Trois élections se tenaient dimanche 20 mars en Afrique francophone, trois échecs cuisants pour le Président Hollande qui se sépare de sa conseillère Afrique
Première déception, Lionel Zinsou qui fut conseiller de Laurent Fabius à Matignon est largement battu par son rival Patrice Talon. Nommé en juin dernier Premier ministre par le Président sortant Thomas Boni Yayi, Zinsou était programmé pour lui succéder.L’Elysée y croyait fermement et la presse parisienne lui emboitait le pas. C’était sans compter sur l’impopularité du président Boni Yayi au Bénin.
Zinsou partait avec deux boulets aux pieds : l’image de candidat de la continuité et celle de chouchou de la France. L’habile Patrice Talon n’a eu de cesse d’utiliser cet argument pendant sa campagne électorale. A quelques jours du scrutin, Le Monde publie un article sur "les nombreuses casseroles du candidat Talon". Une initiative décrite par le principal intéressé comme une manipulation éclatante des efforts de la France pour imposer "son" candidat. Talon est élu triomphalement président du Bénin.
Autre "candidat de la France", Mahamadou Issoufou n’aura guère briller pendant sa campagne. Le Président du Niger pariait sur "un coup KO" une victoire dès le premier tour. L’Elysée y croyait et la presse française emboitait le pas. L’inexistence de l’opposition paraissait un atout pour Issoufou, elle était en fait sa plus grande faiblesse. Celui qui allait devenir son principal opposant politique était… en prison. Tout comme son Etat-major incarcéré pour une présumée et assez improbable tentative de coup d’Etat. Tout serait rentré dans l’ordre et les opposants auraient sans doute été libérés avec une victoire dès le premier tour, mais au terme du scrutin du 21 février, Issoufou ne passe pas la barre des 50%.
Difficile de garder une image de démocrate face à un candidat prisonnier. L'entre deux tours est en outre le théâtre d’un combat à fleuret moucheté entre les diplomaties française et américaine. Ces derniers n'ont jamais cru au "coup KO" et reprochent aux Français de couvrir la stratégie dangereuse. Le 20 mars, l'Union Européenne constate la baisse de la participation au deuxième tour des élections du Niger et appelle à un "dialogue inclusif" entre les deux camps. Cette déclaration le jour même du scrutin dame le pion à toute tentative de manipulation électorale.
Les Américains emboitent le pas trois jours plus tard. Dans un communiqué daté 24 mars, le Département d’Etat conseille à Issoufou d'ouvrir le dialogue avec ses opposants et «regrette que les différends entre les partis n’aient pu être résolu avant la tenue des élections». Ce qui en langage diplomatique revient à reprocher au Président sortant d'avoir maintenu Hama Amadou et ses lieutenants en prison pendant toute la durée du processus électoral. Cité dans le journal Libération, un diplomate européen compare alors le pouvoir à "un train fou conduit par un pouvoir paranoïaque".
Seul François Hollande ne semble pas percevoir le fiasco de cette élection de cette manière. Plus fidèle à son amitié qu’à ses principes démocratiques, il envoie ce courrier chaleureux pour féliciter son camarade Issoufou. Aucun mot sur l'emprisonnement des opposants ni sur Hama Amadou dont le médecin après avoir alerté l’opinion publique sur le grave état de santé se retrouve… lui-même emprisonné. Hama Amadou est finalement transféré à l'hôpital américain à Neuilly sur Seine pour y être soigné.
Il y apparait très amaigri et affaibli. Son évacuation est aussi le fruit des efforts de diplomates américains qui en proposant de prêter leur hélicoptère pour le transfert du candidat prisonnier ont convaincu les autorités nigériennes à le faire eux-mêmes. Rendue public, la lettre du Président Hollande à son homologue nigérien achève d’ulcérer l’opposition déjà en état d'ébullition. Comme l’écrivait Jean-Louis Le Touzet dans Libération: "On attend avec gourmandise le prochain télégramme de félicitations adressé de Paris au président Mahamadou Issoufou". Nous y sommes.
3 Commentaires
Anonyme Mbeur
En Mars, 2016 (10:26 AM)Anonyme
En Mars, 2016 (11:42 AM)Anonyme
En Juin, 2016 (18:16 PM)Participer à la Discussion