L’admiration que j’ai pour le Sénégal n’a d’égal que le mérite que je
reconnais à ce pays et à son peuple. Je puis entre autres le remercier
d’avoir su donner un espace pour l’éternité à l’ancien président de
mon pays d’origine, le Cameroun. Il me souvient aussi que je me suis
opposé tant de fois à des intellectuels sénégalais qui en voulaient à
Léopold Senghor, les uns et les autres avançant des griefs qu’ils
jugeaient entendables. On a reproché vaille que vaille au grand homme
de lettres, au père de la négritude et de la francophonie, d’avoir
accepté l’immortalité de l’Académie française, de n’avoir pas passé sa
retraite dans son Sénégal natal. En un mot, on lui a reproché d’avoir
joui de sa liberté et de reconnaissance universelle, après avoir tant
servi son pays et l’humanité. Qu’importe ! L’homme pour tous les
Africains restera le fondateur de notre pensée moderne. Ceci n’enlève
rien aux reproches que l’on peut lui faire, pas plus que ces reproches
n’enlèvent quoi que ce soit à sa grandeur.
Je me suis mille fois interrogé sur les origines de la grandeur et de
la finesse de ce peuple, depuis les signares, entremetteuses et
ambassadrices de choc et de charme, jusqu’à cette démocratie unique en
Afrique et exceptionnelle dans le concert des nations, en passant par
le merveilleux sanctuaire de Gorée. De Gorée, je suis au moins aussi
fier que je suis agacé par la logorrhée de certains Africains contre
les méfaits de la traite, alors que de rares mémoriaux préservent la
mémoire de cette blessure. Et je pense à ces mots exceptionnels du
mythique conservateur Joseph Ndiaye, gribouillé sur un mur de la
Maison des esclaves. Il disait en substance – je cite de mémoire -, «
le plus difficile c’est de savoir que c’est irréparable, le plus beau,
c’est de ne pas vouloir de réparations ». Le Sénégalais avant tous les
Africains, tourne le dos à des attitudes revanchardes qui n’expriment
que la triste petitesse des hommes et des nations. Qu’il continue donc
!
La première phrase de mon livre intitulé Les hirondelles du printemps
africain est la suivante. « L’Afrique n’existe pas et c’est pour cela
que je crois en elle ». Les oxymores ont leur raison d’être. Depuis
que j’ai acquis la certitude que l’Afrique était une construction et
non un héritage, encore moins une proclamation ou une déclamation, je
me suis mis à rechercher sur ce continent, les personnalités qui
participeraient le mieux à cette tâche. Et il a fallu – je n’en fus
nullement surpris – que c’est au Sénégal que je trouve les prémices de
cette construction. L’Afrique n’existera pas sans une renaissance qui
permette la mise en place d’un socle culturel commun. Avant
l’avènement de cette Europe brinquebalante, et néanmoins méritoire que
nous observons aujourd’hui, il a fallu des siècles de renaissance.
L’homme qui m’a permis cette espérance, se nomme Abdoulaye Wade. Avec
le monument de la renaissance, nous disposons enfin d’un phare
symbolique vers lequel lever les yeux.
N’oublions pas que le Sénégal est un pays – le seul en Afrique
francophone - où la démocratie et l’alternance se sont installées
solidement. Les dirigeants sont de plus en plus conscients de cela et
s’efforceront donc de laisser des traces de leur passage. J’ai
découvert que Wade avait construit une vision exceptionnelle de
l’Afrique et du Sénégal pendant ses longues années d’opposition.
Oxymore et oxymore, aussi étrange que cela puisse paraître, je pense
qu’il était le vrai dauphin de Senghor. Qui ne se souvient que quand
on demandait Au général De Gaulle quel Français méritait de gouverner
la France après lui, il répondait sans une seconde d’hésitation que
c’était François Mitterrand. Le Même François Mitterrand pensait la
même chose de Chirac, qui lui aussi choisira François Hollande, au
grand dam de son camp.
En décembre 2011, j’ai passé le réveillon de la Saint Sylvestre au
Sénégal. Depuis des mois, je tannais mon éditeur, parce que je voulais
produire un beau livre sur l’œuvre de Wade. L’idée de cette
réalisation m’est venue quand j’ai vu le monument de la renaissance
africaine. Enfin, j’entendais le mot dont je rêvais depuis toujours.
Alors que tous les intellectuels africains se focalisaient sur un
nébuleux panafricanisme prématuré venu des États Unis de William
Burghardt Du Bois, je trouvais enfin un leader qui comprenait que la
renaissance précède toute unité politique ou économique de type « pan
». Je me suis intéressé à la dimension que cet homme avait pour
l’Afrique et sa jeunesse. Urbaniste de formation, je n’ai pas été
indifférent à la nouvelle physionomie que présentaient le Dakar et le
Sénégal de l’ère Wade. Mais au dessus de tout cela, la vision d’une
Afrique conquérante, orgueilleuse, ouverte au monde qui était portée
par la symbolique des sept merveilles de Dakar, cette vision restera à
n’en pas douter, après les luttes de nos pères – dont Senghor - pour
les indépendances, l’une des plus nobles conquêtes d’un continent en
quête de mythes et de repères.
Je n’ai jamais cherché à rencontrer l’Homme, pas plus que je n’ai
rencontré Aimé Césaire, Frantz Fanon, Léopold Senghor, Jean de Racine,
Albert Camus ou Antoine de Saint-Exupéry, pour me sentir dépositaire
de leurs héritages. J’ai conçu et obtenu de mon éditeur que nous
publiions un beaux livre sur Abdoulaye Wade, le temps de la
renaissance africaine. J’ai proposé le sous-titre de Père de la
renaissance africaine. Il n’en a pas voulu, choisissant celui qui a
été finalement adopté. À la suite de ce travail, un organisme qui
m’était totalement inconnu, le Forum de la Renaissance Africaine, FORA
par la voix de son dirigeant Souleyanta Ndiaye, m’a sollicité à
l’occasion d’une remise d’un prix à maître Wade, en hommage à son
œuvre sur la renaissance africaine. Pour la deuxième fois, j’ai pu
voir l’homme et avoir le plaisir de le remercier pour sa vision qui
s’ajoutait au long tissu des honneurs et des légitimes fiertés que
l’Africain pouvait ressentir grâce au peuple Sénégalais.
Je suis profondément triste, peuple sénégalais – et c’est la raison
de cette tribune - de lire les articles qui sont écrits sur cet homme.
Je vous estime trop pour comprendre cette vindicte qui est organisée
contre maître Wade. En son temps, j’ai pris la défense de Senghor qui
restera le père de la pensée moderne africaine. Le président Macky
Sall, est comme moi un enfant de Senghor et quoi qu’on dise, un
disciple de Wade. Je serais surpris qu’il apprécie ce tapage
médiatique. Mais surtout, j’interpelle l’homme africain sur son
destin. Le Sénégal a maîtrisé le jeu de l’alternance politique. Cette
alternance parfois génère des effets pervers, ce que l’on désigne
souvent comme le droit d’inventaire ou l’audit du pouvoir déchu.
Généralement, ces chasses aux sorcières s’étiolent avec le temps car
leur seul objectif – c’est de bonne guerre, pensent certains - est de
donner au nouveau pouvoir, le temps de trouver ses marques. Ou de se
trouver des boucs émissaires.
Aujourd’hui, Abdoulaye Wade a accepté le jeu de l’alternance, quelles
qu’eussent été les intentions qu’on lui prêtait. Avec une belle
élégance, il a félicité son jeune vainqueur. Il s’est retiré pour une
retraite politique méritée. Si j’étais un de ses proches, je lui
conseillerais de retourner à ses chères études d’intellectuel
incontesté et de léguer à la postérité, des mémoires dont je le sais
que l’Afrique a tant besoin. Et pour parodier Don Diègue, le père de
Rodrigue, « dans ce long tissu de belle actions », les générations
futures liront ce qu’il faut faire pour votre pays et pour notre
continent. Je m’impose conseiller du peuple frère sénégalais, et tout
en lui réitérant l’admiration que j’ai pour lui, je voudrais lui dire
de tourner les yeux vers l’avenir et de garder en mémoire la grandeur
de ces femmes et de ces hommes qui se succèdent dans son histoire,
depuis les augustes signares en passant par le grand Blaise Diagne et
l’inénarrable Joe Ndiaye, ces femmes et ces hommes que maître Wade a
rejoint, et en la mémoire desquels j’ai rédigé cette contribution. Ce
faisant, comme eux, il n’appartient plus au Sénégal, mais à l’Afrique
et à l’humanité.
Gaston KELMAN (Ecrivain)
Contribution
40 Commentaires
Baba
En Janvier, 2013 (00:22 AM)Auguste 1
En Janvier, 2013 (00:35 AM)Lol
En Janvier, 2013 (00:36 AM)Deugue Nekhoul
En Janvier, 2013 (00:46 AM)@gaston
En Janvier, 2013 (00:53 AM)A
En Janvier, 2013 (01:14 AM)One
En Janvier, 2013 (01:30 AM)lua a ete pense par les europeens
son siege a ete bati par les europeen
la logistique fourni par les europeen
les langues de com sont europeen
qua ton dafricain que nous partageons en commun
nada touss...que des illusions
Matt
En Janvier, 2013 (02:25 AM)Nay Ler
En Janvier, 2013 (02:46 AM)Toto2
En Janvier, 2013 (03:02 AM)IL serait plus serieux judicieux de laisser les Senegalais juger le diable avec lequel ils ont vecu.
Votre opinion que vous traduisez a travers votre contribution n engage que vous et pas les Senegalais.
Je me passerai de tout ce que le peuple Senegalais a souffert de la megalomanie d un President qui voulait faire une devolution monarchique du pouvoir au Senegal.
Ne nous parle pas de la Renaissance Africaine et de cette Statue qui la symbolise!!!
Gaston si tu veux etre serieux et pris au serieux laisse-nous Senegalais juger
Nopilen
En Janvier, 2013 (05:06 AM)Sarr
En Janvier, 2013 (05:40 AM)Laye Baldea Seattle Washington
En Janvier, 2013 (06:59 AM)SALUT A TOUS AU PAYS.
LAYE.
Emploi
En Janvier, 2013 (07:30 AM)Mali
En Janvier, 2013 (07:51 AM)Ousmane Diop
En Janvier, 2013 (07:55 AM)Laye
En Janvier, 2013 (08:22 AM)Nfally
En Janvier, 2013 (09:09 AM)Qu'en savaient ils exactement ?A voir les mêmes personnes entrer la tête entre les épaules on sent bien que quelque chose s'est passé mais quoi ?.Il y'avait comme une espéce d'hystérie collective antiwadiste , une propogande bien orchestrée par les caciques de l'ancien pouvoir et ceux qui jugeant anormal qu'ils ne soient pas invités au bal .
Mais au fait qu'avait donc le senegal avant Wade ?Désolé de vous dire qu'il n'y avait rien du tout .A part les jeunes écervelés de YAM qui glandent à longueur de journée et qui ont été manipulés à tord (puisqu'ils y prennent goût ) tout le monde sait qu'au senegal il n'ya pas tant de richesses produites et sensés avoir été détournés .Le mot enrichissement illicité c'était Abdou diouf qui a sacrifié 3 personnes pour faire peur .Cela n'a jamais marché dans un pays où la filouterie est une religion.
En tout cas ce n'est pas Macky qui portera plus haut le flambeau après Laye Wade , d'ailleurs je ne vois personne d'autre ...
La Vérité Si Je Mens
En Janvier, 2013 (09:11 AM)Peuls,
En Janvier, 2013 (09:43 AM)Diallobi
En Janvier, 2013 (10:35 AM)Ben
En Janvier, 2013 (14:23 PM)Wade-solomon
En Janvier, 2013 (16:53 PM)L'histoire falsifiee et modifiee maintes fois fait que nous ignorons pratiquement tout .
Qu'Allah swt benisse ces 2 personnages que sont Abdoulaye Wade Bethio Thioune.amin.
quant aux ignorants et insulteurs automatique, je vous prie de vous barrer de mon opinion.
Boulennma yeungueul mouk
L'Afrique ne cesse jamais de tuer ses prophetes.
Bouba
En Janvier, 2013 (19:19 PM)Tout A Fait Daccord
En Janvier, 2013 (21:28 PM)Jaimelemanioc
En Janvier, 2013 (22:31 PM)Ce G.Kelman a renié jusqu'a son nom de famille pour se faire accepter par les francais.
Khamoul
En Janvier, 2013 (22:41 PM)Chico1978
En Janvier, 2013 (04:14 AM)Le Moderne
En Janvier, 2013 (07:57 AM)Laye
En Janvier, 2013 (08:57 AM)Que ça soit SENGHOR ou WADE ils ont tous les deux apporté quelque chose à ce pays, pour SENGHOR c'est surtout au niveau de la culture et de l'éducation et c'est peut-être même pour cette raison que nous arrivons à avoir des alternances au Sénégal alors que ça se passe pas comme ça partout ailleurs en Afrique surtout francophone.WADE aussi a beaucoup apporté par sa vision , il est plutôt prétentieux mais au final ça nous a été bénéfique malgré le pillage durant ces deux mandats, rien que son projet d'autoroute et d'aéroport à NDIASS vont résoudre le principal problème de DAKAR qu'est son enclavement.Il a fallu attendre plus de quarante années pour voir enfin quelque chose au Sénégal non hérité de l'ancien colonisateur.
Sow
En Janvier, 2013 (11:34 AM)Il est bon aussi de rappeler que c'est Dieu lui meme qui dit qu'il n'y a pas de pouvoir parfait hormis le mien. Alors si c'est juste pour critiquer on peut critiquer tout le monde. Mais je vous rappelle que pour pousser le Sénégal vers l'émergence, il est impératif que nous sénégalais nous ayons un Président audacieux, charismatique, connu dans le monde diplomatique. Un Président qui sait trouver de l'argent et qui ne compte surtout pas sur ces propres ressources internes. En réalité je vois mal avec un budget de 2000 Milliards qu'est - ce qu'on peut faire si ce n'est payer nos fonctionnaires et construire deux dispensaires.
Kilifa
En Janvier, 2013 (11:48 AM)Aujourd'hui, c'est toute l'Afrique qui se doit d’honorer ce Grand Africain pour tout ce qu'il a apporté au continent.
LONGUE VIE AU PRESIDENT WADE. SOUL KEER DOUKO TEERE FEGNEU
Ngoe Diegane
En Janvier, 2013 (14:31 PM)Gommé
En Janvier, 2013 (01:47 AM)Sangue Mbacké Mbaye
En Janvier, 2013 (13:13 PM)Ah
En Janvier, 2013 (13:26 PM)Ass Mansour
En Janvier, 2013 (16:19 PM)Dom
En Février, 2013 (09:36 AM)Brack Du Walo
En Février, 2013 (14:28 PM)Kheltou
En Février, 2013 (18:27 PM)Participer à la Discussion