Qu’est-ce que la sociologie peut-elle bien faire au paradis ? Un théologien peut bien disserter sur les traits caractéristiques du paradis, et même s’étaler longuement sur les jouissances proposées aux croyants qui l’auraient bien mérité. Mais un sociologue, qu’est-ce qu’il peut bien dire à propos de cet espace idyllique ? Dans tous les cas de figure, il ne s’agirait pas pour lui de se positionner sur l’existence ou non de ce lieu, mais de voir tel que présenté par les uns et les autres, qu’est-ce que le paradis peut bien révéler ou chuchoter à l’oreille d’un sociologue très attentif aux conditions de vie que l’on réservera aux futurs locataires de l’Eden, de Firdawsy, de Naiim, de Maawa, de Illiiyin, etc ?
Tel que présenté d’abord, on note un certain sexisme. Autrement dit, l’on semble penser qu’aux locataires mâles du paradis. Les femmes, d’après les interprétations les plus en vogue, ne seront que les épouses de leurs maris sur Terre. Même si ici, on peut se demander, dans le cas d’une femme qui aurait plusieurs hommes dans sa vie, avec qui vivra-t-elle au paradis ? Avec son premier mari qui est décédé un peu plus tôt qu’elle ? Ou avec le second, avec qui elle a passé le reste de sa vie ? Ou avec celui qui a été toujours l’amour impossible de sa vie ? A travers ces questionnements, l’on commence à entrevoir que la place de la femme au paradis n’a pas été très bien définie par les commentateurs des textes religieux. Bien au contraire, on a même l’impression que le paradis n’est fait que pour les hommes.
Dans cette optique, pour les hommes, selon les interprétations et les lectures les plus officielles, l’homme vertueux ici bas, aura dans l’au-delà plusieurs milliers de femmes en sa compagnie. Des femmes éternellement jeunes qui ne seront là que pour le plaisir du dit homme. « Nous les aurons mariés à des houris aux grands yeux » (44 :56). Des femmes aux grands yeux d’un blanc immaculé, telle est la traduction que l’on fait souvent du mot « Houris ». Dans ce sillage, le paradis est un lieu de rétribution en faveur plutôt des hommes que des femmes. Ainsi, comme sociologie du paradis, l’on peut en inférer que ce lieu est fait pour les hommes et accessoirement pour les femmes. Comme autre inférence, on pourrait également alors cautionner le fait comme on le croit que les hommes sont supérieurs aux femmes. Ils sont supérieurs ici bas et supérieurs dans l’au-delà, un lieu qu’on aurait pu supposer comme n’étant pas sexiste. Mais qu’à cela ne tienne !
Interprétation pour interprétation et traduction pour traduction, Christoph Luxenberg, un philologue allemand, pense par contre, qu’au paradis, il n’y aurait pas de « houris aynii », mais plutôt de grappes de raisins. Selon lui, toutes les expressions de « houril ayni » qui se trouvent dans le Coran, renverraient plutôt à « grappes de raisin » qu’à « femmes aux grands yeux ». Ainsi, dit-il par sa nouvelle traduction de certains passages du Coran, il a voulu rendre sa « dignité » à ce texte sacré des musulmans, sur ces points. En effet, selon Luxenberg « wa zawadjnahoum bi houril ayni » (nous les aurons mariés à des houris aux grands yeux » est en réalité « wa rawadjnahoum bi houri inabine » (nous les installerons (confortablement) sous des (raisins) blancs comme le cristal).
Raisins ou femmes, femmes ou raisins, la nuance est très importante. S’il s’agit de femmes, le paradis serait pour les hommes exclusivement, mais s’il s’agit de raisins, on peut dire que le paradis serait également fait pour les femmes, et en égalité avec les hommes. A tous les deux, il leur sera accordé des raisins blancs. Mais, la nuance est également de taille, parce qu’elle rétablit la dignité des femmes, qui ne seraient pas que des objets sexuels ici bas et dans l’au-delà, pour le simple plaisir des hommes.
Raisins ou femmes, femmes ou raisins, il se pose naturellement un problème philologique, un problème d’interprétations, un problème de langues. Quelle est la langue ou quelles sont les langues du paradis pour reprendre le titre de l’ouvrage de Maurice Olender « Les langues du paradis » ?
Dans tous les cas de figure, il est des passages dans le Coran qui font mention de raisins et d’autres de femmes. Et que les hommes, au paradis, peuvent alors avoir et des femmes et des raisins. Ce n’est pas antinomique ! Mais également, dans tous les cas de figure, l’on conviendra que cette rétribution ne mentionne explicitement que les hommes. Ainsi, l’on voit également ici apparaitre que le discours coranique, à l’instar du paradis, semble ne s’adresser qu’aux hommes, dans la plupart des cas. Peut-être que les questions et le contexte qui prévalaient, étaient dominés par les hommes, et que de ce fait que c’est eux qui posaient les questions et les réponses s’adressaient à eux.
Dans les religions révélées, l’image de la femme semble très controversée, c’est peut-être ce qui explique son statut ici bas et dans l’au-delà. Pour rappel, selon certains commentaires des textes religieux révélés, Adam et Eve vivaient au paradis avant d’être déchus. Et la cause de cette déchéance est principalement attribuée à Eve qui en serait la tentatrice. Depuis, la condition de la femme est très confinée, par peur sans doute de la voir se libérer et d’avoir un pouvoir incommensurable sur l’homme.
Les féministes les plus chevronnés tentent de redorer le blason de la femme, dans la vie quotidienne. Mais, il est fort à parier que cela passera nécessairement par une relecture des textes révélés, et surtout par une réattribution à la femme d’une place plus claire et plus égale à celle de l’homme, dans l’au-delà, au paradis.
Hé oui ! Le sociologue que je suis, était allé au Paradis, pour mieux comprendre la vie sur Terre. La prochaine fois, il fera un voyage en enfer, peut-être qu’il y trouvera quelques petites explications des enfers sur Terre. Sociologie de l’enfer ! Pourvu que je puisse m’en échapper sans trop de dégâts. Je pense que cela est possible, surtout après ce dur mois de ramadan, un bouclier contre la Géhenne, qui dit-on, sera beaucoup plus peuplée par les femmes que par les hommes. Ah les femmes, qu’avez-vous bien pu faire… ?
Mamadou Moustapha WONE
Sociologue
6 Commentaires
Rectif
En Septembre, 2013 (15:11 PM)Michel Orcel semble remettre en question les travaux de Christoph Luxenburg à cause de sa partialité. Il le décrit comme étant un « curieux savant islamophobe » caché sous ce pseudonyme12.
François de Blois, dans Journal of Qur'anic Studies, relève des fautes grammaticales dans le livre de Luxenberg9 : « Sa maîtrise du syriaque est limitée à la connaissance des dictionnaires, et dans son arabe, il fait des erreurs typiques des Arabes du Moyen-Orient »9,13. Il décrit son livre comme « pas un travail d'érudition, mais de dilettantisme ».13
Patricia Crone, spécialiste de l'histoire de l'Islam qui a travaillé à The Institute for Advanced Study, Princeton, définit les travaux de Luxenberg (et de Günter Lüling) comme « susceptibles de soulever de nombreuses objections scientifiques » et remarque un « amateurisme évident dans le cas de Luxenberg »14. Elle conclut que l'on ne saurait prétendre que ces travaux aient apporté grand-chose.
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En Septembre, 2013 (16:00 PM)2. le paradis est déjà sur terre, si tu ne sais pas c'est parce que tu n'y es pas.
3. tu es un con qui se prend pour un révolutionnaire. Je te connais depuis le TC.
Ah Les Franc-maçons!
En Septembre, 2013 (21:55 PM)Vite a la Sourate18 La caverne
Les suppôts de massih dajal sont déchaînés
Maïmoune
En Septembre, 2013 (09:01 AM)Salamousalam
En Septembre, 2013 (12:02 PM)Si vous ne savez pas demandez a ceux qui savent.Ca c'est un ordre toi aussi monsieur wone.
Etudiant_sociologie_ucad
En Septembre, 2013 (11:01 AM)"Dans tous les cas de figure, il est des passages dans le Coran qui font mention de raisins et d’autres de femmes."
les références s'il vous plait.
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