Dans un message au peuple diffusé par le quotidien Granma, Castro, qui est âgé de 81 ans et se remet d'une lourde intervention chirurgicale, explique que sa condition physique ne lui permettrait pas d'être reconduit à la présidence du Conseil d'Etat.
"A mes chers compatriotes, qui m'ont fait l'immense honneur ces derniers jours de m'élire au parlement, je vous informe que je n'aspirerai ni n'accepterai, je répète, que je n'aspirerai ni n'accepterai la charge de président du Conseil d'Etat et de commandant en chef", écrit-il dans ce message publié sur le site internet du quotidien communiste.
L'annonce du "Comandante en Jefe", titre spécialement créé pour lui en 1958 quand il conduisait la révolution contre le dictateur Fulgencio Batista, met fin à l'incertitude politique qui règne à Cuba depuis que Castro a provisoirement délégué ses pouvoirs à son frère Raul, de cinq ans son cadet, le 31 juillet 2006 à la suite d'une intervention chirurgicale. Le nom de son successeur à la présidence, Raul Castro sans guère de doute, sera dévoilé le 24 février lors d'une session de l'Assemblée nationale. "Ce serait trahir ma conscience que d'occuper une responsabilité qui requiert une mobilité et un dévouement que ma condition physique ne me permet pas. Je veux expliquer cela sans dramatiser", poursuit Fidel Castro, qui n'a plus été vu en public depuis bientôt 19 mois.
De Kigali, où il poursuit une tournée africaine, le président des Etats-Unis, George Bush, a dit espérer que le départ de Castro ouvrirait "une période de transition démocratique" à Cuba et promis l'aide de Washington au peuple cubain. L'Union européenne s'est de son côté déclaré prête à chercher une relance des liens diplomatiques avec La Havane, gelés depuis l'arrestation en 2003 de 75 opposants cubains.
"LE PEUPLE S'EST HABITUÉ À SON ABSENCE"
L'annonce met fin à une carrière politique qui a épousé l'ensemble de la Guerre froide. En un demi-siècle, Castro aura surmonté l'hostilité des Etats-Unis, échappé à des tentatives d'assassinat planifiées par la CIA et survécu à l'éclatement de l'Union soviétique aux conséquences dramatiques pour l'économie cubaine.
Leader charismatique, orateur hors pair, Fidel Castro est admiré dans le Tiers Monde pour avoir tenu tête à Washington mais largement considéré comme un tyran qui a supprimé les libertés publiques et individuelles dans l'île.
Sa maladie puis son retrait de la vie publique ont suscité des interrogations sur l'avenir du seul Etat communiste encore établi en Amérique alors que la figure du chef de la révolution cubaine était réduite à des apparitions sur des photos ou des vidéos ou des tribunes publiées par la presse officielle.
Dans les rues encore vides de La Havane - l'annonce est intervenue en pleine nuit -, les rares Cubains rencontrés n'ont pas marqué de surprise. "Tout le monde savait depuis un certain temps qu'il ne reviendrait pas. Le peuple s'est habitué à son absence", confie Roberto, refusant de donner son identité précise.
"Je ne sais que dire. Je veux juste m'en aller. Ce système ne peut pas continuer", réagit un peu plus loin Alexis, un éboueur."C'est logique que Fidel s'en aille parce qu'il disait qu'il n'allait pas bien. Mais rien ne changera ici tant que le gouvernement n'entreprendra pas les réformes économiques dont Cuba a besoin", dit un musicien quittant un cabaret. Place de la Révolution, où Castro avait l'habitude de discourir pendant des heures, seul un garde se tient de faction devant le siège du gouvernement.
"CE NE SONT PAS MES ADIEUX"
"Heureusement, notre révolution peut toujours compter sur des cadres de la vieille garde et d'autres qui étaient très jeunes au tout début du processus", poursuit Castro. "Ils ont l'autorité et l'expérience qui garantiront ce remplacement", ajoute-t-il.Castro pourrait cependant conserver une influence politique en tant que premier secrétaire du Parti communiste, sans compter son statut et son aura dans un pays où 70% de la population est née après la révolution et n'a connu pour seul dirigeant que le "Lider Maximo".
"Ce ne sont pas mes adieux. Mon seul souhait est de lutter comme un soldat sur le front des idées. Je continuerai d'écrire mes 'Réflexions du camarade Fidel'. Ce sera une autre arme sur laquelle vous pouvez compter. Peut-être ma voix sera-t-elle entendue", dit-il encore.A Miami, bastion des anticastristes en exil, Ninoska Perez, du Conseil cubain de la liberté, a estimé que son départ ne changerait rien à Cuba et qu'il ne fallait pas s'attendre à des effusions de joie et des scènes de liesse dans les rues de Little Havana."La fête véritable, ce sera lorsqu'il ne pourra même plus écrire", a-t-elle dit.
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