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Crise au Togo: voici comment Faure Gnassingbé pourrait s’en sortir

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Crise au Togo: voici comment Faure Gnassingbé pourrait s’en sortir

En Aout 2017, le gouvernement togolais a lancé un projet de réforme constitutionnelle, dont l’un des objectifs est de limiter le nombre de mandat présidentiel à deux. Dans ce pays, où le président Faure Gnassingbé est au pouvoir depuis 2005, cette réforme, dont les soutiens du pouvoir défendent la non-rétroactivité, est dénoncée par l’opposition comme une manœuvre politique pour permettre au président de se représenter aux très attendues élections de 2020.

Le projet de révision de la constitution, soumis par le gouvernement et proposant entre autres la limitation du nombre de mandat présidentiel à deux, n’a pas obtenu la majorité suffisante pour être directement adopté au Parlement, parce que l’opposition a boycotté la séance. Par conséquent, il faudra passer par un référendum si le gouvernement tient à faire passer le projet en l’état. Ce qui serait une véritable gageure dans le climat politique tendu, avec des manifestations à travers le pays.

Perspectives pour une issue paisible

A l’appel de l’opposition, et à plusieurs reprises depuis le 18 septembre 2017, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues de Lomé et dans d’autres villes du pays, pour exiger, entre autres, le rétablissement de la constitution de 1992 qui fixe le nombre de mandat présidentiel à 2.

Ces manifestations présentent plusieurs spécificités dont il faut tenir compte : par exemple, l’unité de l’opposition face au pouvoir, la grande mobilisation des citoyens pratiquement jamais vue avec cette ampleur par le passé, une opposition grandissante au Nord du pays, région d’origine de la famille Gnassingbé et considérée comme le bastion imprenable du pouvoir, etc. 

Tikpi Atchadam, le leader du Parti national panafricain (PNP) a pu mobiliser des manifestations à travers le Nord, notamment à Bafilo, Mango et Sokode.
La réponse du gouvernement, face à cette mobilisation sans précédent de l’opposition et des populations, a jusque-là été de deux ordres. Premièrement recourir à la répression – par exemple pour disperser les manifestants et passer dans les maisons pour les harceler – et interrompre la connexion internet (moyen de mobilisation par excellence aujourd’hui). 

Deuxièmement, introduire de façon unilatérale un projet de loi portant révision de la constitution au parlement et décider d’aller au référendum pour faire adopter l’amendement par le peuple malgré le boycott du processus par l’opposition.

Il faut mentionner que, à part quelques éruptions de violence dans quelques villes ou les participants ont attaqués des commissariats de police et incendié des résidences de membres du parti au pouvoir, les manifestations – de l’opposition comme du pouvoir – sont restées jusque-là pacifiques. Il faut cependant souligner que, mêmes si les manifestations futures n’ont pas la même ampleur que celles des premiers jours, il est difficile de garantir qu’elles seront toujours aussi pacifiques. Surtout si les acteurs politiques n’arrivent pas à s’entendre de manière crédible sur des voies de sorties de crise.

Au niveau régional, beaucoup attendent une réaction de la part de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a été félicitée pour son rôle central dans le règlement de crises politiques similaires dans la sous-région, notamment en Gambie, au Mali, au Burkina, etc. 

Comme cela a été le cas pour les crises ci-dessus évoquées, la CEDEAO peut aider au dénouement de la situation au Togo dans le cadre d’une mission incluant d’autres acteurs tels que le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et la Sahel (UNOWAS) et l’Union africaine. Cette proposition est d’autant plus nécessaire que la CEDEAO est actuellement sous l’égide du Togo et du président Gnassingbé.

Quelques pistes de sortie de crise

Pour sortir de la crise actuelle, il sera nécessaire de créer un environnement permettant aux parties prenantes d’aplanir de manière pacifique leurs divergences. Les points de désaccords sont aujourd’hui de deux catégories : la première catégorie consiste le point de désaccord principal et est liée au maintien ou non du président Faure (qui est dans son 3e mandat présidentiel) au pouvoir et que revendique l’opposition à travers la demande de rétablissement de la Constitution de 1992. 

Cette dernière limite en effet le nombre de mandat présidentiel à 2 et pour l’opposition son rétablissement devrait entraîner automatique l’arrêt de la présidence actuelle de Faure. La deuxième catégorie de désaccords porte sur les autres revendications de réformes institutionnelles (y compris le changement du système majoritaire à un tour pour l’élection du président actuellement en vigueur), la libération des détenus politiques, etc.

La sortie crédible de crise nécessiterait la mise en place d’une plateforme de dialogue entre les protagonistes – e.g. les groupes politiques de l’opposition et de la mouvance – à travers une intervention des acteurs ci-dessus évoqués – i.e. l’UNOWAS, la CEDEAO, l’UA, etc. 

Le dialogue devrait permettre de dégager des solutions politiques, qui obtiennent l’adhésion du plus grand nombre, qui ensuite seront transcrites dans les textes à travers, par exemple, une révision de la constitution. Cette démarche est plus sûre et augmente les chances de déboucher sur des solutions plus robustes que celle actuelle du Gouvernement qui consiste à introduire, de manière unilatérale, des propositions de réformes au Parlement.

Etant donné que le maintien ou non du président Faure Gnassingbé au pouvoir est la véritable pomme de discorde entre les deux parties, le président de la République actuel occupe alors une position centrale dans la recherche de solutions de sortie de crise. Il serait important de lui rappeler qu’il a toujours une option personnelle, qui ne dépend que de lui seul, qui consiste à dire de manière crédible qu’il renonce au pouvoir, par exemple à partir de 2020 si cela peut contribuer à la paix et à la stabilité de son pays.

Au-delà de cette option qui ne dépend que du président Faure, deux autres solutions sont envisageables. Pour le moment les deux camps – la mouvance et l’opposition – maintiennent deux positions qui peuvent être considérées comme extrêmes. Le camp de l’opposition souhaite l’interruption du mandat en cours du président de la République (comme une conséquence immédiate du rétablissement de la constitution de 1992) et la mise en place d’un gouvernement de transition.

Le camp de la mouvance présidentielle pour sa part souhaite une réforme, non rétroactive, qui limite le nombre de mandat présidentiel à deux et qui potentiellement offre la possibilité au président Faure s’il le voulait de se présenter en 2020 et en 2025. 

Entre ces deux options qui risquent de ne pas avoir l’adhésion de tous, il est possible d’envisager une réforme législative qui fixe le mandat actuel du président Faure, soit comme son dernier mandat ou alors comme l’avant dernier mandat présidentiel. Une fois l’accord politique acquis, la question de non rétroactivité de la loi est une question technique que les juristes savent gérer et des exemples existent dans l’histoire politique du continent ou ailleurs.

Au-delà de ce qui précède, une fois que des solutions seraient trouvées et mises en œuvre sur le point principal de désaccord (i.e. le maintien ou non du président Faure au pouvoir), les partenaires au développement pourraient être mis à contribution pour assister le Togo dans la mise en œuvre de réformes institutionnelles qui prennent en compte tous les autres points de revendication et qui contribuent à consolider la démocratie togolaise. Un système d’alerte précoce peut être également nécessaire pour un monitoring effectif de l’évolution de la situation dans le pays afin d’anticiper tout dérapage.

L’avenir du pays dépend fondamentalement de cette population engagée, mais tirera un immense bénéfice des interventions de parties prenantes qui ont un rôle et pouvoir d’influence à jouer.

 



4 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (11:10 AM)
    zq
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  2. Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (11:47 AM)
    Très sage proposition. La balle est dans le camp des acteurs politiques Togolais et de la communauté internationale pour faciliter le dialogue
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (13:23 PM)
    Que Fabre se méfie des fables et du sabre de Tikpi !

    Les différents protagonistes de l’espace politique togolais gagneraient à faire preuve de plus de lucidité, de clairvoyance et surtout de pertinence mais aussi de retenue face à ce qui ressemble à une irruption prétendument spontanée du Parti National Panafricain (PNP) et de son leader Tikpi Atchadam, sur la scène nationale. En politique, il n’y a rien de spontané, encore moins de hasard et de simple coïncidence.

    Jusque-là formation politique sans grande envergure et leader politique au bas de l’échelle, le PNP et son leader entreprennent, depuis quelque temps, un activisme politique débordant qui mérite d’être mis en lumière, non pas seulement en termes de remise en cause du pouvoir en place, mais comme stratégie pernicieuse de relégation à la périphérie des «anciennes» figures de l’opposition.

    Jean-Pierre Fabre, le chef de file de l'opposition, président national de l'ANC, a accueilli favorablement cet appel de Tikpi Atchadam à la mobilisation générale. Ce faisant, l’homme semble plonger, sans discernement ni recul nécessaire, la tête dans une lessive du «Tout contre le pouvoir». Or, la lucidité et la prudence lui recommandent de faire une analyse politique froide du piège qui, pourtant pourrait bien fonctionne dans le discours et les ambitions déclinés du leader du PNP. En effet, les mots ne sont pas innocents, surtout en politique.

    N’est-ce pas Tikpi Atchadam qui, dans sa prétendue «analyse minutieuse de la situation socio-politique de notre pays», parle d’une «nécessité incontournable, celle du renouvellement de la classe politique… » ? Au fond, ce projet du chef de file du PNP, qui ne cesse de clamer que son objectif est la prochaine présidentielle, est aussi une sorte de disqualification surnoise d’une classe politique à laquelle appartient Jean-Pierre Fabre et tous les membres du Collectif dit «Sauvons le Togo».

    Il est à se demander d’ailleurs, ce que Tikpi Atchadam aux prétentions de chiper le leadership politique du président de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), apporte de nouveauté dans son projet et son programme. Pourquoi, diantre, Fabre et ses alliés lui céderaient volontiers le promontoire oppositionnel, alors même qu’il ne réchauffe que leur vieux combat ? Engoncé dans une obsession de s’opposer sans discernement au régime actuel, Jean-Pierre Fabre peut-il ou feint-il ignorer, à moins qu’il n’ait été gagné par l’amertume d’un échec programmé, que le PNP et son leader ne font aucun mystère, comme ils l’ont clairement décliné, de «conquérir le pouvoir et de l’exercer» ?

    C’est dire donc que le président de l’ANC et ses traditionnels alliés sont en train d’offrir à Tikpi Atchadam l’arme par laquelle, demain il les détruira. Toute faute, en politique, se paie cash ! Toute naïveté aussi !

    L’irruption, avec une ambition hégémonique dans l’opposition, risque d’être plutôt un boulet de Jean-Pierre Fabre car, sous les dehors d’un discours virulent et de manifestations ponctuées de violences provocatrices, le leader du PNP cherche en réalité, lui aussi, au-delà de son bras de fer avec le pouvoir, à tenir sa revanche sur un collectif de l’opposition qui l’avait relégué au-bas fond de l’impopularité et de l’insignifiance. C’est un processus de mise à mort politique qui est, au fond, enclenché contre ceux qui incarnent, à ses yeux, l’opposition en «dégénérescence», pour reprendre son mot.

    Autant dire que Fabre doit se méfier des fables et du sabre politique de Tikpi qui risque demain de se retourner contre lui. Cet avertissement attribué à Octave Mirabeau vaut aussi pour lui : «les moutons vont à l’abattoir. Ils ne disent rien eux, car ils n’espèrent rien. Mais du moins ils ne votent pas pour le boucher qui les tuera et pour le bourgeois qui les mangera…»

    Remise au goût du jour de vieilles et sempiternelles revendications politiques, sur fond de recyclage d’une plateforme démocratique formelle, alors même que le Togo a emprunté, sous l’ère du Président Faure, de nouveaux chantiers d’une démocratie économique et de réalisations infrastructurelles, de rénovations de ses piliers touristiques, éducatifs, miniers et de santé, et de la promotion des collectivités locales à travers une révolution silencieuse dans les campagnes, voilà qu’approximations et agendas cachés sont les bréviaires du nouveau chantre de la démocratie.

    Le PNP semble être porteur d’un projet qui n’est point spontané. A bien des endroits, il dégage l’odeur fétide d’une aventure portée en lame de fond par des forces occultes, comme il en pullule aujourd’hui dans un contexte africain de déploiement d’un islamisme radical qui veut régenter l’Afrique et le monde.

    Le spectre d’un islamisme radical

    Au-delà même de Jean-Pierre Fabre et ses alliés, c’est toute la classe politique et le peuple togolais qui sont interpellés. En effet, se pose-t-on seulement la question de l’origine et de la provenance des moyens financiers subits de ce parti et de cet homme qui, jusque-là, ne comptaient que pour gnognotte dans l’échiquier politique et parmi les hommes politiques en vue ? Difficile de croire que les bonnes fées de la providence sont venues spontanément et gratuitement veiller sur le berceau de M Tikpi et lui octroyer tant de moyens financiers !

    Son ascension étonnante doit susciter des interrogations légitimes dans un contexte où, comme ne cessent d’alerter des observateurs avertis, l’Afrique est en passe de devenir un épicentre du terrorisme international porté par de diverses forces islamistes qui ont déjà commis des attentats sanglants au Mali, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso et qui minent la stabilité au Nord du Nigeria. Ces observateurs n’ont pas manqué de relever que, dans leur stratégie de construction d’un Etat islamique en Afrique de l’Ouest et d’établissement d’un califat, des forces islamistes tentent d’infiltrer les sphères des Etats africains via des réseaux politiques dans certains Etats à défaut d’y parvenir à commettre des attentats.

    Aussi n’hésitent-elles pas à sortir de gros moyens financiers pour profiter de situations politiques et sécuritaires fragiles pour parvenir à leurs funestes besognes de conquêtes de pouvoir par procuration. Le cas de la Libye est emblématique des dégâts et cauchemars qu’elles peuvent causer. Dieu en préserve notre Togo !

    On remarquera d’ailleurs que le regain d’activisme politique qui a subitement gagné le PNP et son leader «coïncide» avec l’annonce de la tenue, à Lomé, du 24 au 26 octobre 2017 du sommet Israël. La coïncidence est suspecte à bien des égards dans un contexte où ce rendez-vous ne manque pas de faire grincer des dents dans les milieux musulmans radicaux. Mais cet acte souverain du peuple togolais devra sceller une unité de toute la classe politique, car faudrait-il le rappeler c’est une longue histoire et une vieille tradition de relations diplomatiques qui lient le Togo à l’Israël.

    En tous les cas, rien ne justifie que des fils du Togo soient disposés à faire entrer les loups terroristes armés d’un islam intolérant dans la bergerie alors que le pays a retrouvé sa stabilité, enregistre des performances économiques notables et affiche des perspectives prometteuses. La vigilance et la responsabilité doivent alors être la chose la mieux partagée au sein de la classe politique togolaise.

    C’est aussi le lieu ici de souligner la responsabilité historique du Parti UNIR qui, doit choisir surtout la voie de communication et de l’information sur les réalisations du Président Faure, et comprendre que c’est là l’enjeu fondamental dans le processus du renforcement de sa légitimité, la nécessité de son élan unitaire en vue des prochaines échéances électorales, tout en étant ouvertes à toutes les forces de progrès désireuses de ne pas livrer le pays à des forces obscures et aventureuses.



    Mme Pélagie Lawson

    Etudiante en droit a Ludwigsburg

    R F A



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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (13:42 PM)
    Le plus désolant en Afrique c'est qu'au lieu de faire de la politique de développement, on fait de la politique d'élections.
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