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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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[ Contribution ] FMI et L'AFRIQUE : A la croisée des chemins

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[ Contribution ] FMI et L'AFRIQUE : A la croisée des chemins

Le Fonds monétaire international (Fmi) s'est encore retrouvé au devant de la scène dans l'actualité  des média de cette semaine au Sénégal, à travers une tentative de «corruption- cadeau»  selon cette institution ou alors de «cadeau de la corruption» selon les d(él)ires du président Wade. Toutefois,  Cadeau et/ ou Corruption ont un même dénominateur commun : le « C ». Et le système du  Capitalisme (encore un autre « C», le Fmi et la Banque mondiale  ainsi que le régime de l'Alternance au Sénégal sont d'obédience libérale) prend en charge moins leur contradiction que leur conciliation dans le cadre d'une Economie de marché.   Ceci étant, les Etats africains,- surtout ceux au Sud du Sahara- ont les coudées franches pour ne plus devoir grand-chose au titre de leur Dette envers le Fmi pour   lui opposer de nouveaux types de business, au moment où le FMI connait une triple crise et va directement vers une restructuration/refondation. Et pour cause :

Le  Fmi et la Banque mondiale  ont vu le jour en 1944 des flans des Etats- unis et de l'Europe. Juste à la veille  de la fin de la seconde guerre, face  au vaste chantier de la reconstruction de l'Europe, combiné à une faible circulation internationale des capitaux, le Fmi avait été crée pour  deux missions : s'assurer que chaque pays respecte la parité de sa monnaie d'une part ; et d'autre part, permettre à un pays ayant un déficit de sa balance de paiement ( l'écart qui existe entre les importations et les exportations), de continuer à faire du commerce, en bénéficiant de ses prêts,  à condition d'adopter des mesures permettant un rééquilibrage de ses échanges. Le Fmi percevait  ses ressources par le versement par les Etats membres au prorata (en fonction) de leur poids dans l'économie mondiale, en contre partie d'un droit de vote (les Etats unis à eux seuls détenaient  16,8% des droits de votes).

A la fin des années  70, les pays européens pour lesquels le Fmi  avait été crée en premier lieu n'avait plus besoin de ses fonds en raison d'un développement de leur marché financier et d'un marché mondial du capital  aux conditionnalités plus souples. Pour trouver  les moyens de sa survie, le Fmi va se tourner vers les Pays en voie de développement (Pvd) pour devenir  un gestionnaire de la crise découlant de leur endettement excessif   et n'a dû sa survie qu'à l'endettement excessif des Pvd. En prêtant aux Pvd à un moment où  aucun agent économique ne voulait leur prêter des capitaux, le Fmi est devenu le prêteur en dernier ressort de ces Pvd dont notamment les  Etats  africains, en leur imposant en contre partie, un certain nombre de pratiques d'obédience libérale telle que la déréglementation, la privatisation et la dévaluation,  emballées dans le concept de Plan d'ajustements structurels. Avec le retour de la croissance dans  les années 1990- 2000, les  Pvd devenus entre temps des Pays pauvres très endettés  (PPTE) selon toujours les termes du Fmi,  ont fini, pour la plupart d'entre eux, à surmonter cette crise de la dette  et à rembourser le Fmi en une décennie.  C'est à cette date (2000) que le Fmi est  entré  dans une triple crise.

D'abord dans une crise de légitimé, dans la mesure où on peut se demander à quoi sert une institution dont la mission est d'accorder des prêts aux pays en difficultés si les pays Pvd ne sont plus en difficulté (car, le problème dans  ces pays est plus une question de Mal Gouvernance économique que de pauvreté) et  que dans les pays développés, le financement du déficit de leur balance  de paiement se fait à travers le Marché financier international. D'ailleurs, l'encours des prêts (les montants prêtés)  par le Fmi  aux  Pvd est passé de 60 milliards de dollars en 2004 à 16 milliards de dollars en 2008.

Ensuite, à cette crise de légitimité, s'agrège une crise de représentativité, dans la mesure où les pays développés détiennent 69% des droits de vote alors que le Fmi fait l'essentiel  (80 %) de ses opérations dans les  PPTE  et survie grâce aux ressources tirées du  remboursement de la dette et de ses intérêts dûe par les PPTE. La réforme adoptée en 2008 n'a fait que superficiellement corrigé le droit de vote mais n'a rien résolu fondamentalement.

Enfin, le Fmi doit surmonter une crise d'efficacité, car de plus en plus , des voix se font entendre, à l'intérieur même de la « boite » pour dire que l'échec  des Plans d'ajustements structurels sont à l'origine de toutes les crises politiques et sociales en Afriques. Des voix  se lèvent aujourd'hui pour  prendre le Fmi, responsable de la déréglementation des marchés de capitaux imposés  dans la crise financière asiatique en 1997 et sur la pertinence des remèdes proposés.

Aussi paradoxalement que cela puisse  paraitre, la crise de 2008 a renforcé la présence du Fmi sur la scène internationale,  en venant en aide à l'Island pour 2 milliards de dollars, à l'Ukraine pour  16 milliards et à la Hongrie pour 13 milliards au cours du second semestre 2008 (l'Afrique s'est davantage tournée vers la BAD pour faire face à la crise). Au lendemain de la crise des « subprimes », tous s'accordent sur la nécessité d'une régulation de la finance mondiale. Le Fmi jouera t-il ce rôle ? On n'en sait pas trop pour le moment.  Et c'est là que son directeur général,  Dominique Strauss- Kahn « DSK »,   souhaite prendre la balle au rebond en instituant à l'image de l'Organisation mondiale du Commerce, une sorte de « cour de justice » pour que le Fmi ne reste toujours pas  à jouer les sapeurs pompiers à travers le monde. De ces missions de correction et de rectification, DSKM veut adjoindre au Fmi, une mission de  prévention, de détection et de sanction. Mais, beaucoup d'Etats sont hostiles à l'idée  de règles financières contraignantes. Les Etats unis n'imaginent même pas que le Fmi puisse expertiser leur système financier,  là où les pays émergents expriment des réserves et réticences à une organisation qui les laisse peu de place. Dans un contexte où le Fmi cherche de la compagnie et que les Pvd cherchent là où passer la nuit, les PPTE doivent éviter  adopter le reflexe de cet ancien esclave, qui, même après avoir été  affranchi par son ex maitre,  lui revient de son propre gré,  car incapable de penser, d'agir et d'innover par lui-même et pour lui même, en  dehors des routes, chemins et trajectoires que son ex maitre lui avait tracé et des chaines de servitudes  qu'un accident de l'Histoire l'avait cloué au pilori.

Et c'est justement, aujourd'hui plus que jamais, que les pays africains-surtout au Sud du Sahara- doivent  éviter l'approche bilatérale (un seul Etat qui traite directement avec le Fmi) dans leurs relations d'affaires avec le Fmi pour le substituer à une approche multilatérale (sous régionale).  C'est dans ce cadre seulement que les Pvd pourront jouer de tout leur poids pour exiger du Fmi qu'il en fasse autant qu'il en avait fait avec les pays développés, pour les permettre de s'affranchir de « l'Aide ». Par exemple,  en s'affranchissant de « ces machins » pour reprendre les termes de De Gaulle, les Pvd  pourront attaquer les Marchés financiers pour financer leur croissance et  taper à la porte des pays émergents. Car, il est de l'Economie comme il est de  la vie. Point de rupture. Sans quoi, face au déséquilibre des forces  en présence, le Fmi  entrainera les PPTE dans une nouvelle spirale d'endettement en appliquant la politique du « hôtes toi que je m'y mette)  qui consiste à  demander  à ces Etats de se désengager de leur secteur privé productif par la  libération et la  privatisation tous azimuts,  pour y installer sa nièce, la Société financière internationale ( SFI), elle-même fille de la Banque Mondiale. Entre les institutions du Brettons Woods, c'est le même marteau qui frappe, on ne fait que raccourcir la manche.

Mohamadou SY « Siré » 

siresy@gmail.com

Journaliste économique et financier / Conseiller en Intelligence économique



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