Noureddine Bhiri, homme fort du parti islamiste tunisien Ennahdha, a été transféré dimanche dans un état grave à l'hôpital de Bizerte, deux jours après son interpellation, selon des militants de son mouvement et des députés.
L'ex-ministre tunisien de la Justice Noureddine Bhiri, homme fort du parti islamiste Ennahdha, a été transféré dimanche 2 janvier dans un état grave à l'hôpital de Bizerte (nord-ouest) deux jours après son interpellation, selon des militants et des députés.
Noureddine Bhiri "est dans un état critique, il est en réanimation à l'hôpital Bougatfa à Bizerte", a indiqué à l'AFP l'avocat et député Samir Dilou, démissionnaire d'Ennahdha.
Après plus de deux jours de silence, Rached Ghannouchi, chef d'Ennahdha et dont Noureddine Bhiri est considéré comme proche, a diffusé dimanche soir une lettre qu'il a adressée au président Kaïs Saïed en lui imputant "la responsabilité de révéler son état, de rassurer sa famille et l'opinion publique".
Il a souligné qu'après les informations sur "la détérioration de l'état de santé" de Noureddine Bhiri, le président Saïed devait "autoriser une équipe médicale et ses avocats à lui rendre visite et le libérer immédiatement".
Ennahdha est au cœur d'un bras de fer avec le président Kaïs Saïed depuis son coup de force du 25 juillet et sa décision de suspendre le Parlement que ce parti contrôlait depuis une dizaine d'années.
"Noureddine Bhiri vient d'être transféré à l'hôpital de Bizerte après l'aggravation de son état de santé à la suite de son arrestation et sa détention depuis 48 heures", a expliqué sur son compte Twitter la députée et ex-secrétaire d'État, Saida Ounissi.
Elle a ajouté que Noureddine Bhiri avait été jusqu'à présent détenu "dans un lieu tenu secret, sans aucun mandat d'arrêt, mise en accusation ou autorisation judiciaire".
Lors d'une conférence de presse à Tunis, Mondher Ounissi, médecin et membre du bureau exécutif d'Ennahdha, a indiqué que Noureddine Bhiri souffrait de plusieurs maladies chroniques, dont de diabète et d'hypertension, et prenait habituellement "16 comprimés par jour".
Il a été "privé de ses médicaments" et "sa vie est menacée", a-t-il assuré, appelant "le Croissant-Rouge et les organisations internationales à intervenir" face à "des pratiques inhumaines".
Dans une déclaration à l'AFP, Saïd Ferjani, membre de la direction d'Ennahdha et proche de Noureddine Bhiri, a dénoncé "une situation vraiment dangereuse pour la Tunisie et la région" quand on voit "un ex-ministre traité de cette manière". Il a souligné que son état était "vraiment critique après trois jours sans boire, ni manger, et sans prendre ses médicaments".
L'Instance de prévention de la torture (INPT, autorité indépendante tunisienne) et le parti Ennahdha avaient exprimé samedi leur inquiétude quant au sort réservé à Noureddine Bhiri et à un autre dirigeant d'Ennahdha, Fathi Baldi, arrêté en même temps que lui vendredi matin.
L'INPT et le comité de défense de Noureddine Bhiri, formé notamment par son épouse avocate et d'autres juristes, ont dénoncé le secret autour du lieu de leur détention et l'absence d'explications du ministère de l'Intérieur qui a ordonné les deux arrestations.
Le ministère s'était borné vendredi soir à annoncer deux assignations à résidence, sans donner de noms, faisant état d'une "mesure préventive (qui) a été dictée par la nécessité de préserver la sûreté nationale".
Vendredi, le comité de défense de Noureddine Bhiri avait qualifié son interpellation devant son domicile par des agents en civil de "kidnapping et (de) dangereux précédent qui marque l'entrée du pays dans le tunnel de la dictature".
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