Les nouvelles mesures annoncées mercredi par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve pour apaiser la fronde policière n'ont qu'en partie convaincu la base qui manifeste depuis dix jours un peu partout en France en marge des syndicats. Si ces derniers se sont montrés satisfaits, la mobilisation s'est poursuivie dans la rue dans la nuit de mercredi à jeudi, au Mans, à Lyon, où plus de mille personnes ont défilé, à Marseille, ou à Bayonne, selon les organisateurs. D'autres manifestations sont annoncées jeudi soir à Grenoble, Chambéry et Angers pour protester contre les violences dont les policiers sont victimes et le manque de moyens dont ils disposent.
Une autre est prévue samedi à Toulouse. Depuis le 17 octobre, le mouvement animé par des collectifs hostiles aux organisations syndicales s'est manifesté essentiellement lors de rassemblements nocturnes auxquels se joignent de plus en plus de pompiers et policiers municipaux. Les syndicats, qui ont été reçus mercredi par François Hollande, ont tenté de reprendre la main en organisant des rassemblements ou marches de la colère mardi et mercredi, mais les cortèges étaient moins fournis qu'à l'ordinaire.
Presque un an jour pour jour après avoir répondu à une précédente grogne policière par un protocole de plusieurs centaines de millions d'euros, le gouvernement a annoncé un plan de sécurité publique de 250 millions d'euros. Outre les mesures visant à rénover les équipements et les commissariats, il prévoit la suppression de tâches dites indues, un durcissement des sanctions pour outrage aux forces de l'ordre, une meilleure protection de leur anonymat, et une évolution des conditions de la légitime défense. Pour sonder les policiers frondeurs sur la pertinence de ce dispositif, le "Collectif policiers en colère", a lancé une consultation jeudi matin sur internet.
"LE MOUVEMENT VA S'APAISER" "Estimez-vous que le ministre a répondu aux demandes, à toutes les demandes? Si oui, le mouvement doit-il s'arrêter et si non, doit-il continuer ?", demande-t-il. "Je pense que le mouvement des policiers en colère va s'apaiser doucement après les déclarations du ministre de l'Intérieur", écrit pour sa part Robert Paturel, un ancien du service d'élite du Raid. Le policier, dont la carrière inspire le respect à ses pairs, s'est proposé comme porte-parole du mouvement mais une partie des frondeurs le soupçonnent d'être proche de l'extrême droite.
Lui-même assure s'inscrire dans une démarche apolitique et se dit prêt sur les réseaux sociaux à poursuivre son rôle si le mouvement devait continuer. Sur le site d'autres collectifs, des policiers en colère estiment que l'essentiel n'a pas été abordé lors de la réunion à l'Elysée : les relations avec la hiérarchie. "La politique du chiffre n'est ni plus ni moins que l'effet pervers des primes faramineuses des commissaires. La suppression de cette prime entraînerait certainement une relation plus humaine et donc plus professionnelle avec la hiérarchie", écrit l'un d'eux. Du côté syndical, Unité SGP police, deuxième syndicat chez les gardiens de la paix, a salué les mesures annoncées.
"Il y a des gestes forts, il y a un budget, il y a des avancées. Ce serait totalement populiste et poujadiste de prétendre le contraire", a déclaré Yves Lefebvre, son secrétaire général du syndicat. Alliance, premier syndicat chez les gardiens, affirme qu'il restera vigilant sur la mise en oeuvre effective du plan. D'autres organisations soulignent la nécessité de mettre ces mesures en oeuvre sans attendre. "Il va falloir que ça se concrétise très rapidement sur le terrain pour que la grogne légitime que les policiers ont exprimée cesse", a estimé Jean-Marc Bailleul, secrétaire général du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure-CFDT.
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse)
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