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Interview : YOUSSOU NDOUR - ARTISTE - MUSICIEN : « FAIRE EMERGER UN « NOUVEL »AFRICAIN »

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Interview : YOUSSOU NDOUR - ARTISTE - MUSICIEN : « FAIRE EMERGER UN « NOUVEL »AFRICAIN »

A paraitre dans le Numero 5 de Echos de la Banque Mondiale,  mardi 25 juillet

Youssou Ndour aurait parfaitement pu reporter la date de notre entretien : il venait quasiment de passer une nuit blanche avec son groupe pour préparer un nouvel album musical. Une star mondiale comme lui pouvait se le permettre. Mais Youssou Ndour est un cas atypique : il n’a pas de caprices de star, car s’il est resté vivre au Sénégal, c'est précisément pour que la société sénégalaise lui rappelle toujours que lui, n’a pas le droit de faire certaines choses.

Dans cet entretien exclusif avec notre magazine Echos de la Banque mondiale, réalisé au studio « Xippi » tout prés de l’Océan atlantique le 13 juin dernier, « You », comme on l’appelle, ne parle pas de musique. Ou alors il en parle si peu. Il assène plutôt sa conviction que pour réussir, l’Afrique doit investir dans les attitudes mentales pour faire émerger un nouvel Africain ! Sans rater le crocodile qui voulait manger l’oiseau mais qui, depuis, a positivement changé !
 
Youssou Ndour, vous êtes  aujourd’hui un artiste mondialement connu. Comment expliquez-vous ce succès d’un enfant issu du quartier populaire de la Médina ?

Il faut d’abord y croire. Ce n’est pas la situation géographique qui donne une chance de réussir. Que l’on vienne de Kuala Lumpur ou d’un quartier populaire de Dakar, c’est la même chose. Il faut croire que les hommes naissent égaux, qu’ils ont les mêmes potentialités. Je le répète, le milieu géographique importe peu, en fait c’est le milieu qui profite de la réussite de ces enfants. Ce n’est pas le milieu qui va vous faire, c’est ce que vous pouvez faire pour améliorer le milieu qui importe.

C’est vrai cependant que moi j’ai vécu une situation extraordinaire avec la Médina. Je suis né à la Médina, j’ai grandi à la Médina, j’ai été très proche de mon grand-père maternel qui m’a inculqué très vite le goût de l’endurance au travail. Il m’a beaucoup aidé. Je me souviens, quand je commençais à fréquenter l’école, lui quittait la rue 22 (Ndlr : A prés de deux kilomètres de la maison familiale de Youssou Ndour) pour venir chez nous et s’assurer que j’étais réveillé pour ne pas être en retard à l’école ! D’une certaine façon, cela m’a donné à avoir de la rigueur dans tout ce que je fais. Ensuite, j’ai pris les choses comme elles sont venues. J’ai été à l’école et j’ai commencé mon travail de musicien et j’ai vite senti que ce travail pouvait me mener à un niveau plus élevé. Je me souviens bien de mon option première qui était d’être connu dans la Medina.

Donc tu avais déjà cette vision…

Tout à fait. Pendant les vacances scolaires, je fréquentais toutes les parties de la Medina où il y avait des kassak (Ndlr : cérémonie nocturne de chants traditionnels pour les jeunes circoncis). Vers une heure du matin, j’avais fini de faire le tour des tous les kassak ! J’y chantais et les gens parlaient de moi, cela a commencé comme cela.

Youssou, votre engagement auprès des enfants de la rue est connu de tous. Depuis des années que vous travaillez pour améliorer leur sort et que vous vous investissez pour que ces enfants aient un avenir meilleur, quel est aujourd’hui le bilan de toutes ces actions ?

C’est très difficile de faire le point car au même moment où vous croyez faire des pas en avant, vous voyez parfaitement que la situation des enfants de la rue a empiré. Il y a des initiatives qui sont prises, j’en fais partie, pour essayer d’améliorer leur situation, pour leur donner une éducation, une formation, pour le faire retourner à la maison. Mais, en même temps, il y a un accroissement démographique tel que les enfants de la rue sont plus nombreux. Il m’arrive parfois d’aller, la nuit, en moto, voir les enfants qui dorment dans la rue et ils sont tours plus nombreux et voila, je… (il hésite longuement)
 
Découragé ?

Non, non, pas du tout. Au contraire, devant cette situation on a plutôt envie de mieux communiquer pour que beaucoup plus de personnes s’engagent, car, comme on dit en Wolof, « Ce qu’une seule personne peut réussir, deux le feront mieux ».
 
On entend parler de certaines structures que vous pilotez comme l’orchestre Super Etoile, le studio « Xippi » ou encore la maison de Production « Jololi ». On entend beaucoup moins parler de la « Fondation Youssou Ndour ». Pourquoi quoi cette discrétion ? Quel bilan tirez-vous des activités de cette structure ?

Je dois préciser que je ne gère pas directement  la « Fondation Youssou Ndour ». Je suis simplement membre de son Conseil de gestion qui comprend également des personnalités viennent d’horizons divers (banques, sport, sociétés privées, etc.). Quand ce conseil prend des décisions, je les assume et je ne peux pas les changer.

La Fondation a fait d’excellentes choses. En tant que membre par exemple, j’ai été l’avocat pour un soutien à la formation des métiers de la musique. Quand nous nous produisons à Londres par exemple, les musiciens sont certes des Sénégalais,  mais toute la partie technique (son, lumière, mangement, etc.) est assurée par des Occidentaux. Je n ai rien contre eux, mais j’ai plaidé pour la formation dans l’ingénierie technique et de management, car au-delà des musiciens sur la scène, il faut voir les emplois créés par la musique et dont ne profitent pas les nationaux. J’ai pu convaincre la Fondation d’engager 70 millions de francs pour travailler avec l’Association des musiciens du Sénégal et former des professionnels de la sous-région dans ce domaine. Nous avons même des résultats au-delà des attentes, car les managers et les jeunes techniciens ont compris que pour accompagner un Youssou Ndour ou un autre musicien sur les scènes américaines, eh bien, il faut avoir la même qualification que le technicien ou le manager américain.

La Fondation soutient également la lutte contre le paludisme et depuis trois ans nous offrons de bourses à une quinzaine d’étudiantes qui viennent de milieux défavorisées de l’intérieur du Sénégal et qui font leurs études à Dakar. Nous les soutenons financièrement et nous suivons leurs études.

Nous participons également au Forum de Davos en Suisse depuis cinq ans pour y rencontrer des homologues et moi-même il m’est arrivé de représenter la Fondation qui fait beaucoup de travail au niveau international. Nous avons une crédibilité certaine qui nous permet de travailler avec d’autres fondations.

Avec la Fondation Bill et Melinda Gates ?

Oui, avec la Fondation Bill et Melinda Gates sur les recherches sur le paludisme. Nous travaillons aussi avec la Fondations Ford, avec la Fondation Céline Dion aussi.

Par rapport à « Jololo » et « Xippi » qui ont des objectifs commerciaux, la Fondation, elle, a fait l’option d’une communication minimale, mais elle est efficace et nous faisons en sorte que les gens viennent vers nous pour se rendre compte de ce que nous faisons.

Je dois aussi dire que nous venons de mettre en place une nouvelle structure, le « Fonds Youssou Ndour » qui n’a rien á voir avec la Fondation. Ce fonds a été crée avec IntraHealth International, une ONG américaine, en Pennsylvanie. Ainsi, nous allons mobiliser des fonds pour être encore beaucoup plus présent et efficace dans le domaine de l’éducation, de la santé et la promotion des activités culturelles. Ce fonds sera d’abord basé aux Etats-Unis et va travailler sur toute l’Afrique. Et ainsi, par exemple, une structure du Liberia ou du Mali pourra prétendre, au même titre que la « Fondation Youssou Ndour », au «Fonds Youssou Ndour».

Vous êtes ambassadeur de l’Unicef. Coumba Gawlo Seck, Ismaïla Lô et Baaba Maal, pour ne parler que du Sénégal, sont aussi des ambassadeurs d’organisations internationales. Comment appréciez-vous cet appel aux musiciens et artistes en général ?

Je crois que pouvoir servir une cause, malgré et au-delà son métier, c’est extraordinaire. Je dois saluer l’engagement des artistes sénégalais  et africains qui acceptent automatiquement de travailler avec ses organisations qui, il faut le dire, se sont beaucoup « plantées » par le passé avant de faire appel à nous. Elles ont compris maintenant seulement que pour rendre plus efficace leur travail administratif, il fallait compter sur les autres couches de populations comme les artistes, les religieux, les sportifs, etc. Et depuis, elles ont une meilleure visibilité mais je précise que cela n’exclut pas les contradictions. Moi quand je rencontre les gens de l’Unicef, je leur donne mes idées, sans chercher à leur plaire. Quand je ne pense pas comme eux, je le leur signifie très clairement. C'est plus productif. Et tout cela nous le faisons bénévolement, mais je  demande quand même de tenir compte de mon calendrier dans leurs activités pour lesquelles l’Unicef a besoin de mon nom : interviews, spots publicitaires, représentations, etc.  

J’ajoute aussi que tout musicien doit se sentir Ambassadeur dans sa tête, peu importe si une organisation internationale est derrière lui ou non. Un jeune musicien dans son quartier doit se sentir comme tel.

Comme on parle des organisations internationales, alors parlons de la Banque mondiale aussi. Comment jugez-vous  les agences d’aide au développement : efficaces ou juste distributeur de sous ?

J’avais fais une chanson contre les Instituions de Brettons Woods, contre le FMI et la Banque mondiale, intitulée « Picc Mi » (L’Oiseau), une histoire entre l’oiseau et le crocodile ! Comme à l’époque, elles ne communiquaient pas avec les populations, elles étaient perçues comme des institutions qui pompaient tout. Elles étaient le crocodile alors que l’Afrique était l’oiseau, la proie. Après j’ai changé un petit peu changé d’avis, car j’ai eu l’occasion de parler avec des responsables de ces institutions. Je crois que la Banque mondiale a beaucoup de mérite pour avoir osé changer son approche, avec aujourd’hui des rapports qui partent de nos pays vers le siège à Washington. Maintenant, la Banque mondiale bien que continuant toujours de travailler avec les Etats, écoute les populations et la société civile. Grâce à cette communication, les décideurs de la Banque sont mieux informés.

Maintenant si je devais décider de la politique de la Banque mondiale, mon credo serait de pousser tous les pays sous-développés à investir dans un processus de changement de mentalité.

C'est-à-dire ?

Tout simplement, je crois que tous ces problèmes de pauvreté, c'est certes une responsabilité des gouvernants mais c'est aussi une conséquence du comportement des gens. Il faudrait un type nouveau, mieux à même d’utiliser les ressources, comme celle de la Banque mondiale par exemple, mieux outillé pour s’épanouir dans la vie.

Il y a déficit dans la mentalité, les gens ne savent pas ce qu’ils doivent faire ou ne pas faire. Ce qui est leur droit et ce qui ne l’est pas. Il y une démission des autorités, des responsables des familles, des leaders de la société. Il faut changer cela. Car comme on dit en wolof « Baala ngay wouyou, nefa » (Ndlr : « Avant de répondre « Présent », encore faudrait-il exister d’abord »). 

Vous croyez beaucoup à l’homme…

Ah oui ! Beaucoup. Il faut agir sur les mentalités, investir sur les mentalités, c’est cela qui va nous permettre d’aller très vite. Ici en Afrique, si vous formez un homme, il devient très productif. Mais actuellement ce n’est pas le cas, tout le monde n’a pas les moyens de bénéficier de l’information et de toutes ces choses qui lui permettent sentir, dans sa tête même, qu’il est cette nouvelle personne, ce type nouveau dont je parle.  

Bono, le leader du groupe de musique U2 a joué un grand rôle dans la campagne pour l’annulation de la dette des pays pauvres. Avec votre aura, allez-vous vous suivre son exemple pour une cause déterminée comme la lutte contre la corruption par exemple ? 

Je connais Bono et je considère qu’il a vraiment du mérite. Son engagement est totalement désintéressé. Son groupe est sans doute le plus connu du monde. Mais il sait que sa notoriété lui permet de parler avec tous les grands de ce monde comme Koffi Annan, le Secrétaire général de l’ONU, ou Tony Blair, le Premier ministre britannique. Il met tout cela au service des causes qu’il défend, en mobilisant toute une communauté d’artiste. C'est très important ce qu’il fait.

S’agissant de la corruption, on en parle beaucoup mais elle n'est pas exclusive à l’Afrique, chaque jour il y a des scandales en Amérique. ! Ce que je n’admets pas, c'est que lorsqu’on présente l’Afrique, on ne parle que de la corruption, de la pauvreté, de la guerre et du Sida. Jamais on ne parle de sa face positive. Par exemple, nous venons d’élire démocratiquement une femme à la tête du Liberia. C'est de cela dont il faut parler, de cette responsabilisation de plus en plus accrue des femmes. Je crois que l’Afrique a besoin que l’on parle de ces aspect positifs, même si ne je récuse pas le fait de parler aussi de ses problèmes. Je refuse de considérer que tous les Etats africains sont corrompus, des pays africains font des efforts remarquables pour combattre la corruption. Et après tout, l’argent que les Africains volent, n’est-ce pas qu’il atterrit dans les banques occidentales, en Europe ou en Amérique ? On veut mettre l’Afrique dans la « Section des corrompus » alors que si on considère la corruption dans le monde, je ne crois pas, sincèrement, que nous soyons les champions !

Youssou, vous un êtes un opérateur économique privé. Est-il facile des faire du business au Sénégal ? A votre avis, que faudrait-il changer pour rendre meilleur l’environnement des affaires ? 

Un train a besoin de deux rails. Et l’économie aussi. Sur un rail, nous venons avec nos projets mais il faut que, sur l’autre, l’Etat joue véritablement son rôle de régulateur. Par exemple, ma société de production détient 60 pour cent du part du marché musical au Sénégal, nous avons produit beaucoup de jeunes artistes qui sont devenus des artistes confirmés, donc des min-entreprises. A côte, nous avons le concurrent dans le secteur informel. Nous, et les entreprises comme la mienne, nous payons des taxes, nous avons des charges de personnel. L’autre, il est seul, sans aucune déontologie professionnelle, sans aucune charge fiscale et de personnel. Il diminue les prix, il pirate nos produits ou alors il propose des produits semblables aux consommateurs. Que pouvons-nous faire devant une telle situation ? On voit toujours des gens qui créent des sociétés formelles, mais comme l’Etat ne fait rien pour assurer une saine concurrence, ces gens ferment leurs  sociétés, deviennent des sous-marins et se retrouvent dans le secteur informel.

C’est tout le problème du secteur du privé, il faut que l’Etat soit fort pour assurer une concurrence loyale, pour que les entreprises marchent, pour que les investisseurs mettent leur argent dans notre économie. La preuve, c'est que dans notre domaine qu’est la musique, vous voyez partout, au grand jour, des vendeurs des CD piratés des artistes dont on confisque ainsi les droits et personne ne s’émeut, alors que si on falsifie un bien appartenant à l’Etat, la sanction tombe. Ces pirates sont en train de couler une entreprise en toute impunité. Est-ce que nous allons nous, artistes, prendre des bâtons et les pourchasser dans la rue ? Ce que je dis est valable pour d’autres secteurs de production. Il faut que l’Etat soit fort, qu'il sévisse. Et ce n’est pas le cas aujourd’hui.

La seconde chose qui me parait important - bien que cela ne me concerne pas personnellement puisque je paie mes impôts depuis le début de ma carrière en 1984 -, c’est la fiscalité. L’Etat ne fait aucun travail en amont concernant la fiscalité. On laisse les gens créer leur société, un peu comme un poisson qu’on laisse filer avec l’appât et l’hameçon et qui, tout à tout coup, se trouve ferré ! Or l’impôt,  c’est comme la mort…

Ce n’est pas trop fort la comparaison ?

Pas du tout, je veux dire que comme la mort, personne ne doit y échapper au paiement des taxes ! Il faut les payer parce que c'est avec les impôts que l’Etat redistribue les fruits de la croissance. Or le type nouveau dont je parle, qui, dans le milieu économique, est aussi représenté par le Baol-Baol, pauvre hier et riche aujourd’hui, a besoin d’une éducation à la citoyenneté pour comprendre que payer l’impôt est nécessaire. La Baol-Baol crée une société formelle et ne paie pas les impôts car aucune éducation n’est faite en ce sens. Et brusquement, un jour. Le fisc arrive. Alors ce qu'il fait est simple : il ferme boutique et va dans le secteur informel.

Pourtant l’environnement devrait être propice avec les succès du Sénégal liés à la démocratie notamment avec les élections de 2000, lies au sport avec ce que les Lions ont fait à la coupe du monde de football en 2002, liés à nos produits culturels.

Et le système bancaire ?

Il ne soutient pas le secteur privé. J’ai entendue dire que les banques sont en situation de surliquidité mais elles pratiquent des taux d’intérêt insupportables et des demandes excessives de garanties. Maintenant je constate qu’elles vont prendre l’argent partout, devant chez toi, avec toutes ces banques qui s’implantent jusqu’au devant de ta maison. Mais c'est juste pour prendre ton argent près de chez toi, car pour emprunter, il faut encore aller à la Direction  générale !

Youssou, vous vivez au Sénégal alors que vous auriez pu vous installer n’importe où en Europe ou aux Etats-Unis comme le font beaucoup d’artistes, pour faire ta musique ou des affaires. Pourquoi ce choix de rester ici à Dakar ?

D’abord la famille ! Je suis très attaché à ma grande famille qui comprend aussi mes amis. J’y tiens énormément. Artistiquement, j’ai toujours considéré que ma musique doit ressembler à ce que je vis. Vivre ici me rappelle toujours qu’il y a des choses que je n’ai pas le droit de faire. Que je suis, parmi d’autres, un des Ambassadeurs de ce pays.  

La réponse plus simple est que Dakar a un aéroport international ! Je peux aller et revenir quand je veux et je n’ai pas besoin d’un visa de sortie. Je suis un artiste du monde, si je m’installais en France, j’allais partir aux USA et revenir en France. Si je m’installais aux Etats-Unis, ce serait pareil. Et puisqu’il s’agit d’aller et de revenir comme artiste, autant rester ici où il y aussi un aéroport !

Comment vivez-vous la Coupe du Monde qui se déroule actuellement en Allemagne (Ndlr : L’entretien s’est déroule le 13 juin) ?

Je pense que le Mondial a bien démarré, malheureusement certaines équipes africaines n’étaient pas dans les meilleures conditions pour aller très loin. Mais l’Afrique a un potentiel qui n’est pas totalement représenté au Mondial ! Pensez à Samuel Eto’o, vainqueur de la Ligue des Champions avec Barcelone, meilleur buteur du championnat espagnol.

Cette coupe est aussi importante car c'est le lancement de la « vraie » coupe du monde pour l’Afrique, celle de 2010 en Afrique du Sud.

Dans ce cadre vous avez un projet avec la FIFA ?

Oui nous venons de créer une fondation où je suis avec Bono, Koffi Annan, Bill Clinton, etc. qui va utiliser le football pour aider au développement. Nous voulons aussi que cette Coupe du monde soit une possibilité pour l’Afrique de se valoriser. Et c'est là où je suis impressionné par la vision du président de la FIFA, Sepp Blatter, Nous allons animer un grand concert à Berlin avant la finale de la coupe du monde pour dire « Ciao Allemagne, Salut Afrique du Sud ».

Votre pronostic ?

L’Angleterre ! Je supporte les équipes africaines et l’Argentine, mais je crois que l’Angleterre peut gagner la Coupe du monde. Et vraiment ce ne serait pas mal avec tout le bouillonnement qu'il y en Angleterre avec toutes ces nationalités dans le football anglais. C'est magnifique le championnat anglais, même si c’est vrai qu'il y a diverses nationalités dans les autres championnats, ce n’est pas pareil en Angleterre. On verra bien.

Le 10 juin dernier, vous avez été fait Docteur Honoris causa d’une école de management du Sénégal. Vous qui avez arrêté très tôt les études pour votre art dans lequel vous réussissez à merveille, qu‘avez-vous ressenti en portant cette toge universitaire ?

Je l ai dit clairement : je regrette l’école. Si j’avais les mêmes possibilités que maintenant, j’aurais continué les études. C’était un message sincère. Pour dire aussi aux jeunes que le talent ne suffit pas, il faut aussi le savoir.

C’est ce genre d’écoles qu’il nous faut sans oublier aussi les écoles aussi de formation que sont les garages et les ateliers de menuiserie de Médina ou de Thiaroye (quartier populaires de Dakar) qui sont de vrais centres de formation. Et je serais aussi fier d’avoir le tire de Docteur Honoris cause de ces centres.

Et cette réception au Senat français ?

C’était dans le cadre de la Francophonie. Nous travaillons beaucoup pour rendre plus visible la Francophonie et je suis membre du Comité d’organisation pour l’Année Senghor (Ndrl : !er Président du Sénégal). C’était une bonne chose.

Autre question d’actualité, des milliers de jeunes tentent aujourd’hui de gagner, au péril de leur vie, l’Europe a en empruntant des pirogues traditionnelles avec ce terrible slogan « Barcelone ou Barzakh » (Barcelone ou la mort, en langue Wolof). Vous qui avez fait l’éloge des émigrés dans une de vos plus célèbres tubes, comment appréciez-vous ce phénomène ? 

C’est une question extrêmement difficile. Pourquoi les jeunes veulent-ils partir coûte que coûte ? Parce qu’ils n’ont pas de travail. Pourquoi n’ont-ils pas de travail ? Parce qu’ils n’ont pas de formation. Sans formation, on ne peut pas valablement chercher du travail. On ne peut même pas offrir du travail à quelqu’un qui ne sait rien faire. Je reviens sur l’éducation et la formation nécessaires pour pouvoir se créer des opportunités.

La deuxième chose est qu’autour de nous, il y a quelqu’un qui vit à l’étranger. Sa maison familiale se transforme, sa maman possède une voiture et un téléphone. Et tout cela grâce à un enfant émigré qui vit dans de mauvaises conditions en Europe ou en Amérique mais qui envoie de l’argent. On parle de 300 milliards par an que les émigrés envoient au Sénégal. Quand un jeune voit cela, il va tout faire pour partir, pour pouvoir faire la même chose pour sa propre maman. Et même la famille met la pression sur le jeune en lui demandant de faire comme ses pairs. On commence à lui mener la vie difficile. Il va chercher le visa par tous les moyens. C’est parce que l’argent est aujourd’hui placée au dessus de tout alors qu’on peut parfaitement être utile même à sa société si on n’a pas de l’argent. 

Moi je décourage complètement les jeunes qui risquent leur vie pour aller en Europe. Mais il faut que l’Etat se rendre que ce ne sont pas des milliards qui vont régler le problème. Il faut investir sur l’homme nouveau. Ce qui se passe traduit l’échec de l’Etat, mais aussi des parents. C'est aussi l’échec de l’Europe dont les dirigeants ne se soucient que des 20 % de l’électorat qu’il faut séduire avec des politiques anti-immigrations. Bush, Sarkozy, c'est pareil, quand il parle de l’immigration, c'est uniquement pour gagner des élections.  

L’action que nous allons mener, en tant qu’artistes, c'est un grand concert à Nouadhibou, en Mauritanie, en en octobre sans doute. On va inviter beaucoup d’artistes d’Afrique et d’Europe pour lancer un message pour mettre fin à l’émigration clandestine avec tous ces dangers. Et je vous assure tout de suite en vous disant qu’aucune pirogue ne quittera ce jour-la le port pour l’Europe. Nous y lancerons un message pour le type nouveau !

A paraitre dans le Numero 5 de Echos de la Banque Mondiale, mardi 25 juillet


Source : Echos de la Banque mondiale - Magazine du Bureau de Dakar.

( mademba@worldbank.org Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir )



1 Commentaires

  1. Auteur

    Allons Y Molo

    En Octobre, 2010 (18:37 PM)
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