature, pour échapper à la réouverture de son feuilleton judiciaire. Que pouvait faire dès lors la soixantaine de chefs d’Etats d’Afrique et d’Asie ainsi que d’Amérique Latine venus répondre à l’invitation d’un Jacques Diouf, plus émotif que rationnel ?
In fine, ce sommet a révélé une nouvelle fois la fracture entre le Nord et le Sud. Les pays du Nord (Europe, USA, Canada, Nouvelle Zélande) préfèrent, disent-ils, adopter des mesures urgentes pour lutter contre la faim qu’en fixer des deadlines. C’est dire si la stratégie compassionnelle adoptée par Jacques Diouf est insuffisante pour porter les investissements nécessaires à l’agriculture de 8 milliards actuellement à 44 milliards. L’implication de Benoît XVI qui dénonce la « spéculation sur le marché des céréales » aura, tout au plus, permis de constater que le milliard de personnes en proie à la faim risque de vivre de mots d’amour fraternel et d’eau fraîche pour longtemps.
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