Les jalons durables de l’émergence passent par une autosuffisance en riz en 2017, assure le président Macky Sall, qui présidait, hier, un Conseil présidentiel sur la question. Et il y a de « bonnes raisons » de croire que ce challenge est à portée de main, à commencer par le potentiel agricole (terres rizicoles, ressources en eau…) dont dispose le Sénégal.
Le président de la République, Macky Sall, a présidé, hier, un Conseil présidentiel consacré au Programme national d’autosuffisance en riz (Pnar). A cette occasion, il a rappelé son ambition de parvenir à une « autosuffisance totale » en riz en 2017. Un challenge « largement à notre portée si toutes les parties prenantes s’engagent dans la même direction et s’il y a une synergie de tous nos efforts », invite-t-il, assurant que l’Etat respectera ses engagements. « Nous sommes pleinement engagés dans la politique d’autosuffisance en riz au Sénégal », assure Macky Sall. Il appelle à une mutualisation des moyens pour atteindre cet objectif stratégique. « Il faut aussi que les consommateurs s’y mettent [en consommant le riz local] pour que nos efforts ne soient pas vains », ajoute-t-il.
Auparavant, Macky Sall avait rappelé sa vision, dans le Plan Sénégal émergent (Pse), de faire de l’agriculture le moteur du développement économique et social du Sénégal et de poser les jalons durables de l’émergence. Mais, pour lui, le défi de l’autosuffisance alimentaire est d’abord et avant tout une question de souveraineté nationale. C’est pourquoi, il invite l’ensemble des acteurs (producteurs, commerçants, secteur privé, partenaires techniques et financiers, etc.) à mener ce combat à caractère stratégique. « Le riz est d’une importance capitale compte tenu de sa place dans les habitudes alimentaires des Sénégalais. Ma tournée économique, en octobre dernier, dans la vallée du fleuve Sénégal, m’a permis d’avoir la même vision et la même analyse du contexte que les producteurs : malgré les efforts de l’Etat, nous continuons à consacrer des sommes énormes à l’importation de riz [la production locale ne représentant que le tiers des besoins de consommation]. Cette situation ne peut plus durer », martèle Macky Sall. C’est, dit-il, le sens qu’il faut donner à ce Conseil présidentiel destiné à la consolidation des acquis.
Des fonds de garantie et de commercialisation parmi les mesures
Parmi les mesures prises hier lors du Conseil présidentiel sur le riz local, on note la mise en place d’un fonds de garantie d’un montant de trois milliards de FCfa pour les riziers afin de faciliter les conditions d’éligibilité au financement du crédit agricole, l’indexation des autorisations d’importation de riz à terme à l’achat d’un quota de riz local. Aussi, il est prévu un fonds de commercialisation d’un montant de cinq milliards de FCfa qui servira à faciliter l’accès au financement aux acteurs de la chaîne de valeur et pour renforcer les capacités d’intervention de la Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal (Cncas)
Des contraintes à lever
L’atteinte de l’autosuffisance en riz en 2017 est conditionnée à la levée d’un certain nombre de contraintes, estime le président de la République. Au premier rang de ces contraintes, figure le coût élevé de l’énergie pour toute la chaîne de valeur (production, transformation). La deuxième contrainte majeure réside dans les difficultés de commercialisation. Les autres contraintes évoquées par le président de la République, dans son introduction, ont trait à la vétusté des aménagements hydro-agricoles, au déficit en matériel et équipement agricoles, à l’insuffisance des infrastructures de stockage et de conditionnement. Le directeur général de la Saed, Dr Samba Kanté, ajoute d’autres contraintes telles que l’enclavement des zones de production, la divagation des animaux, la prolifération des végétaux aquatiques et la pression aviaire et foncière.
450 tracteurs à réceptionner d’ici à fin mars
Le président de la République a révélé, au passage, que le gouvernement devrait réceptionner, d’ici à la fin du premier semestre 2015, 450 tracteurs munis de leurs accessoires, ainsi que 65 batteuses, lot qui devrait être suivi par d’autres livraisons. Outre ce matériel, l’Etat a déjà pris en charge les équipements d’irrigation, tout en insistant sur la qualité. Il rappelle que, parallèlement, 183 groupes motopompes ont été distribués, qui devront être complétés d’ici à la fin du premier semestre 2015 de 530 groupes motopompes. Le besoin de financement de la filière est estimé à 424 milliards de FCfa d’ici à 2017 : 25 % (106 milliards) de part de l’Etat, 40% (167 milliards de FCfa) devant provenir des partenaires techniques et financiers et les 35 % du secteur privé et des exploitations familiales.
SOLIDARITE NATIONALE, ARMEES, HOPITAUX, INTERNATS… : Désormais, les structures de l’Etat seront approvisionnées à partir du riz local
Parmi les mesures adoptées à l’issue du Conseil présidentiel sur le Programme national d’autosuffisance en riz, figure la décision d’approvisionner, désormais, les structures de l’Etat, notamment la direction de la Solidarité nationale, à partir de la production locale. Un fonds de commercialisation d’un montant de cinq milliards de FCfa sera aussi créé pour faciliter l’accès au financement des acteurs de la chaîne de valeur
Au titre des recommandations spécifiques, on peut citer, s’agissant de l’électricité, afin de rendre le riz local plus compétitif, le ministre de l’Energie, en rapport avec celui de l’Economie, des Finances et du Plan, ainsi que le ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural, étudieront les modalités d’allègement de la facture d’électricité pour les acteurs de la chaine de valeur de la filière. Il s’agit d’abord de la suppression de la prime-fixe pendant la période de non production et d’étudier, pour la période de production, les possibilités d’allègement. S’agissant de la commercialisation, les ministres de l’Economie, des Finances et du Plan, des Forces armées, de la Santé et de l’Action sociale, de l’Intérieur, de la Justice ainsi que celui de l’Enseignement supérieur et de l’Agriculture veilleront à l’application des mesures suivantes : la systématisation de l’approvisionnement des structures de l’Etat, notamment la direction de la Solidarité nationale qui dépend de la Présidence de la République, à partir de la production locale. Le président de la République se veut clair : « Plus de riz importé pour la Solidarité nationale, ainsi que les cérémonies religieuses où l’Etat intervient ! ». De même, l’armée, les hôpitaux, les internats, etc. devront, désormais, s’approvisionner en riz local. Par ailleurs, Macky Sall insiste sur la qualité de l’emballage pour convaincre les Sénégalais à acheter le riz local, les appelant à un sursaut national.
En outre, les ministres des Finances et de l’Agriculture veilleront à une prise en charge correcte des contraintes relatives à la vétusté et à l’insuffisance des aménagements hydro-agricoles et en matériel d’irrigation, ainsi qu’à l’insuffisance des infrastructures de stockage et de conditionnement. Le chef de l’Etat appelle aussi à lutter, de façon plus vigoureuse, contre les végétaux aquatiques et la pression aviaire. La dernière mesure concerne la subvention de la culture attelée, ainsi que le matériel motorisé à hauteur de 50 % et l’exonération du matériel et des équipements destinés à la chaîne de valeur riz, surtout pour les intrants entrant dans la transformation du riz. Pour une application stricte de ces recommandations, le président de la République demande au Premier ministre de lui soumettre, à la fin de chaque mois, un bilan détaillé de l’exécution de ces décisions. « Nous abordons un tournant décisif pour l’avenir du Sénégal puisque l’ambition est grande, le délai court, [et qu’]il nous faut donc changer de méthode de travail ».
La production rizicole a augmenté de 28 % en 2014-2015
Le début de la mise en œuvre du Programme national d’autosuffisance en riz a donné des résultats « tangibles », d’après le président Macky Sall. En effet, la production rizicole de cette année est estimée à 430.000 tonnes, soit une augmentation de 28 % par rapport à l’année 2013-2014. Ce qui représente 33 % sur la moyenne des cinq dernières années. Le rendement est de sept tonnes à l’hectare (avec des pics de 10-11 tonnes/ha dans certains endroits). 5 000 tonnes de semences certifiées ont aussi été reconstituées. Le facteur de ce succès, explique le directeur général de la Société d’aménagement et d’exploitation des terres du delta du fleuve Sénégal (Saed), Dr Samba Kanté, réside dans l’appropriation du programme d’autosuffisance en riz par les producteurs, une bonne distribution des intrants et un doublement des crédits alloués par la Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal (quatre à six milliards de FCfa). Reste à gagner le défi de la qualité, comme l’indique le président Macky Sall.
S. KA
2 Commentaires
Mokosska
En Février, 2015 (20:52 PM)Ba
En Février, 2015 (22:29 PM)Les difficultés du monde rural sont de plus en plus récurrentes et relèvent d'un déficit infrastructurel de grande envergure.
Dès lors, ce fond aiderait à acquérir des tracteurs (Moissonneuses-batteuses, faucheuses, décortiqueuses) qui seraient confiés aux comité de Gestion des Coopératives Agricoles pour une exploitation de l'ordre d'une mise en location aux propriétaires terriens des localités agricoles en vue de garantir la mécanisation agricole et un accès à la productivité industrielle des cultures.
Les sommes issues de la location de matériels agricoles sus-mentionnés servirait à l'entretien du matériel et son renouvellement.
La dotation de Moulin à grains et de Borne Fontaine pour les Groupement d’intérêt Économique des Zones non pourvues d'activités économiques pourvoyeuses de revenus serait une action salutaire.
Cette mesure semble beaucoup plus appropriée que les politiques de subventions des matériels agricoles qui sont couteuses et de faible accès du fait des précarités des ressources financières rurales.
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