La coupe est vraiment pleine. Me Wade, notre président bien aimé déclenche les hostilités tous azimuts avec les bonnes volontés qui viennent lui parler du climat politique délétère. Me Wade rabroue les enseignants grévistes et les renvoie à une plainte auprès du Bureau International du Travail (BIT) et du Conseil des Droits de l’Homme (CDH). Me Wade déclare après que Dakar est plongée dans le noir depuis plusieurs jours qu’il ne le savait pas : de son Palais, il ne voit qu’abondance et lumière. Comme si cela ne suffisait pas, le Premier ministre que Me Wade s’est (librement ?) choisi fait dans la surenchère après le Maître et un ministre. Si notre président bien aimé nous a habitués à se comporter en monarque républicain à nos dépends, malgré ses dénégations, si l’on peut pardonner à un ministre qui manie beaucoup le premier degré de traiter les enseignants de « terroristes et de criminels », il est parfaitement inadmissible qu’un Premier ministre qui se réclame d’une formation universitaire et d’une maturité intellectuelle se comporter comme le premier quidam venu. Mais on le sait, la place chèrement acquise au prix de mille sacrifices et tout aussi chèrement gardée au prix de mille couleuvres avalées, vaut bien une messe. Il faut à notre Premier ministre sans génie et sans charisme mettre son pas dans le sillon tracé par le Maître sinon…
Sinon un accident de parcours est vite arrivé. Du genre de ceux qui arrivent lorsque l’on est un Premier ministre en goguette en Afrique du Sud. Ou lorsque l’on manque de solidarité, de coopération, d’affinités et de complicité avec les intérêts supérieurs de notre président bien aimé. Même en prenant en compte ces considérations, il est navrant que le Premier ministre du Sénégal se laisse aller à ce genre de penchants qui n’honorent pas la classe de nos gouvernants. Nous aurions compris qu’il prenne le contre-pied des attitudes belliqueuses et inconséquentes de la plèbe politicienne. Cela aurait été plus utile pour les intérêts du gouvernement et pour la résolution de l’épineux problème de l’actuelle crise scolaire. D’autant plus, que comme l’a affirmé notre président bien aimé, au Palais on s’y connaît en crises et en grèves pour les avoir provoquées et nourries du temps du « sopi », du propre aveu de Me Wade devant le comité du Pacte républicain. Bon, on ne se refait pas. En tous cas, l’avantage dans cette imprégnation présidentielle de la politisation des mouvements de grève, est que notre président bien aimé connaît les deux côtés du problème et par conséquent la solution à la crise. La nouveauté est que maintenant, il se trouve du côté où cela est le plus embêtant. Où l’on ne se contente plus de faire monter les enchères pendant que la situation pourrit. Il faut négocier et trouver un arrangement vite, très vite.
En revanche, ce n’est pas le souci de trouver une solution rapide et durable qui anime nos gouvernants dans la grave crise énergétique qui nous plonge à nouveau dans le noir le plus complet. Non seulement les coupures de courant s’aggravent, mais c’est la lumière qui devient l’exception dans notre pays. En temps normal et dans une démarche rationnelle, les délestages sont remarquablement programmés de sorte que le préjudice subi par les consommateurs est moindre et supportable dans une certaine mesure. Le consommateur commence à s’habituer à une situation exceptionnelle par le fait d’une gestion efficace. Mais au Sénégal, cette rationalité n’est même pas à notre portée. Dans le quartier de Sacré Cœur 3, depuis une semaine les délestages sont devenus cauchemardesques. Il n’y a pas d’électricité de toute la journée et la nuit, le courant ne revient que pour une période de cinq à dix minutes. Bien entendu, en cas de survoltage, la SENELEC ne vous remboursera pas un seul centime bien qu’il y ait un service qui gère les préjudices causés par la société aux appareils des consommateurs. Ce n’est pas le moindre mal. Les aliments détériorés par les longs délestages ne sont pas non plus remboursés. Au consommateur de trouver sa propre solution personnelle. Ce que les citoyens ont commencé à faire pour ceux qui en ont les moyens : chacun produit sa propre énergie électrique. Mais les autres, la majorité des citoyens, ceux qui n’ont pas les moyens de s’acheter un générateur électrique ?
Notre gouvernement ne semble pas conscient des priorités actuelles. C’est normal d’ailleurs, nos ministres sont en vacances. C’est normal, ils ont besoin de repos : trop de voyages en first class, trop de caviar, trop d’euros. Tout cela fatigue. Notre président bien aimé, qui n’a pas encore officiellement pris ses vacances, n’est pas manifestement au courant. Ou alors il fait semblant. Si l’on en croit nos confrères du « Quotidien », notre président bien aimé a déclaré à propos de la pénurie énergétique qui règne sur le Sénégal : « je ne suis pas au courant. Je ne le ressens pas au Palais. Peut-être que c’est une stratégie de la SENELEC ». Dans une première lecture, le chef de l’Etat n’est pas informé de l’obscurité qui règne dans le pays qu’il est censé diriger. Il n’est pas informé ni officiellement par les canaux gouvernementaux et de l’Etat. Il n’est pas non plus informé par des canaux officieux ou non étatiques. Cela voudrait dire que la grave situation dans laquelle les citoyens et les entreprises pataugent lui aurait été parfaitement et délibérément cachée. Cela voudrait dire également que le chef de l’Etat serait l’otage de ses services et de ses collaborateurs qui lui cacheraient la vérité sur l’état de la nation. Et que par aucun autre canal, il ne pourrait prendre la bonne info. Surréaliste.
Dans une seconde lecture, l’ignorance affichée du chef de l’Etat serait une stratégie de contournement du mécontentement de l’opinion publique devant la carence des services de son gouvernement à satisfaire une demande normale. La réaction de Me Wade serait une simulation et un moyen de diriger la colère citoyenne sur ses collaborateurs dont le premier ministre et le ministre de l’Energie qui se trouvaient à ses côtés. Ce qui pourrait expliquer la sourde contrariété constatée par notre confrère sur la personne du Premier ministre et l’hésitation qu’il a par ailleurs notée sur le ministre de l’Energie. Dans tous les cas, cela corrobore le jugement « d’irresponsabilité, d’incurie et d’incompétence » dont le bureau politique d’un parti de l’opposition vient de porter sur la gestion des libéraux au pouvoir.
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:37 PM)Participer à la Discussion