« Tout pouvoir sans contrôle rend fou »
ALAIN
L’estocade était, semble-t-il, bien méritée pour tous les commentateurs qui avaient osé s’aventurer sur le terrain glissant de la « haute finance », délateurs impertinents qui n’ont cessé de fustiger la ribambelle de milliards alloués au « Fesman ». Abdoulaye Wade ne pouvait laisser prospérer un tel mensonge. C’est le président de la République qui porte lui-même la contradiction, tout étonné qu’il est que des sujets « ignorants » se mettent à inventer des chiffres pour nuire à sa manifestation. Il avait la voix si haute, le parler si sincère qu’il avait réussi à arracher à tous ceux qui se donnent un malin plaisir de le critiquer toutes les semaines, un sentiment de culpabilité et un zeste de compassion. « Le Fesman n’a coûté que cinq milliards de francs, avec la contribution de nombreux pays africains », a-t-il martelé, en sortant de l’inauguration du Musée « Khelcom ». Finita la comedia, le président de la République a parlé. Les dizaines de milliards de budget, les de tonnes de matériel de musique, les milliers d’invités payés, logés dans les hôtels, les 15 milliards de rallonge octroyés par les banques de la place n’étaient donc que du galimatias mensonger.
Hommes malveillants, commentateurs de petite semaine et méchants détracteurs du visionnaire de Kébémer, vous voilà mis à nu par l’homme providentiel que vous tentiez de dénigrer injustement. Les experts en communication de « Sa suffisance » ne tarissent pas d’éloges flatteurs, face à la rapidité avec laquelle « le vieux » a fait taire la polémique et rétabli « la vérité ». Cette « reprise en main » ne s’est pas démentie pendant cette fin d’année. Dans son discours de nouvel an, le rhéteur a confirmé son savoir-faire communicationnel: en dix ans, il a doublé le revenu par habitant, sorti les Sénégalais de la pauvreté, redonné du travail à ceux qui n’en avaient pas, ce que Senghor et Abdou Diouf n’ont pas réussi en quarante ans. Il s’en faut de peu pour que le Messie se mette à ressusciter les morts, à guérir les malades et à multiplier les galettes de pain. Et voilà que pris entre son fauteuil et son écran et son téléprompteur, il se laisse pousser par son enthousiasme débordant, au point d’oublier ses déclarations de l’avant-veille. La tâche que sa fille a voulu réserver à ses subalternes, il s’en est chargé humblement, réservant des paragraphes entiers au Fesman, relatant ses exploits individuels que ses thuriféraires répètent inlassablement comme un chant de chorale : « organiser le Fesman, 33 ans après Senghor, c’est cela son génie », dixit Serigne Mbacké Ndiaye. Il fallait en venir aux retombées économiques, et le bienfaiteur de l’avenue Senghor ne s’est pas laissé impressionner par les nombreux reports, les couacs, le courroux des artistes et les moqueries des invités. Il se félicite à leur place « des dizaines de milliards de revenus distribués aux artistes, à leurs orchestres, leurs danseurs et leurs collaborateurs » (sic). Vous avez bien lu. Pas « cinq milliards », mais « plusieurs dizaines de milliards ».
Le chef de l’Etat se félicite que nous ayons payé des dizaines de milliards de francs à des musiciens étrangers, à leurs danseurs, à leurs accompagnateurs, pendant que ceux du Sénégal étaient mis devant le fait accompli et sommés de se produire gratuitement. Mais plus que son aveu, étaler des contrevérités d’une façon aussi frivole à deux jours d’intervalle est indigne d’un chef d’Etat. Sa mise en scène est d’un comique consommé, mais la gravité de la situation m’empêche d’en rire. Je me suis imposé le travail fastidieux qui a consisté à comparer ses discours des années passées à celui de cette année. Le résultat a été parfois effarant. Dans bien des cas, il a jugé que réfléchir était trop fatiguant, et s’est contenté de faire du copier-coller. Dans son discours de 2007, il déclare : « En sept ans, nous avons, entre autres changements qualitatifs, réalisé 500 collèges, 39 lycées, 7 écoles de formation d'instituteurs, 3 Universités et 273 Cases des Tout-Petits. Dans son discours de cette année, « sept ans » devient « dix ans ». Il arrive parfois qu’il fasse l’effort de déplacer les mots, pour dire la même chose, appeler les Sénégalais à la patience : « J'ai conscience des frustrations légitimes des consommateurs et des pertes en compétitivité pour les entreprises, occasionnées par les perturbations dans la fourniture d'électricité… » C’était il y a trois ans. Il annonçait, sans battre un seul cil, qu’ « au plan intérieur, le Gouvernement s'attelle fermement à augmenter notre production nationale d'énergie, de façon durable, par divers moyens dont l'énergie atomique pour laquelle nous avons décidé d'envoyer des jeunes en formation à l'étranger ». A des journalistes de France 2 qui l’ont interrogé sur la faisabilité de son projet de centrale atomique, il avait donné un délai de trois mois pour les « les centrales atomiques mobiles ».
Il y a trente ans, Senghor nous présentait un discours d’adieu de la même tonalité. Le Sénégal était dans de bonnes mains, nous allions devenir un pays producteur de pétrole, avec des gisements découverts en Casamance. Le petit enfant que j’étais n’a jamais pardonné à ce faux Père Noël ses mensonges grossiers. Le discours d’Abdoulaye Wade me donne la même impression d’un échec inavoué. Dès la prise de fonction de son successeur, le président de la Cour suprême de l’époque, Kéba Mbaye, est sorti de son rôle, pour dire avec courage : « Les Sénégalais sont fatigués. » En réalité, depuis ce jour, la souffrance n’en était qu’à ses débuts. Nous venions d’engager la période la plus pénible de notre histoire, avec les politiques d’ajustement structurel qui ont envoyé plus de 50 000 travailleurs au chômage. En 1995, la Banque mondiale et le Fmi ont été obligés de revoir leurs dogmes. Au lieu de se traduire par un mieux être, la politique d’ajustement a aggravé la misère, avec 57% de pauvres au milieu des années 90. C’est cette misère sociale qu’Abdoulaye Wade a su exploiter pour prendre le pouvoir, rien d’autre.
Le mieux être économique que nous avons ressenti par la suite, et qui a tardé à se manifester jusqu’au début des années 2000, procède du mea-culpa de ces institutions et du talent d’un de nos plus brillants économistes, Mamadou Lamine Loum. Abdoulaye Wade n’a fait que récolter les fruits de son labeur et de nos sacrifices. Déclarer que nous nous portons mieux est une contrevérité. Entre 1997 et 2005, nous avons eu des taux de croissance largement supérieurs à notre croissance démographique, autour de 5%. Mais depuis qu’on nous parle de croissance accélérée, précisément en 2005, notre économie ne cesse de reculer, pour s’approcher de zéro. Ce serait donc un miracle messianique qu’au moment où les investissements étrangers baissent du fait de la crise mondiale, au moment où nous réalisons nos plus mauvaises performances économiques, au moment où notre agriculture est au plus mal, Abdoulaye Wade annonce l’éradication de la pauvreté. Au contraire, il a géré l’économie du pays avec une telle irresponsabilité que nous n’avons tiré aucun bénéfice de l’annulation de la dette. Son traitement sera le plus grand défi pour ceux qui arriveront après lui. Il lance à tout va des emprunts obligataires de plusieurs centaines de milliards, saigne les plus pauvres pour enrichir sa caste d’affairistes. Jésus de Kébémer ne marche pas sur l’eau, il marche sur l’or. Il prend aux pauvres, s’en met dans les poches et donne le reste aux riches. C’est un des traits de son génie.
Il y a eu des réalisations dans ce pays, c’est un fait. Mais nous ne pouvons pas oublier les détournements massifs, les crimes économiques impunis. L’argent collecté, qui ne relève d’aucun miracle économique, a enrichi les plus riches et appauvri les plus pauvres. Il ne sert à rien de se lancer dans une vaine polémique, sur cette question. Il suffit de se référer aux données fournies par la Direction de la prévision et de la statistique, qui dépend du ministère des Finances. Mais plus vivement, je conseille la lecture d’une étude réalisée par plusieurs économistes, sous la direction de Gaye Dafé, Le Sénégal face aux défis de la pauvreté. Son contenu est révélateur : 20% des ménages les plus riches effectuent 40% des dépenses de consommation, 20% des ménages les plus pauvres n’en effectuent que 8,2%. « Un individu du quintile le plus riche effectue des dépenses de consommation cinq fois plus élevées qu’un individu du quintile le plus pauvre », notent les rédacteurs de ce rapport. Abdoulaye Wade n’a pas créé l’écart entre les riches, il l’a porté à des niveaux qui menacent la cohésion nationale. L’important n’est pas dans la création des richesses, mais dans les politiques de distribution. Nous pouvons assurer un Revenu minimum de solidarité de 50 000 francs aux 200 000 ménages les plus pauvres. Il suffit pour cela, qu’Abdoulaye Wade réduise le budget de la présidence de la République de 10%.
SJD
Hommes malveillants, commentateurs de petite semaine et méchants détracteurs du visionnaire de Kébémer, vous voilà mis à nu par l’homme providentiel que vous tentiez de dénigrer injustement. Les experts en communication de « Sa suffisance » ne tarissent pas d’éloges flatteurs, face à la rapidité avec laquelle « le vieux » a fait taire la polémique et rétabli « la vérité ». Cette « reprise en main » ne s’est pas démentie pendant cette fin d’année. Dans son discours de nouvel an, le rhéteur a confirmé son savoir-faire communicationnel: en dix ans, il a doublé le revenu par habitant, sorti les Sénégalais de la pauvreté, redonné du travail à ceux qui n’en avaient pas, ce que Senghor et Abdou Diouf n’ont pas réussi en quarante ans. Il s’en faut de peu pour que le Messie se mette à ressusciter les morts, à guérir les malades et à multiplier les galettes de pain. Et voilà que pris entre son fauteuil et son écran et son téléprompteur, il se laisse pousser par son enthousiasme débordant, au point d’oublier ses déclarations de l’avant-veille. La tâche que sa fille a voulu réserver à ses subalternes, il s’en est chargé humblement, réservant des paragraphes entiers au Fesman, relatant ses exploits individuels que ses thuriféraires répètent inlassablement comme un chant de chorale : « organiser le Fesman, 33 ans après Senghor, c’est cela son génie », dixit Serigne Mbacké Ndiaye. Il fallait en venir aux retombées économiques, et le bienfaiteur de l’avenue Senghor ne s’est pas laissé impressionner par les nombreux reports, les couacs, le courroux des artistes et les moqueries des invités. Il se félicite à leur place « des dizaines de milliards de revenus distribués aux artistes, à leurs orchestres, leurs danseurs et leurs collaborateurs » (sic). Vous avez bien lu. Pas « cinq milliards », mais « plusieurs dizaines de milliards ».
Le chef de l’Etat se félicite que nous ayons payé des dizaines de milliards de francs à des musiciens étrangers, à leurs danseurs, à leurs accompagnateurs, pendant que ceux du Sénégal étaient mis devant le fait accompli et sommés de se produire gratuitement. Mais plus que son aveu, étaler des contrevérités d’une façon aussi frivole à deux jours d’intervalle est indigne d’un chef d’Etat. Sa mise en scène est d’un comique consommé, mais la gravité de la situation m’empêche d’en rire. Je me suis imposé le travail fastidieux qui a consisté à comparer ses discours des années passées à celui de cette année. Le résultat a été parfois effarant. Dans bien des cas, il a jugé que réfléchir était trop fatiguant, et s’est contenté de faire du copier-coller. Dans son discours de 2007, il déclare : « En sept ans, nous avons, entre autres changements qualitatifs, réalisé 500 collèges, 39 lycées, 7 écoles de formation d'instituteurs, 3 Universités et 273 Cases des Tout-Petits. Dans son discours de cette année, « sept ans » devient « dix ans ». Il arrive parfois qu’il fasse l’effort de déplacer les mots, pour dire la même chose, appeler les Sénégalais à la patience : « J'ai conscience des frustrations légitimes des consommateurs et des pertes en compétitivité pour les entreprises, occasionnées par les perturbations dans la fourniture d'électricité… » C’était il y a trois ans. Il annonçait, sans battre un seul cil, qu’ « au plan intérieur, le Gouvernement s'attelle fermement à augmenter notre production nationale d'énergie, de façon durable, par divers moyens dont l'énergie atomique pour laquelle nous avons décidé d'envoyer des jeunes en formation à l'étranger ». A des journalistes de France 2 qui l’ont interrogé sur la faisabilité de son projet de centrale atomique, il avait donné un délai de trois mois pour les « les centrales atomiques mobiles ».
Il y a trente ans, Senghor nous présentait un discours d’adieu de la même tonalité. Le Sénégal était dans de bonnes mains, nous allions devenir un pays producteur de pétrole, avec des gisements découverts en Casamance. Le petit enfant que j’étais n’a jamais pardonné à ce faux Père Noël ses mensonges grossiers. Le discours d’Abdoulaye Wade me donne la même impression d’un échec inavoué. Dès la prise de fonction de son successeur, le président de la Cour suprême de l’époque, Kéba Mbaye, est sorti de son rôle, pour dire avec courage : « Les Sénégalais sont fatigués. » En réalité, depuis ce jour, la souffrance n’en était qu’à ses débuts. Nous venions d’engager la période la plus pénible de notre histoire, avec les politiques d’ajustement structurel qui ont envoyé plus de 50 000 travailleurs au chômage. En 1995, la Banque mondiale et le Fmi ont été obligés de revoir leurs dogmes. Au lieu de se traduire par un mieux être, la politique d’ajustement a aggravé la misère, avec 57% de pauvres au milieu des années 90. C’est cette misère sociale qu’Abdoulaye Wade a su exploiter pour prendre le pouvoir, rien d’autre.
Le mieux être économique que nous avons ressenti par la suite, et qui a tardé à se manifester jusqu’au début des années 2000, procède du mea-culpa de ces institutions et du talent d’un de nos plus brillants économistes, Mamadou Lamine Loum. Abdoulaye Wade n’a fait que récolter les fruits de son labeur et de nos sacrifices. Déclarer que nous nous portons mieux est une contrevérité. Entre 1997 et 2005, nous avons eu des taux de croissance largement supérieurs à notre croissance démographique, autour de 5%. Mais depuis qu’on nous parle de croissance accélérée, précisément en 2005, notre économie ne cesse de reculer, pour s’approcher de zéro. Ce serait donc un miracle messianique qu’au moment où les investissements étrangers baissent du fait de la crise mondiale, au moment où nous réalisons nos plus mauvaises performances économiques, au moment où notre agriculture est au plus mal, Abdoulaye Wade annonce l’éradication de la pauvreté. Au contraire, il a géré l’économie du pays avec une telle irresponsabilité que nous n’avons tiré aucun bénéfice de l’annulation de la dette. Son traitement sera le plus grand défi pour ceux qui arriveront après lui. Il lance à tout va des emprunts obligataires de plusieurs centaines de milliards, saigne les plus pauvres pour enrichir sa caste d’affairistes. Jésus de Kébémer ne marche pas sur l’eau, il marche sur l’or. Il prend aux pauvres, s’en met dans les poches et donne le reste aux riches. C’est un des traits de son génie.
Il y a eu des réalisations dans ce pays, c’est un fait. Mais nous ne pouvons pas oublier les détournements massifs, les crimes économiques impunis. L’argent collecté, qui ne relève d’aucun miracle économique, a enrichi les plus riches et appauvri les plus pauvres. Il ne sert à rien de se lancer dans une vaine polémique, sur cette question. Il suffit de se référer aux données fournies par la Direction de la prévision et de la statistique, qui dépend du ministère des Finances. Mais plus vivement, je conseille la lecture d’une étude réalisée par plusieurs économistes, sous la direction de Gaye Dafé, Le Sénégal face aux défis de la pauvreté. Son contenu est révélateur : 20% des ménages les plus riches effectuent 40% des dépenses de consommation, 20% des ménages les plus pauvres n’en effectuent que 8,2%. « Un individu du quintile le plus riche effectue des dépenses de consommation cinq fois plus élevées qu’un individu du quintile le plus pauvre », notent les rédacteurs de ce rapport. Abdoulaye Wade n’a pas créé l’écart entre les riches, il l’a porté à des niveaux qui menacent la cohésion nationale. L’important n’est pas dans la création des richesses, mais dans les politiques de distribution. Nous pouvons assurer un Revenu minimum de solidarité de 50 000 francs aux 200 000 ménages les plus pauvres. Il suffit pour cela, qu’Abdoulaye Wade réduise le budget de la présidence de la République de 10%.
SJD
17 Commentaires
Baaab
En Janvier, 2011 (07:26 AM)Yarimaayo
En Janvier, 2011 (07:29 AM)As
En Janvier, 2011 (07:30 AM)Rog
En Janvier, 2011 (07:36 AM)Village De Mbour
En Janvier, 2011 (07:45 AM)Ofks
En Janvier, 2011 (07:53 AM)inchalah la veritee triomphera
Alioune Faye
En Janvier, 2011 (08:16 AM)Ndell
En Janvier, 2011 (08:29 AM)Kante
En Janvier, 2011 (10:27 AM)jule le senegal pri pour toi
Ababacar Ndiaye
En Janvier, 2011 (14:36 PM)Et Nous Africains
En Janvier, 2011 (15:19 PM)Ouly
En Janvier, 2011 (18:28 PM)Guerrier
En Janvier, 2011 (18:29 PM)Jabysy
En Janvier, 2011 (10:57 AM)Asnnam
En Janvier, 2011 (11:36 AM)!!!!!!!!!!!!!!
En Janvier, 2011 (00:22 AM)Repens toi et reprends toi sur ce coup là c'est une bourde monumentale!
Le reste de l'article me semble correct et pertinent
Boy-el-hadji
En Janvier, 2011 (20:36 PM)soulayemane,jules,diop-abdoulaye,wade,sa,baye,yade,kone,nake,bouko,fontoo
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