L'Assemblée Nationale vient d'adopter, ce 24 Janvier 2019, la loi relative au contenu local dans le secteur des hydrocarbures, dont le but est de "promouvoir l'utilisation des biens et des services nationaux ainsi que le développement de la participation de la main-d'œuvre, de la technologie et du capital nationaux dans toute la chaine de valeur de l'industrie pétrolière et gazière". Les dispositions de cette loi viennent compléter l'article 58 du nouveau Code Pétrolier de 2019 qui, par ailleurs, impose certaines obligations de contenu local aux titulaires de contrats pétroliers, y compris en matière de formation du personnel local, de transfert de technologie, de participation des investisseurs privés nationaux aux opérations pétrolières et d'octroi de contrats de fourniture de travaux, biens et services aux entreprises nationales.
En adoptant ce texte, le Sénégal se dote assurément, à l'instar de pays comme le Ghana, d'un cadre propice à l'augmentation de la valeur ajoutée locale et à la création d'emplois locaux dans la chaine de valeur des industries pétrolières et gazières.
Cependant, le caractère salutaire de ce nouveau cadre juridique ne doit pas occulter la nécessité d'une prise en compte des engagements internationaux de l'État du Sénégal en matière de traitement, de protection et de garantie des investissements étrangers.
En effet, il est nécessaire, pour assurer la pleine effectivité du dispositif, de s'assurer de sa compatibilité avec les engagements souscrits par l'État au niveau communautaire et au niveau international à travers les traités bilatéraux d'investissement (TBI) conclus avec des pays tiers. Cet exercice est d'autant plus utile que la Constitution sénégalaise établit une hiérarchie des normes en vertu de laquelle les engagements internationaux de l'État priment sur les lois nationales.
Quoique la loi sur le contenu local soit en parfaite adéquation avec le droit communautaire et le droit de l'Union Africaine, en raison de la possibilité offerte par l'Acte Additionnel de la CEDEAO portant adoption des règles communautaires sur l'investissement et le Code Panafricain des Investissements d'introduire des prescriptions de résultats pour encourager les investissements et le contenu local, cette harmonie n'est pas assurée concernant les TBI. L'analyse des traités conclus par le Sénégal avec des pays comme le Royaume Uni, les États-Unis et la France, d'où ressortissent la plupart des investisseurs étrangers dans le domaine pétrolier et gazier au Sénégal, permet de constater une asymétrie.
D'abord, le fait que ces traités interdisent à l'État de discriminer les investisseurs étrangers par rapport aux investisseurs nationaux constitue un décalage par rapport à l'esprit de la loi sur le contenu local. Le traité avec les U.S.A va plus loin car contenant une disposition qui interdit expressément à l'État d'imposer des prescriptions de résultats, ce qui englobe bien entendu les mesures de contenu local. Celui conclu avec la France dispose, dans le même sens, que l'imposition par l'État de toute restriction à l'achat ou au transport de matières premières et de matières auxiliaires pourrait s'assimiler à une violation de l'obligation prévue par le traité d'accorder à l'investisseur étranger un traitement juste et équitable.
Ensuite, l'exigence découlant de la loi sur le contenu local d'instituer une société de droit sénégalais aux fins de réaliser les investissements pétroliers et gaziers pourrait se heurter à l'obstacle de la définition consacrée au terme "investisseur" dans les traités. La plupart de ces derniers définissent l'investisseur personne morale comme étant une société immatriculée dans le pays d'origine. Or, exiger que l'investissement soit réalisé par l'entremise d'une société qui aura de facto la nationalité sénégalaise pourrait conduire à priver les traités d'effet puisqu'il s'agirait de contourner la nationalité étrangère de l'investisseur étranger alors même que celle-ci est la condition première pour bénéficier de la protection du traité.
Dans un contexte où le Sénégal entend tirer le maximum de profit des nouvelles découvertes d'hydrocarbures au bénéfice de ses populations, assurer une harmonie entre la loi sur le contenu local et les traités d'investissement revêt, pour diverses raisons, une urgence capitale. La première tient à la nécessité de garantir l'effectivité de la loi, au vu des enjeux de développement économique qu'elle comporte. Or, dans la mesure où la constitution sénégalaise fait primer les conventions internationales sur la loi, les dispositions conventionnelles interdisant le contenu local l'emportent sur les dispositions législatives. La deuxième raison de l'urgence tient à la nécessité de prémunir l'État contre de potentiels litiges qui pourraient être portés devant les juridictions arbitrales par les investisseurs étrangers. En effet, les traités d'investissement donnent à ces derniers un accès à l'arbitrage international en cas de violation par l'État de ses obligations internationales envers l'investisseur. Alors, nul doute que les mesures que l'État sénégalais sera amené à prendre au titre de la loi sur le contenu local pourraient donner lieu à des contentieux sur le fondement des traités.
Au vu des enjeux énoncés, l'État du Sénégal gagnerait à clarifier la portée de ses obligations internationales en matière de protection des investissements étrangers au regard des nouvelles exigences relatives au contenu local. A ce titre, deux options, toutes deux préconisées par la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNUCED), s'ouvrent à l'État. Une première pourrait aboutir à la formulation par les parties contractantes d'une interprétation conjointe des dispositions incompatibles, laquelle engagerait tout tribunal d'arbitrage saisi de ces questions. Une deuxième alternative consisterait à renégocier les traités concernés en vue de les amender purement et simplement, et d'y inclure, par la même occasion, une disposition consacrant le droit de l'État de réguler, dans un but d'intérêt général, les investissements étrangers. Dans les deux cas, le Sénégal ne ferait que s'inscrire dans une mouvance déjà engagée par de nombreux pays comme l'Inde, l'Afrique du Sud et le Nigeria qui ont emprunté avec succès la voie de la réforme de leurs traités d'investissement pour garantir l'effectivité des politiques publiques.
Mouhamadou Madana KANE
Docteur en droit et contentieux international des investissements
19 Commentaires
Redbull
En Mars, 2019 (08:59 AM)Incapable de défendre les intérêts de sa nation
Sur ils s'en profote pour manger l'argent du pays et en ce moment vous retenez khalifa pour corruption menteur que vous etes,dictateur
Liberez khalifa
LIberez khalifa
Un Fils De Diohine
En Mars, 2019 (10:30 AM)Ce serait le sommet de la bêtise humaine! Un crime que les générations futures ne pardonneraient jamais a ceux/celles qui vont laisser passer une telle arnaque!
Le contenu local, communément appelé "local content" est le moyen le plus efficace pour forcer les multinationales qui sont actives dans le secteur a mettre en place des stratégies de mise a niveau des ressources humaines locales, voire les entreprises nationales. Dans tous les pays ou elles opèrent, les "7 sœurs" qui sont les géants du secteur prennent en compte cet élément qui est devenu presque obligatoire dans tous les pays producteurs de pétrole qui se respectent.
L'urgence c'est de former les jeunes dans les métiers du pétrole et gaz, afin que demain, toute la chaîne de production ne soit pas sous l’emprise d'une main d'œuvre expatriée au détriment de milliers de chômeurs sénégalais.
Selon le docteur en droit: "Le caractère salutaire de ce nouveau cadre juridique ne doit pas occulter la nécessité d'une prise en compte des engagements internationaux du Sénégal en matière de traitement, de protection et de garantie des investissements étrangers"
En réponse à la mise en garde ci-dessus; les investisseurs étrangers sont bien conscients du fait que le contenu local est devenu une obligation dans tous les pays qui se respectent. Ceux parmi eux qui essayeront de faire fi de cela ne doivent jamais être autorisés à prospérer au Sénégal.
Gueum sa Boop pour nous sortir de cette clavaire que vive le pays
Thiessois
En Mars, 2019 (13:34 PM)Babacar
En Mars, 2019 (13:35 PM)Les engagements internationaux de l'état priment sur les nationaux ?
Pour quelle compagnie pétrolière tu travailles ?
Total ?
Un Fils De Diohine
En Mars, 2019 (13:37 PM)Malgré tout, le contenu local est et reste une nécessité!
Germany
En Mars, 2019 (13:55 PM)Assez de preuves que vous ne verrez rien de ces ressources.
Ils vont construire des trucs ca et la ou vous n 'habiterez jamais. Des hotels pour baiser avec leurs troupe vos filles ou soeur. Enrichir certain babouins. Ouzin keita ou bien mame gor.
Les tombes mort: tata..jakarta car rapide existeront toujours . Les agressions et les detournements vont continuer.
En resume votre souffrance va continuer.
A moins que vous soyez des l..ql .
Continuer a rever que idiots affames vont ameliorer votre existance. Qui ne dit rien ne fait rien consent
En effet, l'auteur n'a abordé que l'aspect "investisseurs" alors que le contenu local renferme d'autres aspects très intéressants à mon avis sur, par exemple, la formation, la création d'emplois, les prestations de service et les fournitures locales ainsi que et le renforcement des capacités, voire le transfert de technologies aux entreprises locales.
Par ailleurs, il ne faudrait pas perdre de vue que le Sénégal a dû faire (je n'en sais rien ) du benchmarking auprès de pays "aînés" dans le domaine pour se prémunir.
Et le Conseil constitutionnel, chargé entre autres, de veiller sur la constitutionalité des lois et de la conformité des lois par rapport aux traités internationaux qu'a-t-il dit relativement à cette loi sur le contenu local quand il a été saisi à cet effet ?
Damel Fall
En Mars, 2019 (16:41 PM)VOILA ON ON NIQUE LES AFRICAINS.AUCUN PAYS SOUVERAIN ET PARTICULIÈREMENT OCCIDENTAL N'ACCEPTE CECI.IL NE L'APPLIQUE QUE POUR SPOLIER UN PAYS AFRICAIN OU METTRE CES LEADERS EN PRISON.
Foyer
En Mars, 2019 (18:33 PM)Être des actionnaires
Être des directeurs
Être des techniciens
Être des employes
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