Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères français, socialiste reconverti à la nouvelle religion de la droite populiste, se distingue et montre qu’il a bel et bien trahi l’idéal humaniste auquel il croyait. Alors que la communauté internationale tente de trouver des solutions diplomatiques à ce qui est appelé la crise du nucléaire iranien, voilà l’ex-french doctor qui promet l’apocalypse : « Il faut se préparer au pire. Au pire c’est-à-dire la guerre. » La guerre contre l’Iran pour l’empêcher de poursuivre son programme atomique.
De deux choses l’une : ou Bernard Kouchner est devenu fou ou il dévoile enfin le nouveau style de la politique extérieure de la France marquée par une agressivité inspirée du modèle américain. Nicolas Sarkozy, arrivé au pouvoir il y a peine 120 jours, a clairement suggéré que le bombardement de l’Iran était possible lorsqu’il avait rencontré les ambassadeurs français. M. Kouchner n’a fait qu’amplifier ce discours belliqueux et inquiétant. Discours qui met mal à l’aise les amis de la France dans le monde arabe et islamique. Paris, qui a eu une attitude respectable en refusant de cautionner l’invasion de l’Irak par les troupes américano-britanniques, cherche à s’imposer comme acteur sur la scène mondiale. Mais cela justifie-t-il cet empressement à vouloir brûler les étapes et à remettre en cause des acquis gagnés difficilement au fil des ans ? La France est aujourd’hui le seul pays occidental à parler de « la guerre » contre l’Iran. La société française a-t-elle été consultée sur ce dangereux changement de cap ? Paris voudrait même contourner l’ONU et imposer des sanctions économiques à l’Iran par le biais de l’Union européenne.
Paradoxalement, Robert Gates, secrétaire américain à la Défense, a plaidé, lui, pour les options diplomatiques dans le traitement de ce dossier. Alors pourquoi Paris veut bomber le torse au point de paraître ridicule ? M. Kouchner n’a eu aucune honte à demander la démission du Premier ministre irakien, Nouri Al Maliki — au nom de quelle autorité ? — avant de se raviser et de demander des excuses. Il n’a fait que mimer l’attitude de George W. Bush qui a fait la même proposition. M. Kouchner était favorable à la guerre contre l’Irak. Avocat du fameux « droit d’ingérence humanitaire » (inventé à l’origine par le philosophe pro-américain, Jean-François Revel), il n’a pas levé le petit doigt pour dénoncer le drame humain dans ce pays comme celui des réfugiés palestiniens alors qu’il est … le fondateur de Médecins du monde. Il est tragique de constater que M. Kouchner échange avec facilité le sac de riz contre le missile intercontinental. L’homme, qui pense —sérieusement — que les bombes avaient « délivré » les populations au Kosovo (M. Kouchner fut administrateur au nom de l’ONU dans cette province et a raté sa mission), semble oublier que la France possède le plus grand nombre de centrales nucléaires au monde. L’Algérie et la Polynésie ont toujours souvenir des fameux essais atomiques français. Le débat sera un jour ouvert sur les ravages causés par ces tests.
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