Inondations et politique font bon ménage. Jugeons-en. Le ciel ouvre ses vannes. Cette divine grâce apporte espoir, verdure et prospérité dans le pays. Le bonheur des uns faisant le malheur des autres, les inondations "sénégalaises", mal principalement urbain, ne font pas que détériorer les conditions de vie des populations des quartiers mal lotis et mal famés.
Les politiques savent aussi cyniquement saisir l'oukase pour transformer cette grâce divine en combines machiavéliques. Il n'y a qu'à jeter un regard furtif dans le rétroviseur de l'histoire politique récente de Sunugaal.
Fin août 2005, Dakar et sa banlieue pataugent dans les eaux. Le président Abdoulaye Wade de retour d'un voyage à l'étranger, investit la banlieue. L'impressionnant cortège présidentiel de bolides 8X8 rame dans les eaux stagnantes; un beau numéro de communication. Njomboor (surnom de Me Wade) mijotait depuis un bon moment de bousculer le calendrier républicain. Bingo! Le ciel lui fit ce beau cadeau. Un message radiotélévisé à la Nation: il proposa le report des législatives prévues en 2006, et de les coupler à l'élection présidentielle de 2007. Hop! Un claquement de doigts et sa majorité mécanique à l'Hémicycle adopta sans barguigner, le désir présidentiel. Pas question de dépenser dans un pays aux ressources limitées, plus de 7 milliards de CFA pour un scrutin en 2006 et récidiver l'année suivante pour la même acrobatie démocratique.
Avec quelques réalisations (logements plan Jaxaay notamment), le Chef de l'État de l'époque en rempilant plus au moins aisément en 2007. Cinq années plus tard, les combinaciones sont arrivés à bout de souffle. Abdoulaye Wade perdit le pouvoir en mars 2012 au profit d'un certain Macky Sall qui n'est d'autre que le Chef du Gouvernement en août 2005.
Une fois parvenue à la Magistrature suprême, l'ancien Premier ministre de Wade, au nom d'une gestion "sobre et vertueuse", prit à son compte les tics du maître, de Me. C'est ainsi que dès septembre 2012, il fit adopter par le Congrès (l'Assemblée nationale et le Sénat réunies) la suppression de la Chambre haute du Parlement. Officiellement, c'est pour économiser des milliards qui seront destinés à lutter contre les inondations de cette année 2012.
Mais tout le monde sait qu'au-delà des slogans politiques serinés à souhait, le président de la République, fraîchement élu, s'accommodait mal de ce Sénat, avec des pensionnaires majoritairement libéral, donc incontrôlables.
De plus, tout le monde a en mémoire la "résurrection" de celui-ci quand apparut à nouveau le Conseil économique social et environnemental (CESE) qui avait lui aussi disparu de la nomenclature institutionnelle sénégalaise, au nom des mêmes théories de politique d'austérité. C'est le retour de l'hyène dans la bergerie, sous la peau du lion. Ces institutions sont plus réputées servir de cadre de recasement de personnels politiques qu'à autre chose.
En septembre 2020, bis repetita. Les inondations sont encore là. Soulager les populations tout en gardant un œil sur le calendrier électoral républicain. À quel prix ?
La suite au prochain épisode de la série les "sunugalaiseries".
Cheikh Lamane DIOP, Journaliste
E-mail: lamanediop@gmail.com
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