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Afrique

Faut-il craindre une épidémie de la fièvre de Lassa en Afrique de l’Ouest ?

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Un chercheur prélevant des échantillons sur un rongeur dans un village en Sierra Leone en février 2011.

Au Niger, comme au Bénin et au Burkina Faso, les autorités craignent une recrudescence de la fièvre de Lassa en Afrique de l'Ouest, en s'appuyant sur une augmentation des cas observés chez ses voisins. Sylvain Baize, de l'Institut Pasteur de Paris, fait le point sur la réalité de la menace sanitaire.

« Zoom sur un danger de mort », « Bénin : Un homme meurt du virus Lassa à Ségbana », « La fièvre de Lassa a fait 30 morts depuis janvier 2018 au Nigeria »… Depuis le début de l’année, plusieurs médias au Niger, au Burkina ou encore au Bénin ont multiplié les articles inquiets, voire alarmant, faisant planer la crainte de la propagation d’une nouvelle épidémie de la fièvre de Lassa en Afrique de l’Ouest. 

L’inquiétude est d’autant plus forte que la maladie, dans sa forme sévère, peut s’avérer létale (dans 1% des cas observés, selon l’OMS). D’autant que les symptômes de cette fièvre hémorragique virale aiguë sont proches de ceux d’Ebola.

Face à l’inquiétude naissante au sein de l’opinion publique, au Bénin, les autorités se préparent à cette éventualité. Le pays a d’ores et déjà mis en place des campagnes de sensibilisation et installé des salles d’isolement dans les hôpitaux. En 2016, l’épidémie de la fièvre de Lassa y avait fait 54 victimes.

Les autorités sanitaires nigériennes qui, elles aussi, s’inquiètent de cette situation dans ces pays frontaliers, ont rendu public le lundi 29 janvier un communiqué dans lequel elles appellent la population à la vigilance. 

Cette inquiétude est-elle justifiée ? Faut-il vraiment craindre une nouvelle flambée de la fièvre de Lassa en Afrique de l’Ouest ? Sylvain Baize, responsable de l’unité de biologie des infections virales émergentes à l’Institut Pasteur de Paris, analyse pour Jeune Afrique les contours de la situation actuelle et les précautions à prendre pour éviter la contagion.

Jeune Afrique : Plusieurs cas de fièvre de Lassa ont été détectés au Bénin et au Nigeria depuis le début de l’année. Faut-il craindre une flambée de la maladie en Afrique de l’Ouest ?

Sylvain Baize : Le virus Lassa est endémique au Nigeria. Tous les ans, à la même période, on recense à peu près le même nombre de cas. Au 25 janvier 2018, on recensait plusieurs cas dans dix États du Nigeria : 107 cas suspects, dont 67 confirmés, et 16 morts. Ces chiffres sont plus au moins similaires à ceux de l’année précédente.

Le Bénin, jusque-là épargné, voit cette maladie devenir désormais endémique. Une soixantaine de personnes ont été touchées en 2016. L’existence de cas sporadiques n’a rien de surprenante, dans la mesure où de nombreuses personnes circulent entre les deux pays. Elles ont aussi pu être infectées au Bénin. Mais pour le moment, on ignore s’il s’agit de cas autochtones ou importés.

A-t-on une idée du nombre de pays touchés dans la région ?

On peut parler d’une maladie endémique en ce qui concerne le Liberia, la Sierra Léone et la Guinée. Mais, comparé au Nigeria, le nombre de cas est moins élevé. C’est aussi en saison sèche qu’on dénombre plus de malades.

En regardant la carte de l’Afrique, on remarque une chose étonnante : la maladie n’est pas endémique dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, parmi lesquels la Côte d’Ivoire, le Burkina, le Mali, le Bénin et le Togo. On y note juste quelques cas sporadiques.

Les symptômes de la fièvre de Lassa sont similaires à ceux de plusieurs autres maladies, ce qui la rend plus difficilement détectable…

Les signes cliniques au début de la maladie sont similaires au paludisme : fièvre, céphalées, douleurs, etc. Il n’y a pas de test de diagnostic rapide (TDR) à l’instar du paludisme. Avant de pouvoir diagnostiquer une personne résidant en brousse, on perd donc beaucoup de temps. Au final, les signes spécifiques se manifestent dès lors qu’il y a hémorragie.

Quand le personnel soignant est touché, on commence à suspecter des cas de fièvre de Lassa parce qu’il y a eu transmission inter humaine.

Là est le problème avec cette pathologie semblable aux fièvres hémorragiques comme Ebola ou Marburg. Il est difficile de les diagnostiquer rapidement. Par exemple, le premier cas de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014 a été diagnostiqué en mars. Or, c’est en décembre 2013 qu’avait été contaminé le patient zéro. Il s’est écoulé plus de trois mois avant que le diagnostique ne soit posé! Pendant ce temps, personne n’a soupçonné le virus Ebola dont les signes cliniques sont très proches de pathologies beaucoup plus fréquentes.

Comment se passe la contamination ?

Le rongeur de type Mastomys, une espèce africaine, est le réservoir de Lassa. Il vit dans les cases, au village, et se nourrit des aliments stockés par l’homme. Sans compter que ces animaux défèquent dans les habitations et l’homme peut inhaler les selles déshydratées. Il arrive aussi parfois que l’homme mange ce rongeur.

On retrouve les mêmes modes de propagation qu’Ebola. Soit le contact avec les fluides biologiques d’un malade, le plus souvent présent à l’hôpital. Les épidémies sont plus rares avec la fièvre de Lassa dans la mesure où la transmission inter humaine est plus faible.

 

Un mastomys, petit rongeur qui constitue le « réservoir de fièvre de Lassa » en Afrique de l’Ouest (illustration). 

 

Peut-on guérir de la fièvre de Lassa ?

Si vous êtes atteint et admis dans un hôpital avec un bon service de réanimation, vos chances de survie sont considérablement augmentées. Le traitement symptomatique permet aussi de limiter la mortalité.

Comme traitement spécifique pour Lassa, il y a la Ribavirine, dont l’efficacité a été démontrée dans les années 1980. Ce médicament augmente les chances de survie si le traitement est initié juste après le début de la maladie.

Mais sur le terrain, il n’est très souvent pas disponible… Et lorsque le patient est en phase terminale, la Ribavirine n’a plus aucun effet.



1 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Février, 2018 (12:48 PM)
    Quand on vous dit que certains dossiers doivent être traités à l'échelle de l'Afrique de l'Ouest !
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